ACTU MERCATO
Atlético : le mercato de la dernière chance
Après un été 2024 de toutes les folies, les Colchoneros ont de nouveau dépensé 175 millions cet été pour tenter de ranimer une flamme en sommeil depuis 2021. Entre coups stratégiques et grosses signatures, l’objectif est clair : retrouver le devant de la scène. En fin de contrat en 2027, Simeone n’a plus le droit à l’erreur. Son équipe, coincée entre un jeu pire que caricatural et un renouveau qui peine à émerger, doit enfin trouver le moyen de se réinventer et cesser d’endormir tout le monde.

Cet été, Liverpool a remporté haut la main le trophée officieux du plus gros flambeur du mercato : 308 millions d’euros partis en fumée, et l’addition pourrait encore gonfler si les rumeurs qui envoient Alexander Isak à Anfield se confirment. L’Angleterre reste, de toute façon, un autre monde quand il s’agit de signer des chèques, monopolisant les cinq premières places du classement des clubs les plus dépensiers (Liverpool, Chelsea, Manchester United, Arsenal, City). Mais juste derrière ce quinté de mastodontes, qui pointe le bout de son nez à la sixième place ? L’Atlético de Madrid d’un certain Diego Simeone, toujours prompt à rappeler qu’il a moins de revenus… mais qui, depuis deux étés, claque comme un nouveau riche.
À défaut d’avoir les moyens du Real Madrid ni du Barça, le coach argentin clame compenser par la sueur, le bloc compact et les coups de coude dans les duels. Histoire de rappeler que le cholismo n’est pas mort. Mais depuis deux ans maintenant, le club a fait voler en éclats cette vieille ritournelle : 175 millions d’euros claqués sur le marché des transferts depuis début juillet. Et avant ça, l’été 2024 avait déjà donné le ton : Julián Álvarez (75 millions d’euros), Conor Gallagher (42 millions d’euros), Alexander Sørloth (32 millions d’euros), Robin Le Normand (34 millions d’euros), plus quelques renforts pour étoffer l’effectif. Un mercato massif, présenté comme le début d’un nouveau cycle, censé rapprocher l’Atlético des géants. Résultat ? Zéro trophée, une élimination en huitièmes de finale de Ligue des champions et une troisième place en Liga, loin du Real et du Barça. Trois saisons sans titre majeur, un jeu devenu prévisible, une identité qui frôle la caricature, et un 4-4-2 de fer qui ne surprend plus personne, encore moins cette saison. Alors un an plus tard, rebelote. Club le plus dépensier d’Europe continentale, Diego Simeone – en poste depuis 2011 – utilise cette fois-ci bel et bien sa dernière cartouche.
Des recrues en veux-tu, en voilà
Parce qu’à ce niveau-là, même le Cholo ne peut plus se cacher derrière le costume d’underdog. Cet été, l’Atlético s’est offert une deuxième (petite) armada en deux ans. Moins tape-à-l’œil que la précédente, mais taillée sur mesure, pourrait-on croire. En tête d’affiche : Álex Baena, fraîchement débarqué de Villarreal contre 42 millions d’euros après une saison pleine avec le sous-marin jaune de Villarreal (7 buts, 9 passes décisives en 32 matchs). Derrière lui, Thiago Almada (ex-Botafogo et ex-OL, 21M€) et Johnny Cardoso (arrivé du Real Betis pour 24 millions) sont censés remettre d’aplomb un milieu à la rue la saison passée. David Hancko (Feyenoord, 26M€) et Matteo Ruggeri (Atalanta, 17M€) viennent bétonner l’arrière-garde, sans oublier le jeune Marc Pubill, arrivé tout droit d’Almería pour 16 millions. Courtisé un temps par le Real Madrid et le Barça, l’arrière espagnol a déjà goûté à l’Euro espoirs et traîne l’étiquette d’un des futurs talents de la Roja (oui, encore un). Capable de jouer latéral ou pivot, il s’était révélé aux yeux du grand public lors des JO 2024, en remportant la médaille d’or avec l’Espagne. Fils d’un duo de joueurs de water-polo médaillés (argent pour le père aux Jeux de Barcelone en 1992, or européen pour la mère), le jeune espagnol pourrait bien faire parler de lui cette saison.
