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Cinq débats foot pour sauver votre réveillon

Par Adrien Hémard-Dohain
7 minutes

Projet de loi immigration, conflits en Israël et en Ukraine, retour au premier plan de Trump ou dislocation de la NUPES : vu les probables sujets de discussion, le réveillon de Noël 2023 sent le sapin. Voici donc cinq manières de recentrer les débats sur le foot, et de maîtriser votre match.

Cinq débats foot pour sauver votre réveillon

→ « Faut-il interdire les déplacements de supporters ? »

On commence avec du tout frais, et du solide. Aussi impensable que cela puisse paraître dans un pays qui revendique d’être celui des Droits de l’humain, la liberté fondamentale d’aller et venir est aujourd’hui en question pour une catégorie : les vilains supporters de foot. Les ministres de l’Intérieur et des Sports ont lâché la bombe, pour générer un nouvel écran de fumée supposé masquer leur incompétence en matière d’encadrement de foule. Sur ce sujet, souvent méconnu et caricaturé, vous êtes sûrs d’attirer l’attention autour de la table. Entre ceux qui n’ont jamais mis un pied dans un stade, mais pour qui les supporters de foot sont tous des bagarreurs alcooliques (vous gagnerez d’ailleurs 5 minutes à expliquer la différence entre hooligans et ultras) et ceux qui, par principe, défendent toute minorité menacée, vous pouvez facilement tenir vingt minutes. À vous de jouer le passe-plat au milieu de tout ça, et de caser les INS, ANS, FSE ou encore référent supporters pour imposer votre savoir.

L’avis de tonton raciste : « Il faut interdire tous les déplacements d’humains, de toute façon. » L’argument implacable : Les derniers avis du Conseil d’État.


→ France 2018 vs France 1998, c’était mieux avant ?

Classique absolu des repas de famille, le clash générationnel peut sérieusement diminuer vos étrennes. Alors quand la discussion se penchera sur le dérèglement climatique et le rôle des générations précédentes à ce sujet, déviez ce moment « nostalgie » sur un duel plus parlant : France 1998 vs France 2018. Selon votre camp, il vous faudra défendre Vegedream face à Gloria Gaynor, Grizou face à Zizou ou encore « Second poteau Pavaaaard » face à « Après ça, on peut mourir tranquille ». L’occasion aussi de se remémorer des séquences cultes qui feront l’unanimité, comme Chirac le Footix, l’extincteur d’Adil Rami ou la parade d’Alexandre Benalla sur les Champs. Les plus informés pourront rappeler la véritable origine du baiser de Laurent Blanc sur Fabien Barthez, si les enfants sont couchés. Bref, un débat finalement sain qui verra chacun énumérer des souvenirs joyeux qui se chargeront d’adoucir l’atmosphère de la soirée.

L’avis de tata complotiste : « Aucun des deux. Tout le monde sait que le Mondial 1998 a été truqué par Platini, et le 2018 par Micron. (Se lève et chante) On est là, on est làààà… » L’argument implacable : 1998, c’était la première fois, à domicile, et sans être favori. Déso la génération Z.


→ CR7 ou Messi, qui est le GOAT ?

Quitte à détourner le sujet de conversation, autant en lancer un interminable, histoire de se mettre à l’abri pour de longues minutes. Quand votre petit-cousin vous tiendra la jambe pour trancher entre Damso et Gazo, pendant que votre tante déportera le débat vers IAM et NTM, vous pourrez lancer la vraie élection du GOAT : Messi ou CR7 ? Une question plus vraiment épineuse depuis le Mondial 2022 et le huitième Ballon d’or de la Pulga, pendant que la machine portugaise ouvrait la boîte de Pandore en Arabie saoudite. Mais le crépuscule des deux idoles n’a jamais véritablement clos le débat. À vous de choisir votre camp entre le talent pur de l’Argentin et la mécanique évolutive du Portugais. Cinq Ligues des champions et un Euro valent-ils autant que deux C1 et un Mondial ? Le nombre d’abonnés Instagram est-il un critère viable ? Autant de points à trancher qui vous assure de longues minutes de tranquillité. Même si tout le monde sait que le GOAT, le vrai, c’est un autre Argentin.

L’avis du beau-frère : « Non mais franchement, vous me faites rire. Jordan, ça, c’était un vrai champion. Tu as vu la série sur Necflic ? » L’argument implacable : Aucune victoire en Grand Chelem à eux deux, soit 24 de moins que Novak Djokovic. CQFD.


