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Vinícius et le racisme : larmes fatales

Par Jérémie Baron

Les pleurs du Madrilène, ce lundi en conférence de presse au moment de répondre à une question sur le racisme, sont terriblement humaines. Et invitent le monde du foot à se regarder devant la glace.

Vinícius et le racisme : larmes fatales

Pour Vinícius Júnior, c’était une conférence de presse somme toute ordinaire, comme les footballeurs en vivront des dizaines et des dizaines dans leur carrière – bien que celle-ci se tînt à la veille d’une rencontre de son pays, le Brésil, dans son jardin de Santiago-Bernabéu. Un exercice de communication dans lequel, la plupart du temps, les journalistes posent des questions à durée de vie limitée, et les joueurs renvoient des formules convenues et assurées de tous risques. Jusqu’à ce que l’attaquant doive répondre à cela : « Ma question est la suivante : Quel est le poids de la lutte contre le racisme dans ta vie ? Est-ce que cette lutte te tient plus à cœur que le football ? » Malgré lui, Vini a pris l’habitude d’évoquer le sujet, alors il a embrayé.

« Dans le football, il y a beaucoup de gens et de joueurs meilleurs que moi, qui sont passés par ce qui m’arrive, a-t-il commencé. Je veux que les gens dans le monde entier évoluent, s’améliorent, et qu’on puisse obtenir l’égalité, que dans un avenir très proche, nous puissions avoir moins de cas de racisme, et que les Noirs puissent avoir une vie normale comme tout le monde. Je veux continuer à me battre pour ça. Si c’était juste pour moi, j’aurais abandonné, je serais resté chez moi, et personne ne m’insulterait. Jouer au football est très important, mais la lutte contre le racisme est la chose la plus importante. C’est très difficile de rester concentré sur le jeu uniquement. » Vinícius n’avait pas fini sa réponse, à ce moment précis où il s’est arrêté de parler. Il ne pouvait plus : les larmes ont commencé à couler, et elles ont mis du temps à s’arrêter.

Pas des actes isolés

La réponse – et les sanglots – veut dire beaucoup, mais la question aussi. Exposé à la lumière depuis ses 17 ans, Vinícius est huitième du Ballon d’or 2022, sixième du Ballon d’or 2023, meilleur joueur brésilien actuel, homme du sacre du Real Madrid en Ligue des champions il y a un an et demi, habitué aux doubles-doubles (dix buts, dix passes décisives sur une saison) en Liga, plus grand talent de ce sport selon Monsieur Carlo Ancelotti. Lors du dernier Real-Barça, sommet de la saison, il s’est offert un triplé. Durant le mois de mars, il a marqué six fois en quatre sorties. Il est rapide, technique, malin, spectaculaire, décisif : c’est un artiste du ballon. Et pourtant, l’ancien crack de Flamengo est davantage identifié, aujourd’hui, comme l’ennemi – et la victime – du racisme, que comme l’athlète hors pair qu’il demeure.

Car au Camp Nou, à l’Estadio Metropolitano, à Mestalla et aux quatre coins de l’Espagne, Vinícius subit ce racisme depuis cinq ans et s’est élevé contre lui. L’obtention de divers titres honorifiques (prix Sócrates, ambassadeur de l’UNESCO, responsabilités au niveau de la FIFA) n’a pas changé grand-chose au problème et a, pire, continué d’enfermer l’Auriverde dans cette case, pendant que les supporters espagnols poursuivaient leurs cris de singe. Contrairement à ce que clubs, instances voire groupes de supporters rabâchent (pas qu’en Espagne d’ailleurs), ces incidents ne sont pas des « actes isolés », des « exceptions » ou des comportements « individuels » : l’actualité, encore en 2024, le prouve. Lorsque vous y faites face, comme c’est le cas pour Vinícius, cela vous bouffe la vie : oui, même quand vous êtes millionnaire, célèbre et membre du gratin mondial de votre discipline.

Après 30 secondes à chercher sa respiration, lundi, le Madrilène a réussi à terminer ce qu’il avait à dire, provoquant les applaudissements de l’assemblée. « Je veux juste jouer au football, et faire tout mon possible pour mon équipe et pour ma famille, et que les personnes noires ne souffrent plus jamais. Je vois cela depuis longtemps, et à chaque fois que cela arrive je me sens plus triste, et à chaque fois j’ai moins envie de jouer. Depuis la première fois que je me suis plaint de racisme en Espagne, la situation n’a cessé de s’aggraver… Ils m’insultent à cause de la couleur de ma peau pour que je joue moins bien sur le terrain. J’ai tellement pensé à partir d’ici… Mais si je pars d’ici, je vais donner aux racistes ce qu’ils veulent. Je veux continuer ici, dans le meilleur club du monde, pour qu’ils continuent à voir mon visage. »

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Par Jérémie Baron

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