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Matteo Guendouzi : « Sampaoli te donne envie de croire à sa vision du foot »

Par Maxime Brigand, à Rennes
10 minutes

Un peu moins de deux ans et demi après son départ de l’OM, Jorge Sampaoli va relancer son histoire avec la Ligue 1, ce dimanche, à Lille, avec le Stade rennais. L’occasion d’écouter Matteo Guendouzi, tombé sous le charme de l’entraîneur argentin lors de son premier séjour français, et de se projeter un peu.

Matteo Guendouzi : «<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>Sampaoli te donne envie de croire à sa vision du foot<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>»

Il était d’abord sorti du bois, une première fois, début 2024, dans un entretien pour L’Équipe, lors duquel il avait longuement étalé ses tranches de souvenirs de Ligue 1, « ce championnat de vertige, de vitesse, partout » ayant scotché des images dans son esprit pour la vie lors de son passage sur le banc de l’OM, de mars 2021 à juillet 2022. Puis, son nom était ensuite revenu dans des bavardages, à Lyon et à Lille, mais c’est finalement là où il a toujours été le plus à l’aise, au milieu d’un délicieux bazar, que Jorge Sampaoli a effectué son retour en France, il y a maintenant un peu plus de dix jours. Gâté, l’Argentin s’est même réveillé jeudi matin avec les pieds et le museau dans la neige, ce qui n’empêche pas sa tête de fumer depuis qu’il a posé ses cartons à Rennes, 13e de Ligue 1 avant le week-end et qui ressemble, pour le moment, à tout sauf à un collectif cette saison. Ce constat, Sampaoli, assis entre Arnaud Pouille et Frederic Massara lors de la défaite face à Toulouse (0-2), avant la trêve, l’a vite tiré aussi, avouant dès sa première prise de parole publique que « la première priorité est d’être une équipe » et insistant sur la nécessité de « transformer la souffrance en sécurité ». Dimanche, à Lille, son Stade rennais va passer une première fois sur la plancha.

 

La première chose, ici, est de se réjouir du retour de Jorge Sampaoli à la table de la Ligue 1, lui qui avait réussi à faire de son aventure à l’OM une série assez fascinante à suivre. Tous les épisodes n’avaient, bien sûr, pas été aussi renversants que des loopings au Luna Park du Cap d’Agde, mais Sampaoli avait su, au fil des mois, comprendre parfaitement dans quel championnat il avait foutu les pieds. La Ligue 1 n’est pas une vague facile à dompter, et pour réussir à tenir debout sur sa planche, le natif de Casilda, qui s’est toujours plus comporté sur le bord de la touche comme un Željko Obradović que comme un Carlo Ancelotti, avait fait évoluer sa création pour qu’elle devienne une machine de contrôle huilée, supérieure dans la gestion du sablier et passée reine dans la réduction des événements d’une rencontre afin de générer le moins possible de matchs de transitions façon ping-pong. Retourné par une bataille au Vélodrome contre Lens, Jorge Sampaoli avait affirmé « que beaucoup d’équipes [seraient] meilleures que [son OM] » à ce jeu-là, et la suite avait été plus qu’intrigante à suivre, entre l’évolution du rôle de Pau Lopez dans les buts, celui des ailiers excentrés et la multiplication des milieux – dans ses rêves les plus fous, le cinéphile argentin ne titulariserait que ça.

 

Au bout, l’autre loco avait réussi son pari : au terme d’une deuxième partie de saison traversée par plusieurs rencontres marquantes, comme une victoire à Lens début 2022, mais aussi une demi-finale de C4 perdue face au Feyenoord, Marseille avait terminé deuxième de Ligue 1, avec de grosses statistiques défensives (38 buts encaissés, troisième meilleure défense du championnat, mais 39,00xGA générés, soit moins que le PSG, avec moins de neuf tirs par match concédés), et un taux de possession moyen élevé (61,7%).

 


 

Deuxième joueur le plus utilisé cette saison-là derrière William Saliba, Matteo Guendouzi n’a pas oublié et a accepté de rediscuter du bon vieux temps.

