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Mikel Gogorza : « J’ai fait les Fêtes de Bayonne quand j’étais plus jeune »
À 19 ans, Mikel Gogorza s’amuse sur les terrains danois et découvre la Coupe d’Europe avec le FC Midtjylland. Celui qui est aussi français par son père possède de forts liens avec le Pays basque, sa terre d’origine. Interview entre foulards rouges et dribbles percutants.
Un mercredi soir dans la banlieue de Rome. À la veille d’un choc européen au Stadio Olimpico contre l’AS Roma de Gasperini fin novembre, le FC Midtjylland séjourne dans un hôtel multiplement étoilé, perdu au milieu d’une forêt. À la réception, un jeune homme aux cheveux châtains en bataille reçoit, la mine fatiguée après plusieurs heures d’avion depuis le Danemark. Depuis près d’un an et demi, Mikel Gogorza, basque français par son père et danois par sa mère, illumine les prés du royaume et s’est même offert le luxe d’exposer son talent aux yeux de l’Europe entière avec un but et une passe décisive lors de la rencontre face au Celtic. Issu d’une famille où Maradona était roi, c’est pourtant en admirant les dribbles et les courses du Parisien Kvaratskhelia qu’il dit arriver à progresser. Interview croisée entre football nordique, tactique et Pays basque.
Comment présenterais-tu Mikel Gogorza?
Je suis juste un gars de 19 ans, danois, qui joue au football. (Rires.) Toute ma vie se résume à jouer au football. C’est ma grande passion : dans ma famille, j’ai deux grands frères avec lesquels je jouais. Je l’avoue, je n’ai jamais vraiment essayé autre chose que cela : c’est ce qui m’est venu en premier dès mon plus jeune âge. J’ai commencé quand j’avais 3 ans et demi ! C’est mon père qui m’a mis dedans. À la maison, je voyais mes deux grands frères jouer et je me disais que je souhaitais faire la même chose qu’eux. Nous sommes une grande famille de football : ma mère regarde du football, mon père aussi… C’était juste normal !
Quel type de joueur es-tu ?
Je suis un ailier gauche explosif qui essaie de rendre son équipe meilleure. Je le fais en attaquant, en dribblant, en essayant de passer mes un-contre-un, et je pense être le petit truc en plus dont a besoin une équipe.
L’Athletic Club, c’est l’équipe d’une vie. J’ai joué toute ma vie avec les maillots du club.
Quelle était ton idole de jeunesse et quelle était ton équipe favorite ?
Je supporte l’Athletic depuis tout petit, car je suis basque. C’est l’équipe d’une vie. Je suis allé tellement de fois au Pays basque avec mon père. Nous avons vu de très nombreux matchs à San Mamés. J’ai joué toute ma vie avec les maillots du club, parfois même leurs survêtements. Ce sera toujours mon club. Je regarde toujours les matchs. Porter le maillot de l’Athletic Club a toujours été mon plus grand rêve, mais pour l’instant, ce n’est pas possible. Actuellement, je suis concentré sur Midtjylland et la Ligue Europa sans penser à autre chose. Sinon, mon père est aussi un grand fan de Maradona, alors je suis le genre de gars à avoir d’énormes posters de lui dans ma chambre. Il est l’idole de toute la famille. Quand j’étais petit, je regardais tout le temps des vidéos sur Youtube avec mon père. Ses matchs, ses sorties, ça me fascinait…
Quelle est ta routine de joueur ? De quoi as-tu besoin pour te mettre dans un match ?
Je vis à 25 minutes du centre d’entraînement. Je me réveille le matin et les deux gars avec qui je vis me font le petit-déjeuner. Je me rends ensuite au club : on a toujours une réunion d’équipe le matin à 9h30. Ensuite, on part à la gym, à l’entraînement, la douche… et je rentre chez moi jouer avec des amis. Quand on joue à l’extérieur, il y a tout le faste des déplacements européens : on est logés dans des hôtels vraiment classes et c’est très cool. On se lève, on prend le petit-déjeuner et on part découvrir la ville à pied pour préparer nos corps. Ensuite, interdiction de sortir de sa chambre jusqu’au départ pour le stade. C’est plutôt strict, mais j’aime bien. (Il sourit.)
