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Daniel Lauclair : « Pour la traduction de Luis Enrique, j’avais envie de mettre du sel »

Propos recueillis par Antoine Donnarieix

Luis Enrique se rapproche du banc du Paris Saint-Germain. En France, l’Asturien est indéniablement lié à Daniel Lauclair, depuis un doublage devenu culte dans l'émission Tout Le sport en 2017. Entretien avec le mythique journaliste de France Télévisions, à lire avec un accent espagnol caricatural.

Daniel Lauclair : « Pour la traduction de Luis Enrique, j’avais envie de mettre du sel »

Bonjour Daniel ! Votre intervention dans Tout Le sport a été réalisée dans le cadre du match aller des huitièmes de finale de la Ligue des champions 2016-2017. Comment aviez-vous préparé votre sujet ?

Déjà, on va dire une chose : c’est important que vous le notiez, car les gens ne savent rien, et on ne m’appelle jamais pour me demander le pourquoi. Il faut savoir que globalement, et je fais exprès de ne pas dire tout le monde, mon intervention avait été hyper bien appréciée. Après, je me demande si les réseaux sociaux ne font pas passer cela pour une bourde. La vérité, c’est que ce n’était pas du tout une bourde. Vous avez bien résumé le contexte, le PSG recevait le Barça. Dans le journalisme télé, il y a des salles de mixage. Là, un camarade du service des sports avait fait le sujet dans la matinée. Tous les journalistes du service des sports, de la politique ou d’ailleurs se rendent des services : « Tu peux faire la voix d’untel ? » Dans l’après-midi, on m’a demandé ce service, je l’ai fait. Là, ce n’est pas vraiment du doublage, car nous ne sommes pas au cinéma, mais pour faire simple, il fallait une voix d’homme pour traduire Luis Enrique après quelques mots d’amorce et terminer avant la fin de son élocution.

Comme je sais que de toute façon on va le refaire derrière, j’ai fait le clown. Quand je suis sorti de la cabine, toutes les personnes étaient mortes de rire. De mon côté, j’étais content de ce petit effet.

Daniel Lauclair

Qu’est-ce qui vous passe par la tête au moment d’imiter l’accent espagnol pour Luis Enrique ?

Ce jour-là, j’avais envie de mettre du sel. Je suis catalogué comme cela à France Télévisions. Et si vous n’avez pas de sel dans ce domaine, c’est un peu dommage pour votre carrière. C’est trop facile de dire « Comment allez-vous ? Ceci, cela… » Dans la salle, il devait y avoir 4 ou 5 stagiaires, deux monteurs, une personne du service. Moi, je me suis dit qu’on allait s’amuser et c’était l’occasion de mettre une bonne ambiance. J’écoute, je fais la traduction et je vais dans la cabine de mixage. Comme je sais que de toute façon on va le refaire derrière, j’ai fait le clown. Quand je suis sorti de la cabine, toutes les personnes étaient mortes de rire. De mon côté, j’étais content de ce petit effet. Et en sortant, tout le monde me dit : « Mais Daniel, c’est formidable ! » Là, je me dis que c’est drôle, j’ai fait ma pièce de boulevard, mais on va le faire plus sérieusement. Habituellement, je ne fais jamais cela !

Au moment du montage, vous ne vous êtes pas dit que ça allait susciter de l’indignation chez certaines personnes si cela passait en direct ?

J’en ai parlé avec Jean-Philippe Guillin, car il était le rédacteur en chef de Tout Le sport à cette période. Il écoute mon intervention et il est mort de rire. Il me dit : « Daniel, c’est extraordinaire ! » Je lui dis : « D’accord, mais bon… On ne peut pas s’arrêter là, je vais le refaire. » Il me répond : « Mais ça te ressemble. » OK, ça me ressemble, mais à partir d’un moment il faut rester sérieux… Et il me dit : « Attends Daniel, on va le laisser. Ce que tu as fait, personne ne l’a fait avant. Ça va être extraordinaire. » Et là, je suis inquiet parce je sais que les réseaux sociaux sont là, que cela peut prendre une orientation qui ne va pas me convenir et je vais me sentir mal à l’aise. J’ai des amis en Espagne, en dessous de Valence. Je me suis dit qu’à mon prochain voyage pour aller les voir, j’allais voir dès mon arrivée des pancartes affichées comme dans les westerns spaghetti tournés en Andalousie. « Daniel Lauclair, Wanted », avec le prix de la rançon… Mais ils ont tellement insisté que je ne me suis pas trop rendu compte et j’ai fini par fléchir. Aujourd’hui, cela a pris des proportions que je n’imaginais pas.

Je me suis dit qu’à mon prochain voyage pour aller les voir, j’allais voir dès mon arrivée des pancartes affichées comme dans les westerns spaghetti tournés en Andalousie. « Daniel Lauclair, Wanted », avec le prix de la rançon…

Daniel Lauclair

Après coup, on vous l’a reproché au sein de la maison France Télévisions ?

