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Comment expliquer les échecs de Mbappé sur penalty ?
Avec deux échecs consécutifs sur penalty, Kylian Mbappé semble marquer le pas dans un exercice qu’il ne craignait pas jusqu’ici. Décryptage avant de défier l’Atalanta ce mardi.
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Caoimhin Kelleher et Julen Agirrezabala pourront se féliciter d’avoir réussi là où Emiliano Martínez a échoué : arrêter un penalty de Kylian Mbappé. Bras tendus et corps à l’horizontale, le gardien de Liverpool et celui de l’Athletic Club ont effet réalisé deux parades d’école devant l’attaquant du Real Madrid, dont les tentatives à onze mètres n’auront été que trop mollassonnes, pour ne pas dire mal frappées. Se pose donc la question de la qualité des frappes signées Mbappé et des points lui restant à corriger pour retrouver son efficacité.
Il ne donne pas assez d’amplitude à son geste, donc pas assez de puissance dans son ballon. Le gardien a du temps pour agir.
Avant la technique, il faut évidemment s’intéresser aux chiffres. Depuis décembre 2015 et ses débuts professionnels, Kylian Mbappé a inscrit 44 de ses 56 penaltys tentés soit un taux de réussite estimé à 78,57%. Depuis décembre 2015 également, 4 069 penaltys sur 5 217 tentés dans les cinq championnats majeurs ont été transformés (78% de réussite, rapport Opta et L’Équipe). Mbappé est donc dans la moyenne. Le bilan chiffré réalisé, place à l’analyse du geste. « Ce qui me dérange un peu – même si c’est valable pour beaucoup de joueurs actuels –, c’est sa course d’élan, glisse Guillaume Hoarau, 5 penaltys manqués seulement en 54 essais. Il ne donne pas assez d’amplitude à son geste, donc pas assez de puissance dans son ballon. Le gardien a du temps pour agir. » Au moment de prendre sa décision, l’attaquant du Real Madrid a en effet semblé offrir beaucoup d’indications à Kelleher et Agirrezabala, notamment par sa posture face au cuir. « Sur ces deux penaltys, il avait le dos très courbé et le buste pas assez droit, pose de son côté Frédéric Meyrieu, ancienne gâchette de D1 qui a inscrit la totalité de sa quinzaine de penaltys. Cela ne lui a pas permis de suffisamment lever son ballon loin des bras des gardiens ou de la placer suffisamment à ras du poteau pour les empêcher de l’atteindre. »
Impatience et geste précipité
Le rapport Opta-L’Équipe indique également une donnée intéressante : depuis son entame de carrière, Kylian Mbappé frappe en majorité vers le coin droit de la cage – la gauche du gardien (39,7%). Paradoxalement, sans grand succès (65% de réussite). Contre Liverpool et l’Athletic Club, c’est pourtant à cet endroit qu’il a décidé de retourner. Comme une zone de confort ? Certainement, à en croire Fred Meyrieu : « Habitué à tirer comme cela, Mbappé s’est forcément posé la question et a décidé de ne prendre aucun risque. Il est toujours plus facile de tirer un penalty en ouvrant le pied, mais le marquer est plus compliqué, car le ballon va moins fort. À mon sens, l’idéal aurait été qu’il ferme son pied et croise son tir pour vraiment envoyer une frappe puissante et être sûr de mettre le gardien en difficulté. »
Guillaume Hoarau partage la vision de l’ancien meneur messin : « Le penalty, c’est une passe appuyée. Quand tu fais une passe, il faut t’assurer qu’elle claque et qu’elle atteigne ton coéquipier. Le penalty c’est pareil, il doit être puissant et atteindre la zone du filet que tu as imaginé. Le meilleur moyen pour allier ces deux éléments, c’est de verrouiller la cheville, de croiser ta frappe et d’accompagner ton ballon jusqu’au bout. » Humble avis de spécialiste.
Son langage corporel trahit de l’impatience, oui. En début de saison, Mbappé a marqué deux ou trois penaltys très sereinement, car il avait moins peur de l’échec.
Enfin vient le fameux choc psychologique, point d’ancrage des difficultés de Mbappé depuis son arrivée à Madrid. S’il semble enfin plus à l’aise dans le jeu, la donne se complique une fois face au but. Hoarau : « Il se précipite sur beaucoup de choses. Sur ces derniers penaltys, on le voit s’impatienter en regardant l’arbitre, comme s’il voulait tirer le plus vite possible pour se débarrasser de la pression. Idem sur sa course, il pose le ballon, recule rapidement et frappe directement après le coup de sifflet de l’arbitre. L’idéal, ce serait de respirer un bon coup et de prendre quatre gros pas d’élan pour être sûr d’envoyer une mine imparable. » Même son de cloche chez Meyrieu : « Son langage corporel trahit de l’impatience, oui. En début de saison, Mbappé a marqué deux ou trois penaltys très sereinement (face au Betis, à la Real Sociedad et à l’Espanyol), car il avait moins peur de l’échec. Aujourd’hui, sa petite crise de confiance fait qu’il rate plus à cause de sa tête que de sa technique. Il faut simplement qu’il se dise que rater n’est pas grave et qu’il troue les cages à sa prochaine tentative. Comme face à l’Argentine, lorsqu’il était en ultraconfiance et que chacune de ses frappes partait fort, petit filet. Tout est une question de force désormais. » Réponse dans les prochaines semaines, à commencer contre l’Atalanta.
Par Adel Bentaha
Tous propos recueillis par AB.