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Angoulême-Bordeaux, le foot sans interdiction

Par Emmanuel Hoarau, au stade Camille-Lebon

Ce samedi, Bordeaux se déplaçait sur la pelouse d’Angoulême pour le compte d’un huitième tour de Coupe de France. Si, sur la pelouse, le spectacle n’a pas été au rendez-vous, c’est surtout l’interdiction de déplacement des supporters bordelais, prononcée puis retoquée par le Conseil d’État, qui a été au centre des préoccupations. On y était.

Angoulême-Bordeaux, le foot sans interdiction

Un samedi après-midi de fin d’automne. Sur la calme et paisible cité d’Angoulême, la pluie tombe, battante et régulière. Cependant malgré l’atmosphère humide, l’heure est au football et à la Coupe de France. Le club local affronte un monument du football français : les Girondins de Bordeaux. Le tout dans un derby néo-aquitain inédit à ce niveau de compétition. L’ambiance, quant à elle, est bon enfant. Dans la nasse de supporters venus se presser dans les travées d’un stade Camille-Lebon rempli de toutes parts, on distingue nombre de Bordelais, écharpes au cou ou maillots au scapulaire fièrement arborés en dessous des manteaux et autres vêtements contre la pluie.

Pourtant, cette fête a failli ne pas avoir lieu. Mercredi dernier, en réponse à la mort de Maxime, supporter nantais décédé en amont de la rencontre entre Nantes et Nice, le ministère de l’Intérieur a publié un arrêté d’interdiction de déplacement des supporters visiteurs pour huit rencontres de football disputées ce week-end. Quatre de ces interdictions, dont celle portant sur Angoulême-Bordeaux, ont été attaquées devant le Conseil d’État, puis cassées par l’institution. Néanmoins, la préfecture de la Charente a tenu à déployer un important dispositif policier, sans toutefois nuire à l’atmosphère globale de la rencontre.

Un match de football, c’est une fête, et il y a énormément d’habitants d’Angoulême qui supportent les deux clubs, donc on ne peut pas comprendre.

Jérôme, responsable du groupe de supporters d’Angoulême

Une rivalité ? Quelle rivalité ?

Cette politique de répression pose question. Dans les sujets de conversation, en avant-match, elle apparaît constamment. Jérôme, responsable du groupe de supporters angoumoisin Tribune Nord 21, représente assez bien l’incompréhension générale : « On reçoit Bordeaux. C’est énorme pour la ville et pour montrer qu’en N2, il y a une ferveur. Que les supporters bordelais aient été interdits est un scandale ! Un match de football, c’est une fête, et il y a énormément d’habitants d’Angoulême qui supportent les deux clubs, donc on ne peut pas comprendre. » Même son de cloche pour Léo*, 18 ans, encarté aux Ultramarines, qui a effectué le déplacement en indépendant : « C’est honteux ! Les supporters font partie du football, et les ultras ont leur place dans un stade. On nous parle d’une rivalité inexistante avec des supporters d’un club de N2. Le plus dur, c’est que nous ne sommes pas les seuls à devoir lutter pour nos libertés. Le mot d’ordre doit être que même interdits, on sera toujours là ! »

À moins d’un quart d’heure du coup d’envoi, le parcage bordelais se met enfin en place. L’occasion pour le speaker de leur adresser un hommage, en demandant au stade d’applaudir les supporters bordelais ayant fait le déplacement. Une action justifiée par la constante volonté du club d’accueillir les supporters adverses. « À la toute première réunion d’organisation que l’on a eue avec les autorités et les Girondins, on a martelé le fait de vouloir accueillir les supporters, car notre but était d’organiser une fête du football », se remémore Pierre-Emmanuel Allard, directeur sportif d’Angoulême. « On a arrêté de dormir depuis mercredi. On a passé des heures à rester en stand-by en attendant des informations et des consignes. La sécurité était à prioriser, malgré l’énorme poids économique qu’a la Coupe de France. Il a fallu faire preuve d’adaptabilité, et notre travail de fond a payé. Aujourd’hui, sans les ultras bordelais et leurs chants, cela aurait été un tout autre match, et je pense que tout le monde a pu en profiter », poursuit-il.

Les tensions n’étaient pas en tribunes

Car oui, si dans les tribunes, l’atmosphère est restée au beau fixe durant l’intégralité de la rencontre, sur le terrain l’ambiance fut bien différente. La pluie et la pauvreté technique des Bordelais dans le jeu (accompagnée peut-être d’un zeste de suffisance) ont tendu les relations entre les acteurs. En première période, puis au retour des vestiaires, deux altercations ont éclaté. D’abord avec Albert Riera, d’habitude si calme dans sa zone technique, puis avec Clément Michelin, latéral droit bordelais dans une séquence qui a failli en arriver aux mains. Après la partie, David Giguel, le coach charentais, a qualifié le joueur d’« imbécile » et a parlé du «  manque d‘humilité » de Riera. Les tensions n’étaient en tout cas pas dans les travées. « Je suis très content qu’ils aient pu être là, s’est réjoui le technicien bordelais. À eux seuls, ils forment un spectacle, et l’on a besoin d’eux pour performer.  »

Si tout le monde semble avoir pu bénéficier de la présence des supporters bordelais dans le parcage, il tient néanmoins à réfléchir sur le contexte dans lequel se trouvent les tribunes françaises en ce moment. La violence resurgit de nouveau, et un supporter est mort, la semaine passée. La politique du tout-interdire évite en théorie les heurts qui mènent à des drames comme celui de samedi dernier. Mais, à l’inverse, quel est l’intérêt d’interdire le déplacement de supporters, dans une ville à une centaine de kilomètres seulement, lorsqu’aucun contentieux n’existe ? Le travail mené en amont par le club d’Angoulême montre bien que les choses peuvent se passer dans le calme. Il y a urgence à trouver un équilibre. Dans neuf mois, la France organise le plus grand événement sportif planétaire et l’afflux d’amateurs de sports sera d’un tout autre niveau que celui des 1000 fans bordelais présents ce samedi, en tout et pour tout, dans la cité angoumoisine.

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Par Emmanuel Hoarau, au stade Camille-Lebon

* Le prénom a été modifié

Tous propos recueillis par EH

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