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Limsa d’Aulnay : « Au Mexique, pour les gens, j’étais Zidane  »

Propos recueillis par Jérémie Baron // Photo : © N. FIRMINO

Petit, il a fait naître sa passion du foot en s'écorchant les genoux au city stade de son quartier ou en tournant les pages des magazines So Foot offerts par sa grand-mère. Devenu un rappeur en vogue, Limsa d'Aulnay parle de Zizou, de Juan Roman Riquelme et de ses exploits dans les fives de Bruxelles, pour la sortie de Bitume Caviar (Vol.01), son album commun avec Isha qui sort ce vendredi.

Limsa d&rsquo;Aulnay : «<span style="font-size:50%">&nbsp;</span>Au Mexique, pour les gens, j&rsquo;étais Zidane <span style="font-size:50%">&nbsp;</span>»

Ça représente quoi, le foot, pour toi ?

C’est une passion qui m’inspire. Dans la rue, quand je vois des petits qui jouent, j’ai envie d’aller jouer avec eux. À la télé, quand je tombe sur un match de D2, je vais m’arrêter dessus. Je vois ça comme un art, je trouve ça beau.

Tu as joué en club ?

Je suis surtout un mec de dehors. Le béton ! Qui a bien niqué mes genoux, d’ailleurs. Le vieux monsieur que je suis le paye. C’était surtout le city. À Aulnay, il y en avait plein. À la cité, on avait aussi un énorme terrain en stabilisé, ma mère détestait que j’aille jouer là-bas parce que je revenais tout le temps avec des chaussettes toutes rouges. Et le foot en salle, aussi. Il y a un gymnase, et chaque quartier avait son créneau. Moi, j’essayais d’aller au maximum de matchs, même ceux des autres quartiers. Je jouais beaucoup avec ceux de la cité Chanteloup, à Aulnay Sud, qui n’a rien à voir avec mon quartier. Au bout d’un moment, ils ne se demandaient même plus ce que je foutais là, j’étais un habitué.

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« Islam Slimani », en featuring avec Okis : peut-être le titre le plus riche en références foot de l’histoire du rap.

Tu es quel style de joueur ?

Je sais jouer, mais je serais malhonnête de dire que je suis super fort, parce que sinon, je ne serais pas au téléphone avec toi, je serais en train de m’entraîner avec le Real. (Rires.) Je suis toujours à la recherche de la beauté, bien plus que de l’efficacité. J’aime bien faire un joli geste, un joli dribble, une jolie passe. Là, je m’épanouis. Un peu comme dans le rap : je préfère faire de jolies rimes. Mes joueurs préférés, c’étaient vraiment des romantiques : j’adorais Recoba, Riquelme, Guti, tous ces mecs-là.

Ben PLG nous a raconté que son pseudo MSN était « Fodé Mansaré ». Toi, ton mot de passe, c’était « recobagutiriquelme »(1)

Pendant longtemps, c’était mon mot de passe pour tout ! Quand j’ai commencé à m’inscrire à Pôle Emploi, etc., il fallait trouver d’autres codes. (Rires.) C’étaient vraiment mes trois joueurs. Pas forcément ceux que je trouvais les plus chauds : j’étais conscient que s’ils n’allaient pas si haut que ça, il y avait des raisons. Mais j’étais fanatique. Leur manière de voir le foot, c’était exactement ce que j’aimais. Si j’avais eu le talent pour faire ce que j’ai envie de faire sur un terrain, je ressemblerais peut-être à ces mecs-là. J’étais fan de l’Inter, du Real et de Marseille. J’ai choisi ces trois clubs au même âge et je ne les ai plus quittés. Je me suis éveillé au foot en 1997-1998, et ce n’est pas un hasard si j’ai kiffé ces trois clubs, car c’est l’année où le Real prend la Ligue des champions avec le but de Mijatović et où l’Inter prend la Coupe de l’UEFA. Et Marseille, c’était l’équipe que j’aimais le plus en France, il y avait des joueurs que je kiffais, comme Ravanelli.

Ça fait beaucoup, trois équipes. Tu arrives à tout suivre ?

Bien sûr que j’arrive à suivre. J’ai un tas de frérots qui ne comprennent pas que mon dimanche soir, c’est devant Marseille. Il y a des saisons où je boude un peu. En ce moment, Marseille, je ne regarde plus, je fais une pause. Le dernier match que j’ai vu au Vélodrome, c’était contre Toulouse (0-0, le 17 septembre) : je ne suis vraiment pas sûr d’y retourner avant un petit moment.

L’Inter et le Real, tu es déjà allé les voir au stade ?

Jamais. Mais avec la musique, je peux réaliser certains de mes rêves. Ça ne saurait tarder. Avant de mourir, je pense que j’y serai allé quelques fois.

À mon époque, ça n’était pas un scandale de supporter Marseille en habitant en banlieue. Je ne suis pas de Paris, je suis d’Aulnay. Quand j’allais à Paris, je voyais bien que je n’étais pas un Parisien.

À Aulnay-sous-Bois, ça ne supporte pas Paris ?