Comment nous présenterais-tu Midtjylland ? Pourquoi avoir choisi ce club après avoir passé une partie de ta formation à Copenhague ?
Midtjylland est un club où la force physique est très importante. Dans le football français, vous ne voyez pas vraiment autant de joueurs aussi sculptés et endurants. Bien sûr, cela entraîne un sacrifice sur le contrôle de la balle, mais notre jeu physique nous permet vraiment de marquer beaucoup de buts. C’est aussi un club qui mise beaucoup sur sa formation, je crois en être la preuve ! C’est l’inverse de Copenhague, qui a beaucoup moins cette fibre formatrice. Quand Midtjylland m’a contacté et parlé de leur projet, je n’ai même pas hésité une seule seconde.

Tu nous as parlé de ta passion pour l’Athletic Club, mais as-tu eu une équipe danoise favorite ?
Évidemment ! Quand j’étais petit, je jouais pour Copenhague et j’en étais un suiveur, comme beaucoup de gamins au pays. Malgré le fait que j’ai considéré très tôt que je ne supportais que l’Athletic Club, j’aimais suivre leurs résultats. Mais bien sûr, maintenant je joue pour Midtjylland et je suis un grand fan du club. (Rires.)
Tu joues ailier gauche alors que tu es droitier. Cette caractéristique de faux pied, c’est une force pour toi ?
J’adore repiquer sur le terrain et marquer des buts ! Avec mon père, on a souvent cherché à entraîner mon pied gauche. Il me disait : « Mikel, tu dois utiliser ton pied gauche ! » Donc je ne crois pas que jouer à droite, avec cette facilité des deux pieds, soit un avantage. Quand je suis sur mon pied gauche, je suis capable de tirer, donc c’est plus naturel d’évoluer à gauche.
En Europe, c’est là que tu peux comprendre à quel point tu es bon ou non.
Qu’est-ce que la Coupe d’Europe apporte pour un jeune joueur comme toi ? Quels sont tes objectifs avec Midtjylland dans cette compétition ?
Au Danemark, mis à part Copenhague, nous sommes les favoris. Quand on arrive dans un stade, c’est nous que l’on attend. En Europe, c’est différent. Tu es moins attendu et tu peux te mesurer à de meilleures équipes. C’est là que tu peux comprendre à quel point tu es bon ou non. Nous sommes vraiment bons cette saison et nous avons de grandes ambitions.
Quels sont tes liens avec la France ?
J’ai le passeport français grâce à mon père, mais je suis basque. Donc tout cela est assez bizarre. (Il sourit.) J’ai toujours eu énormément de liens avec le Pays basque. Mon père et toute sa famille sont d’ici, et je suis tellement fier d’être basque ! Nous y allions souvent quand nous avions des vacances. C’est une super combinaison d’être basco-danois !
As-tu suivi la rencontre entre le Pays basque et la Palestine il y a deux semaines ?
Oui, c’est trop cool qu’ils aient fait cela. J’étais censé jouer, mais j’avais une gêne musculaire à la jambe droite et j’étais aussi appelé en sélection danoise U21, alors c’était particulier. Mais je pense que la prochaine fois, je pourrai y aller et évoluer avec l’Euskal selekzioa.
Tu suis un peu la Ligue 1 ?
Évidemment, avec mon père ! Il y a tant de bons joueurs et de bonnes équipes en France ! J’adore Kvaratskhelia ! Il me ressemble pas mal. J’apprends beaucoup en le regardant. C’est un énorme travailleur qui a dû beaucoup plancher sur son pied gauche, donc c’est vraiment le bon joueur à analyser pour moi.
