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Thierno Barry, à pointe nommée
En difficulté depuis le début de l’Euro Espoirs, l’équipe de France peut au moins compter sur un bon point de fixation devant : Thierno Barry. Une fixation que l’attaquant de Villarreal a pourtant mis du temps à trouver dans sa jeune carrière.

L’équipe de France Espoirs a pour tradition de décevoir dans ses compétitions. Et l’édition 2025 de cet Euro disputé en Slovaquie ne manque pas à la règle. Du moins, pour l’instant. En effet, les Bleuets ont entamé leur campagne par un triste nul (0-0) face au Portugal, l’un des autres favoris, avant de poussivement battre la Géorgie (3-2) et de se rattraper contre la Pologne (4-1). De quoi sauver les meubles en ralliant les quarts de finale face au Danemark, ce dimanche (18 heures) sans trop de certitudes. Dans ce flou, heureusement, une petite éclaircie existe avec Thierno Barry. Joker du front de l’attaque français, le géant se révèle être le point de fixation idéal pour des coéquipiers parfois trop joueurs et le stabilisateur d’un secteur offensif trop tendre. Un petit aboutissement pour le jeune Barry qui se rêverait, un jour, en Erling Haaland.
De défenseur central à numéro 9
Cette mission sauvetage, Thierno Barry l’a donc entamée contre la Géorgie. Tenue en échec à deux minutes du terme et quasiment éliminée du tournoi, la France a pu compter sur le flair de son buteur remplaçant pour rester à la surface. D’abord en marquant un but refusé pour un minuscule hors-jeu, puis en offrant définitivement la victoire d’un tacle opportuniste devant la cage. Des réflexes de renard également entrevus face à la Pologne – cette fois comme titulaire – sans trouver le chemin des filets. Ces qualités de placement, Barry aurait pourtant pu ne jamais les afficher au plus haut niveau. Logique pour celui qui a n’a jamais vraiment fait du football une priorité. Né et élevé à Lyon, dans le quartier de la Part-Dieu, Thierno s’est surtout intéressé au football grâce à la dame de cantine de son école primaire. Cette dernière, le voyant se débrouiller avec un ballon dans la cour de récréation, l’a recommandé à son compagnon, entraîneur du petit club local de l’AS Montchat. L’élève a 11 ans et débute comme défenseur central. Un poste qui le suivra longtemps en raison de sa taille : 1,95m, certainement héritée de son père, ancien basketteur amateur. Le fiston a donc dû se contenter de dégager les ballons durant toute son adolescence.
🗣️ « 𝘑’𝘢𝘪 𝘤𝘳𝘶 𝘲𝘶𝘦 𝘫’𝘢𝘭𝘭𝘢𝘪𝘴 𝘱𝘭𝘦𝘶𝘳𝘦𝘳 »
Thierno Barry, buteur héroïque à la toute dernière seconde du match contre la Géorgie à l’EURO ESPOIRS, nous raconte comment il a vécu ce scénario de folie 🙌 pic.twitter.com/uBxEixTj6f
— Equipe de France ⭐⭐ (@equipedefrance) June 15, 2025
Une petite frustration, puisque l’intéressé pensait jouer les trouble-fêtes dans l’autre surface. À Saint-Priest, où il achève sa préformation entre 2016 et 2019, pas de perspective d’évolution, là non plus. Il faut alors voir ailleurs. Au sud, à Toulon. Le Sporting Club retrouve alors le National, Thierno Barry fête ses 17 ans, et la possibilité d’entamer une carrière semi-professionnelle se profile plutôt bien. Au départ, il faut cependant se contenter de la réserve, mais les résultats ne tardent pas à venir. D’autant que sur le plan tactique, il grimpe vite sur le terrain : testé en milieu récupérateur au vu de ses caractéristiques physiques, le bonhomme se débrouille, avant d’en faire de même lorsqu’on l’installe comme meneur de jeu. Au point d’être convoqué en équipe A et même d’apparaître sur la feuille de match en Coupe de France. Malheureusement, les premières galères apparaissent, avec la descente du club en N2 à l’été 2021, deux ans après sa remontée en National. Les dirigeants ne se voient alors pas proposer de contrat viable à Barry, obligé de quitter ce cocon.
Peu valorisé en France, il se révèle en Belgique
Direction Sochaux. Là encore, le Franco-Guinéen est assigné à l’équipe réserve, pensionnaire de N3, avec un contrat amateur sous le bras et un nouveau rôle d’ailier. Position étonnante pour un profil frôlant le double mètre, mais pas de quoi l’impressionner, puisqu’il termine deuxième meilleur buteur de la réserve sochalienne (10 buts en 22 matchs). Chez les pros, l’écurie doubiste vise la montée en Ligue 1, et Thierno Barry est dans les petits papiers d’Omar Daf, l’entraîneur, pour signer pro. Malheureusement, lors du mercato estival 2022, coup de froid. Sochaux décide de faire signer deux attaquants – Moussa Doumbia (de Reims) et Ibrahim Sissoko (de Niort) – et de faire confiance à deux autres jeunes, Eliezer Mayenda et Elias Filet. Pour Barry, rien, si ce n’est la proposition d’un nouveau contrat amateur. Le joueur refuse – assez logiquement – et préfère partir à l’essai à Lorient, puis Lens. La réserve lensoise est d’ailleurs séduite et lui propose de disputer un match amical. Cadeau empoisonné, puisqu’une entorse du genou stoppe net sa partie, et son aventure express à Lens.
Pas verni, Barry se montre patient et voit le vent tourner dans la foulée. Repéré dans le Nord par des recruteurs de Beveren, en deuxième division belge, l’attaquant bénéficie de cette proximité géographique pour enfin saisir sa chance. Le contrat pro est dans la poche, la saison 2022-2023 aussi. Il termine la campagne avec 20 buts en 33 matchs toutes compétitions confondues, un statut de meilleur buteur du championnat et file directement à Bâle. Saison 2023-2024, même topo : 41 apparitions, 20 pions et un nouveau transfert. Cette fois, c’est Villarreal qui pose 14 millions d’euros pour l’enrôler. Révélation en Liga – 11 buts – Barry parvient à séduire au-delà des statistiques. En témoigne sa prestation face au Real Madrid, à Santiago-Bernabéu, en octobre dernier, dont Andriy Lunin, sollicité à maintes reprises, se souviendra longtemps. Des coups d’éclat que l’admirateur de Haaland étale donc également depuis le début de cet Euro Espoirs, afin de garder debout des Bleuets chancelants. À lui de continuer face au poil à gratter danois ce dimanche.
Par Adel Bentaha