Je suis né en 1986 et quand j’étais jeune, la plupart des banlieusards, en tout cas les grands de ma cité, supportaient Marseille. Il y en avait évidemment qui étaient pour Paname, mais c’était beaucoup moins que maintenant. À mon époque, ça n’était pas un scandale de supporter Marseille en habitant en banlieue. Je ne suis pas de Paris, je suis d’Aulnay. Quand j’allais à Paris, je voyais bien que je n’étais pas un Parisien. Cette appartenance géographique, pour moi, elle ne s’applique pas à la banlieue.

Tu supportes aussi l’Algérie, dont tu es originaire ?

Je supporte aussi l’Algérie, évidemment. Algérie-Égypte, pour la qualif de 2010 (au Mondial), c’est un des matchs les plus intenses que j’ai vécus. C’était incroyable. J’étais dans une chicha à Blanc-Mesnil. Malade, le match. Les émotions, quoi ! Il y a très peu de choses qui te procurent ça.

Tu as des potes dans le foot ?

Le footballeur avec lequel j’ai été le plus proche, c’est un frérot qui s’appelle Kevin Trudo, un mec d’Aulnay qui était dans ma classe en 4e et 3e. Il a joué en équipe de France de beach soccer, et également en Italie, en Serie B et Serie C (à 37 ans, il évolue aujourd’hui à la SSD Jesina Calcio, en Serie D). Il a eu beaucoup d’histoires aussi, les « mauvais grands frères », les mecs qui s’improvisent agents et te promettent monts et merveilles. Il aurait peut-être pu avoir une encore meilleure carrière que celle qu’il a eue, même si elle est déjà très respectable. Mais le standard de niveau dans ces quartiers, à l’échelle mondiale, c’est très très élevé. Je suis parti en vacances au Mexique, et, quand j’ai joué au foot sur des terrains dehors – j’adore ça –, je me suis rendu compte que pour les gens là-bas, j’étais Zidane. (Rires.)

Dans une chicha, l’agent de Mohamed Sissoko m’avait dit qu’avec tous les mauvais gars qu’il y avait dans ce milieu, un mec comme moi, qui connaissait juste un peu le foot, avait sa chance.

Ces « grands frères » qui se la jouent agents et tournent autour du jeune de leur quartier qui perce dans le foot, tu l’as vu, toi ?

Quand j’avais la vingtaine, j’avais rencontré l’agent de Mohamed Sissoko dans une chicha. Il m’expliquait qu’avec tous les mauvais gars qu’il y avait dans ce milieu, un mec comme moi, qui connaissait juste un peu le foot, avait sa chance. C’est une discussion de chicha évidemment, je n’ai pas l’âme d’un agent, mais pour qu’on en arrive à proposer à un amateur d’intégrer cette corporation, c’est qu’il y a un souci. Bien sûr qu’autour de nous, on a entendu des histoires. Je le vois beaucoup plus dans la musique : il y a un tas de mecs qui étaient dans le bédo il y a six mois et qui sont maintenant managers. Parce qu’il y a de l’argent propre, et beaucoup. Un petit mec naïf de 15, 16, 17 ans qui a des rêves, du talent et qui représente un potentiel financier intéressant, que ce soit dans le foot ou la musique, c’est une proie facile pour des mecs comme ça. C’est facile de faire signer des choses à des familles qui ne sont pas toujours au fait de comment on peut lire un contrat, etc. Moi, j’ai la chance que ma musique n’ait pas fait de moi une tête d’affiche, et puis j’ai l’âge que j’ai. Mais si j’avais 20 piges et que mon nom tournait, je n’aurais pas été à l’abri qu’on vienne toquer chez moi et qu’on me dise : « Maintenant, t’es avec nous. »

Tu as une petite obsession avec Zizou, que tu cites beaucoup.

Parce que c’est le meilleur ! C’est comme Booba dans le rap, je le mets à part. En tant que jeune Maghrébin ayant grandi dans les années 1990-2000, c’est difficile de l’éviter. Je ne connais personne qui ne l’aime pas. Il a amené le foot à un niveau, et il nous a fait kiffer comme personne ne nous a fait kiffer. Quand tu le regardais jouer, il y avait de la magie. C’est l’un des plus grands artistes que j’ai vus.

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Quand tu te retrouves en studio avec JeanJass ou Ben PLG, ça parle foot ?

Avec Jass, on parle énormément de foot. D’ailleurs, avec lui, on fait deux fives par semaine, à Bruxelles. Et après, on débriefe ensemble. Parfois, quand on trouve une petite rime rigolote sur un footballeur, on se l’envoie. Avec Ben, on échange plus sur la musique, parfois sur le foot. Ce qui est marrant, c’est qu’Isha ne connaît rien au foot. Lui, c’est un mec du skate, il est calé. Il n’y a pas longtemps, lors d’un show, il m’a appris qu’un mec que je connaissais depuis quatre ans était en fait un putain de skateur qu’il kiffait quand il était petit. Je ne savais même pas. (Rires.)

Propos recueillis par Jérémie Baron // Photo : © N. FIRMINO

À écouter : Bitume Caviar (Vol.01), d'Isha et Limsa d'Aulnay.

(1) Anecdote racontée dans le Loto Foot du So Foot n°211, en kiosque depuis le 9 novembre.

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