Ton père t’a-t-il transmis de la culture française ?
Surtout de la culture basque ! Il ne se considère pas comme français, et personne dans ma famille ne se ressent français également. Il nous a toujours montré le Pays basque et l’endroit où vivent mes grands-parents, au sommet de leur montagne. Il a essayé d’apporter à ses enfants le maximum qu’il pouvait, mais il y a beaucoup de choses qui sont compliquées comme la langue. D’un autre côté, il a toujours adoré vivre au Danemark, donc il a cherché à trouver un équilibre avec ma mère.
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As-tu eu l’occasion de visiter des villes en France ou dans le Pays basque français ?
Oui, j’ai visité des villes dans le Pays basque français, notamment Bayonne et tout ce qui entoure cette ville. J’ai pu faire à plusieurs reprises les Fêtes de Bayonne quand j’étais plus jeune. Mais aujourd’hui, avec le football et depuis que je suis international avec les équipes jeunes du Danemark, je n’ai plus l’occasion de m’y rendre l’été. J’espère retourner au Pays basque dès que j’en aurai l’occasion.
Concrètement, qu’est-ce que ton père t’a transmis de la culture basque ?
Tout simplement : faire toujours du mieux que l’on puisse. On a un super tempérament, la culture basque est très particulière, on vit les choses à 100% : on peut être en colère de quelque chose et tout de suite après être très heureux de l’avoir réussie. L’important est de toujours travailler et d’essayer de faire de notre mieux. Je suis également très attaché à la nourriture basque, notamment la tortilla ! À la maison, ma mère nous fait beaucoup à manger et cuisine des aliments traditionnels basques.
Je n’ai jamais pensé à l’équipe de France.
Quelles sont tes ambitions internationales ?
Jouer et représenter mon pays est quelque chose de très important pour moi. J’y ai toujours vécu. Je pense que je suis proche de l’équipe nationale. J’ai pour objectif de disputer les plus grandes compétitions internationales. C’est ce que l’on peut faire de plus gros dans le football. Je veux jouer la Coupe du monde et l’Euro. Représenter le Danemark dans ce genre de compétitions est vraiment l’une de mes principales ambitions.
Comment as-tu vécu la performance des Rouge et Blanc en demi-finales de l’Euro 2021 alors que tu n’étais qu’un jeune adolescent ?
C’était totalement fou. Ce sont de beaux souvenirs. Les rues, partout dans le pays, étaient en fête, tout le monde suivait la compétition dehors devant des écrans géants. Je me souviens d’avoir regardé la demi-finale contre l’Angleterre au premier rang de l’écran géant à côté de chez moi. C’était vraiment quelque chose d’exceptionnel pour tout le peuple danois, car on est un tout petit pays. Cela me donne vraiment envie de faire partie de l’équipe A un jour.
On te sent vraiment très attaché au Danemark. Mais avec ta double nationalité, tu peux prétendre à l’équipe de France. C’est dans un coin de ta tête ?
Non, je n’ai jamais pensé à l’équipe de France. Juste au Danemark. Je ne me considère pas comme français, mais comme basque. Certaines personnes disent des Basques qu’ils sont français ou espagnols, mais nous savons ce que nous sommes. Je n’ai aucune connexion avec la France, je ne parle pas la langue.
Où est-ce que tu te vois d’ici 20 ans, au lendemain de ta carrière ?
(Il rit aux éclats.) C’est vraiment très compliqué de me projeter au lendemain de ma carrière, à seulement 19 ans. J’espère que j’aurai dans mes bagages une grande carrière de footballeur. Je veux pouvoir regarder en arrière et me dire que j’ai donné le meilleur de moi-même. J’espère aussi avoir gagné un maximum de trophées et montré mon talent. Vingt ans, c’est une très longue période, je n’ai même pas encore atteint la vingtaine, donc je pourrais faire des millions de choses, mais je suis focus sur ce qui arrive face à moi. On a tellement de matchs à jouer maintenant…
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