→ Le jeu de transition a-t-il sonné le glas de la possession ?

Parce qu’on ne sait jamais : vous n’êtes pas à l’abri de tomber sur un adversaire à votre taille autour de la table. Alors autant se prévoir un débat de tactix pour briller devant vos proches, et ressentir le doux plaisir d’une joute verbale victorieuse en mouchant votre beau-père, insupportable « amoureux du jeu à la nantaise ». Ce sera le moment parfait pour étaler votre aisance en novlangue footballistique : transition, verticalité, contre-pressing, half-space, impact player, expected goals, courses à haute intensité, heat map… Reste à choisir votre camp ou à faire comme Manchester City : jouer les deux. Ce sera aussi l’occasion de dégommer le plan de Luis Enrique pour le PSG, et d’expliquer pourquoi Kylian Mbappé et Randal Kolo Muani sont faits pour jouer sous les ordres de Jürgen Klopp, et pas d’un chantre du tiki-taka passé de mode.

L’avis de tonton parisien : « De toute façon, la meilleure façon d’empêcher la circulation, c’est de la confier à Annie Dingo. » L’argument implacable : Didier Deschamps a choisi de ne pas choisir. Et ça marche quand même.


→ Les footballeurs sont-ils trop payés ?

Un petit classique, valable chaque année peu importe l’époque et le contexte économique, mais avec une nouveauté cette année : les pétrodollars qui tombent en Arabie saoudite, et font bégayer la toute-puissante Premier League, ce qui sera un argument de plus pour ceux qui voient les artistes du ballon rond comme des mercenaires. 200 millions d’euros pour CR7, 100 pour Benzema, 90 pour Mbappé, 80 pour Neymar, 65 pour Messi en 2023 selon Forbes : de quoi faire tourner les têtes et alimenter les argumentaires démagogiques les plus bas de plafonds. Sans entrer dans le détail de l’argent généré par le monde du foot et des milliers d’emplois autour, vous pourrez rappeler que la fraude fiscale s’élève à 100 milliards d’euros annuels. N’hésitez pas à lâcher quelques noms de PDG en pâture, comme Carlos Tavares, PDG de Stellantis, qui a émargé à plus de 66 millions d’euros en 2021, ou Bernard Charles, à la tête de Dassault, et ses 44 millions d’euros annuels grâce à la vente d’armes. Dans un autre genre, le trafic de drogue génère 2,7 milliards d’euros de bénéfice par an en France selon l’INSEE. Et puis, jusqu’à preuve du contraire, les footballeurs ne sont pas payés avec l’argent public.

L’avis de la cousine féministe : « Les joueuses devraient gagner la même chose, c’est un scandale. En plus ils ne font que de se rouler par terre, c’est pour ça que je préfère le rugby. » L’argument implacable : Christian Clavier a bien gagné 82 millions d’euros en 2023 en jouant systématiquement le même rôle de grand-père raciste, de droite.


→ Bonus marseillais : les Saoudiens à l’OM, oui ou non ?

Un peu d’huile sur le feu pour finir, si vous avez un supporter de l’OM autour de la table. Si les Saoudiens souhaitent réellement racheter l’Olympique de Marseille, faut-il les laisser venir ? Évidemment, après avoir dénoncé les pétrodollars qataris du PSG depuis plus de dix ans, un tel retournement de veste serait fatal à la crédibilité des défenseurs du football populaire. À moins qu’il ne s’agisse que d’une posture de façade pour votre père, marseillais depuis Tapie, et qui se languit depuis de retrouver un OM capable de jouer les premiers rôles en Europe, peu importe le prix à payer. Après tout, le football est déjà pourri à tous les étages, vous expliquera-t-il, donc autant prendre sa part du gâteau. Vous pourrez lui rétorquer que l’OM est trop fier pour se vendre à n’importe qui, et que le Vélodrome défend des valeurs incompatibles avec l’argent saoudien. Même si, au fond, vous savez qu’il s’agit de la seule possibilité de voir Zinédine Zidane enfin couvert du survêtement ciel & blanc…

L’avis du tonton complotiste : « De toute façon, à l’OM, l’argent est sali depuis toujours par le grand banditisme et la drogue. Alors bon…» L’argument implacable : Le drapeau de l’Arabie saoudite est vert, une couleur qui ne passe pas au Vélodrome, même quand on paye.

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Par Adrien Hémard-Dohain

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