Que connaissais-tu de Sampaoli avant de travailler avec lui à l’OM ? Je le connaissais comme tout le monde, un peu de ses expériences passées, notamment du fait qu’il venait, peu de temps avant, d’être le sélectionneur de l’Argentine. Avant de signer à l’OM, j’avais aussi discuté avec certains joueurs qui étaient déjà dans l’effectif et je n’avais entendu que du positif sur lui. Quand je suis arrivé, ça a connecté très vite. J’ai rapidement senti qu’on aurait une belle relation. Déjà, parce que sa philosophie de jeu correspond à la façon dont je vois le foot. Je savais que ça allait me correspondre, que j’allais prendre du plaisir. J’ai aussi vite adhéré à l’homme, qui est toujours derrière ses joueurs, qui essaie toujours de tirer le maximum d’eux, et honnêtement, en tant que joueur, tu as envie que ça fonctionne avec lui, car il met tous les ingrédients pour.

Votre saison a été séquencée en deux phases. À quel point le match contre Lens a eu un impact dans le projet de jeu ? Je ne sais pas si c’est vraiment ce match-là qui a fait évoluer les choses, mais ce qui est vrai, c’est qu’en début de saison, on a eu une approche très offensive. La raison est simple : les équipes adverses ne savaient pas vraiment comment nous jouer, notre style. Il y avait quand même beaucoup d’espaces sur le terrain, on pouvait mettre plus de monde dans notre phase offensive et on a d’ailleurs marqué pas mal de buts (12 buts sur les 6 premiers matchs, NDLR). Le match contre Lens a été le premier où on a vu un adversaire parfaitement s’appuyer sur notre approche pour nous faire mal. Et petit à petit, on a vu les autres équipes se replier beaucoup plus, former des blocs de plus en plus bas, et ça a aussi joué sur notre approche. C’était un mix : nos adversaires avaient de plus en plus peur de venir nous chercher, car ils savaient qu’on avait la qualité technique pour sortir les ballons, exploser rapidement vers l’avant et, en réaction, attendaient une transition ou un coup de pied arrêté pour nous enfoncer.

Sampaoli avait quand même peur des transitions, non ? Oui, énormément, et il a raison, car toutes les équipes de Ligue 1 avaient cette force. Elles l’ont encore, d’ailleurs. C’est un championnat où beaucoup d’équipes ont des profils puissants, rapides, explosifs dans ces transitions offensives. Quand tu cherches à contrôler, c’est la menace qui peut te mettre en difficulté et c’est ce qu’on a cherché à amenuiser avec des ajustements, comme la hauteur de Pau Lopez ou l’utilisation de Dim’ (Payet, NDLR) en faux 9, qui a apporté de la qualité supplémentaire pour maîtriser les matchs. Plus tu es en possession du ballon, moins tu offres de possibilité d’expression à ton adversaire et moins tu t’exposes. Plus la saison avançait, plus on gagnait en équilibre à la perte.

Tu as souvenir d’un sommet ? Le match retour à Lens (0-2), sans doute, qui est, je pense, l’une des plus belles performances que l’on a réalisées avec Sampaoli. Une maîtrise totale, du début à la fin. Mais globalement, au fil de la saison, on a pris énormément de plaisir avec cette philosophie de jeu. On avait le contrôle, on se sentait plein de forces, mais ça passait par énormément de gammes répétées la semaine à l’entraînement. Chaque joueur savait exactement où il devait se positionner. Avant de recevoir le ballon, chacun savait où les autres étaient sur le terrain, quels espaces il fallait attaquer. On a presque, parfois, su jouer les yeux fermés et on sentait que ça pouvait frustrer certains adversaires de ne pas réussir à nous récupérer le ballon, d’être obligé d’être replié dans la surface. En tout cas, on a tous pris collectivement énormément de plaisir, mais individuellement, surtout, beaucoup de joueurs ont progressé grâce à cette saison avec Sampaoli : Cengiz Ünder a fait une super année, Dim’ Payet a fait sa ou l’une de ses meilleures saisons à l’OM, Bouba Kamara, William Saliba, Valentin Rongier dans un rôle très spécifique, moi…

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Pourtant, on a aussi la sensation, parfois, d’un décalage entre votre plaisir collectif et le plaisir pris par les supporters de l’OM. Je sais que ça a pu frustrer, oui, mais si on est honnête, encore une fois, on a affronté beaucoup d’équipes très regroupées, et ce n’est pas si facile de marquer face à des blocs aussi compacts. Même chez nous, ça a pu frustrer d’affronter autant de bus, mais globalement, je pense que ça a été bénéfique, quand même.