Quand Luis Enrique avait besoin d’un joueur sur l’aile gauche, ils ont sorti 70 millions pour recruter Kvaratskhelia en janvier.
Dernière recrue en date : Giacomo Raspadori, tout juste auréolé d’un deuxième titre avec Naples. Recruté pour 22 millions d’euros, l’Italien est un attaquant capable de naviguer entre les lignes. Dans le système de Simeone, il devrait jouer les doublures de luxe d’un certain Antoine Griezmann. En clair : un effectif doublé à chaque poste, prêt à passer du 4-4-2 maison au 3-5-2 plus offensif. Sur le papier, c’est l’Atlético le plus fourni et le plus polyvalent de l’ère Simeone. Et surtout, plus d’excuses pour se réfugier derrière le « on fait avec ce qu’on a. »
La fin d’un cycle en 2027 ?
Pourtant, fin juin, après un 4-0 encaissé contre le PSG en Coupe du monde des clubs, Simeone ressortait encore le refrain : « Le PSG est une grande équipe de jeunes joueurs. Quand Luis Enrique avait besoin d’un joueur sur l’aile gauche, ils ont sorti 70 millions pour recruter Kvaratskhelia en janvier. » Traduction : on ne joue pas dans la même cour. Le problème, c’est que depuis deux ans maintenant, l’Atlético dépense comme un grand d’Europe. Le coach argentin veut des matelassiers à la fois rugueux et fluides. Plus incisifs et adaptables aux adversaires. Une équipe qui joue, et pas seulement qui subit ou pioche sur un dégagement haut. Baena et Almada doivent donner de l’air au jeu, Raspadori offrir des solutions dans les espaces réduits, et un milieu renforcé doit permettre d’enchaîner les matchs à haute intensité sans perdre la grinta maison. En bref, un Atlético qui sait faire le jeu quand il le faut.
🗣️Simeone ha hablado 💸“Cuando el PSG de Luis Enrique necesitaba a alguien en la banda izquierda, gastaron 70 millones € en enero para fichar a uno.” ⚽️"Nos ha faltado tener más la pelota, más personalidad, más paciencia." 🚩"Después de 14 años, ya no hablo de árbitros. Estoy… pic.twitter.com/QEvFHMLVXu
— Futbolia ᴬᵀᴹ (@Futbolia) June 16, 2025
Le vrai danger, c’est de claquer plus de 300 millions en deux étés. En grand amateur de cinéma, le président Enrique Cerezo ne tolérera pas un prochain navet. Les supporters, eux, réclament un titre – un vrai, pas vu depuis 2021. Parce qu’investir autant, ça doit rimer avec soulever un trophée majeur. Certes, l’année dernière, Sørloth a planté 24 buts en 50 matchs et Le Normand s’est fondu sans problème dans la structure défensive, mais Julián Álvarez et Conor Gallagher, eux, n’ont pas vraiment répondu aux attentes XXL placées sur leurs épaules.
Pour Simeone, l’enjeu est personnel. Quatorze ans à la tête de l’équipe, une statue vivante au Metropolitano. Mais même les statues finissent par se couvrir de poussière si on ne les brosse pas un peu. Les dirigeants lui ont donné les moyens qu’il réclamait à demi-mot. En retour, ils attendent un retour sur investissement immédiat. À bas le complexe d’infériorité économique et place enfin à du jeu (espérons). Si ça marche, Simeone aura prouvé qu’il peut se réinventer sans renier ses principes. Si ça échoue, il sera peut-être temps de refermer le cycle en 2027, date de la fin de contrat du coach argentin, qui reste à ce jour l’entraîneur le mieux payé d’Europe. Ce mercato n’est pas seulement ambitieux, il peut aussi être fatal.
Alavés accroche l’Atlético, mais fait un cadeau sympa à GriezmannPar Titouan Aniesa