Non. La preuve : allez sur YouTube et tapez « Hommage Daniel Lauclair », vous allez vous éclater. Ce document (publié au moment de sa retraite, NDLR) dure à peu près dix minutes et il dit beaucoup sur la relation que j’ai tissé avec France Télévisions. C’est extraordinaire. Je ne crois pas qu’il ait eu un plus bel hommage au sein de l’entreprise, même Henri Sannier ou Gérard Holtz n’avaient pas eu une vidéo aussi poussée. Il y a même la présidente de France Télé dedans (Delphine Ernotte, NDLR), dans un rôle de composition ! Mais pourquoi je vous raconte cela ? Parce que dedans, il y a ce passage sur Luis Enrique. Et ils ont rajouté un autre truc en faisant l’accent franco-espagnol : « Mais qui va faire ma voix à France Télévisions maintenant ? » Bref, maintenant on en rigole, mais sur le moment j’avais peur. Peur que ma direction me le reproche, que cela soit mal interprété sur les réseaux sociaux… Mais c’est passé. Et il s’est passé le contraire de ce que je craignais : je n’ai eu que des commentaires dithyrambiques. Le Petit Journal avait fait un sujet sur moi, Cyril Hanouna avait dit que c’était du cinquième degré. Il m’a dit : « Ça, c’est mon Danny la Mèche ! » Des homologues venaient me parler pour dire : « Enfin un journaliste qui a de l’esprit, de l’humour ! » D’une certaine manière, je suis un précurseur, car depuis ce moment-là, certains ont cherché à le reproduire. À France TV, mon patron Daniel Bilalian était extrêmement fier de ce que j’avais fait, car pour lui, tant qu’il y avait des journalistes comme moi, le service continuerait d’avoir beaucoup d’écoute.

Sincèrement, pensez-vous qu’une personne autre que vous aurait eu le droit d’effectuer un doublage de la sorte à France Télévisions ?

C’est une question intéressante, mais la réponse est compliquée. J’ai 50 ans de télé… On sait tout ce que j’ai pu faire, j’ai fait le clown avec Hanouna, j’ai inventé des concepts dans bien des domaines. Mais je ne peux pas répondre à cette question, car je n’ai pas vraiment de réponse. Vous savez, quelqu’un qui a de l’esprit n’est pas forcément quelqu’un avec de la notoriété. Que je sois bien vu par ma hiérarchie et que l’on apprécie Daniel Lauclair pour ses commentaires, ses questions décalées dans la boxe, l’hippisme, le foot, le tennis, la pétanque… D’une certaine manière, je suis un peu l’homme populaire à travers les disciplines que j’ai traitées en direct. Mais aujourd’hui, un humoriste qui sort des clous peut faire pschit et se faire reprendre de volée. La notoriété ne vous donne pas de garde-fous qui pourraient vous prémunir de la critique. Ce n’est pas parce que je m’appelle Daniel Lauclair qu’on va me donner des passe-droits. J’ai été formé par Zitrone et avec Michel Drucker, nous sommes les deux derniers des Mohicans issus de cette formation. Notre base, c’était le RTT : Respect, Travail, Toujours. Dans notre travail, nous avons toujours accordé une importance cruciale au respect. Même à l’antenne, je ne me permettais pas de tutoyer Jean-Paul Belmondo ou Alain Delon, même si j’étais très ami avec eux. En fait, j’ai des règles et je ne les transgresse pas. Mais cela ne m’empêche pas d’avoir du sel et de l’humour. Pour répondre à votre question, j’ai tendance à penser qu’un jeune qui a de l’esprit sera apprécié pour ça.

Quelqu’un m’a dit que Luis Enrique aimerait bien connaître l’homme qui fait sa voix française.

Daniel Lauclair

De quoi est-ce que vous vous souvenez parmi les répercussions après la diffusion de l’émission, notamment en Espagne ?

Il n’y a eu aucune mauvaise réaction. Toutes les réactions tombées à ce moment-là se sont toutes avérées positives. Les affiches « Wanted », c’était uniquement dans ma tête. Mes amis en Espagne ont été au courant, et ils ont tous adoré. Tiens, ça me fait penser au tennis. Tout le monde est nostalgique de la période de Nastase, McEnroe, Connors, Noah. C’étaient des show-men, des clowns. Et j’ai vu des choses que vous ne verrez jamais. J’ai vu Nastase avec des couettes et des bas résille… Nous avons vécu cela, le public a vécu cela. Tout le monde était mort de rire. Mais cela n’existera plus jamais. Aujourd’hui, tout est aseptisé. Je ne dis pas que c’est mal, mais dès que vous jetez votre raquette au sol, vous prenez un avertissement. Bref, c’est une autre époque, et il faut faire attention.

Maintenant que Luis Enrique est proche de s’engager avec le Paris Saint-Germain, que souhaitez-vous lui faire passer comme message ?

Des bruits sont venus jusqu’à moi. Quelqu’un m’a dit que Luis Enrique aimerait bien connaître l’homme qui fait sa voix française. Évidemment, cela m’a fait rire, mais je ne mords pas à l’hameçon comme ça. Mais je vais vous dire : vous n’êtes pas le premier à m’appeler à ce sujet. Depuis que l’on sait que Luis Enrique vient, des potes journalistes m’ont appelé. Ils m’ont dit que mon ami arrivait ! Ce serait magnifique d’organiser un face-à-face avec Luis Enrique. Je ne sais pas comment ça pourrait se faire, cela bouge beaucoup au PSG, mon ami Jean-Claude Blanc est parti dans la planète Ineos… Luis Enrique n’est pas bête, l’homme est même intelligent et il a de l’esprit. Il a gagné la Ligue des champions, la Liga, il a entraîné l’Espagne… Ce n’est pas un petit entraîneur dont nous parlons. Je ne sais pas comment il va s’en sortir, mais si le PSG cherchait un profil avec du caractère pour bien gérer les égos, le club a choisi la bonne personne.

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Propos recueillis par Antoine Donnarieix

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