Qu’est-ce que tu gardes, au bout, de Sampaoli ? Une rencontre exceptionnelle, et ça m’a fait vraiment très mal qu’il s’en aille en fin de saison. C’était très, très, très, très fort. Et le marqueur, on y revient, c’est que tu peux demander à tous les joueurs présents dans l’effectif cette saison-là, tout le monde a pris du plaisir. Sampaoli te donne envie de croire à sa philosophie, à sa vision du foot, et il avait aussi, je pense, les pièces parfaites pour y répondre. Je regardais déjà pas mal la Ligue 1, mais je vais encore plus suivre les matchs de Rennes maintenant, c’est une certitude. C’est top pour le championnat qu’il soit de retour, et je sais que ça peut faire quelque chose de grand si tous les joueurs acceptent de le suivre.

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Le chantier est grand et Jorge Sampaoli le sait, Rennes dansant avec un taux de possession moyen de 50% (50,5%) et étant l’équipe de Ligue 1 qui s’est procuré le moins de grosses occasions cette saison (13) pour 12,9xG générés (13e total du championnat) et 14,7xG concédés (6e). Face à la presse, vendredi midi, après avoir laissé entendre quelques mots de français, l’Argentin a malgré tout dit : « J’ai confiance dans l’idée que l’équipe sera plus agressive. Généralement, un changement de coach génère quelque chose, et l’important, pour le moment, est que l’équipe parvienne à appliquer nos idées. Plus que le système, il faut développer une culture et, comme à Marseille, il y aura besoin d’un certain contrôle pour se prémunir des transitions offensives adverses. Il faut que cette culture, cette idée de jeu, devienne une religion. » Quelle allure aura son Stade rennais ? Il faudra attendre plusieurs semaines pour se prononcer. Ce qu’on sait, en tout cas, c’est qu’on devrait vite revoir un gardien utilisé assez haut, de façon à générer une supériorité numérique à la relance face à la première ligne de pression adverse et à pouvoir contrôler la profondeur de façon plus efficace.

Exemple de l’utilisation de Pau Lopez à l’époque de Jorge Sampaoli à l’OM. Le gardien espagnol tournait alors à un peu moins de 48 ballons touchés par match et jouait très haut. Lors de ce match à Strasbourg, il avait affiché un total de 68 ballons, dont 6 au milieu de terrain.

 

Avant d’aller visiter une potentielle maison, Jorge Sampaoli a affirmé que Mandanda était assez « courageux » pour être ce gardien – cette saison, il est cependant le gardien qui tente le moins de passes (28) et celui qui touche le moins de ballons (moins de 30) par match parmi les hommes à gants de Ligue 1 – et il sera intéressant de suivre, vu le passé entre les deux hommes, le futur de leur collaboration. Ludovic Blas, seul soleil dans la grisaille du coin, a, de son côté, détaillé ceci : « Il nous a dit les choses qu’il avait vues lors du match contre Toulouse et, comme à chaque changement de coach, une dynamique s’enclenche. Avec lui, ça parle beaucoup plus, il y a plus de voix, de pauses dans les séances pour bien assimiler ses idées, sa volonté d’avoir un meilleur contrôle et de réagir plus vite à la perte de balle. Maintenant, j’ai vu des groupes pires que celui qu’on a, il y a une bonne mentalité, et je pense juste qu’on a manqué de chance sur certaines situations. L’arrivée du nouveau staff peut nous aider à trouver ce qui manque. » Allez, place au lever du rideau.

Ce Lille-Rennes restera dans les annales, mais pas pour les bonnes raisons

Par Maxime Brigand, à Rennes

Propos de MG recueillis par MB.

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