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  • Disparition de Denis Law

Denis Law, Ballon et mec en or

Par Chérif Ghemmour
7 minutes

Disparu ce vendredi 17 janvier à l’âge de 84 ans, Denis Law luttait depuis des années contre la maladie d’Alzheimer. Le Ballon d’or 1964 écossais fit les beaux jours du grand Manchester United des sixties et laisse le souvenir d’un très chic type à ceux qui sont encore là.

Denis Law, Ballon et mec en or

Plein soleil sur Old Trafford, nuit noire sur United… Ce samedi 27 avril 1974, lors de la dernière journée de championnat d’Angleterre, les Red Devils sont en route vers la D2. En face, l’Écossais Denis Law, qui a quitté Manchester United en début de saison 1973-1974, joue pour Manchester City. À l’époque, le derby mancunien n’est pas si fratricide, avec des mouvements de joueurs assez fréquents au passé et au présent entre les deux clubs. Denis Law a même commencé en D1 anglaise à City, de 1959 à 1961. Deux saisons avant de s’exiler pour le Torino et débarquer un an plus tard à United… Ce 27 avril, « Lawman » (« le Justicier », son surnom de buteur prolifique à United) se sent pris dans un dilemme malaisant : « Je ne voulais pas aller à Old Trafford et y gagner le match particulièrement, racontait-il dans Planet FootballPareillement, je ne voulais pas m’y rendre pour y perdre. Le déroulement de la partie me convenait très bien : toujours 0-0 à dix minutes de la fin. » Soixante secondes plus tard, sur une passe de son coéquipier Francis Lee, Law expédie d’une talonnade bien troussée le ballon dans les buts de Stepney : 1-0 final ! « C’était horrible », confessa le buteur écossais. Baissant tristement la tête, inconsolable au milieu de ses partenaires venus le féliciter, il reste silencieux, accablé.

En Angleterre, on raconte qu’il fut sans doute le tout premier grand joueur à ne pas célébrer un but face à son ancienne équipe. Un mythe tenace le tenant pour le bourreau de son ex-club, bel et bien relégué après cette défaite, aura la vie dure. Tout faux ! Les autres résultats de cette dernière journée condamnaient United, qui avait finalement terminé avant-dernier. Les supporters de Manchester United n’en tinrent jamais rigueur à Denis Law, héros éternel, membre de la Sainte-Trinité mancunienne lauréate du Ballon d’or. C’est l’Écossais qui avait ouvert le bal en 1964, avant que Bobby Charlton ne le décroche à son tour en 1966, puis George Best en 1968. Les trois sont statufiés ensemble aux abords d’Old Trafford. C’est en ce triste printemps 1974 que Law mit fin à sa carrière professionnelle en club à 34 ans, juste avant de se rendre en juin avec la sélection écossaise en Allemagne pour la Coupe du monde. Malgré son immense talent, Denis Law, qui avait failli disputer un premier Mondial à 18 ans, en Suède 1958, ne conjura pas en 1974 la malédiction de l’élimination au premier tour qui accable l’Écosse depuis toujours en Coupe du monde…

Denis Law (gauche) et Bobby Charlton (droite), deux cracks à suivre de très près.
Denis Law (gauche) et Bobby Charlton (droite), deux cracks à suivre de très près.

Vrai Ballon d’or !

La célébrité très singulière de Denis Law a justement surgi en 1964 lorsqu’il remporta donc le Ballon d’or France Football. Premier Écossais au palmarès, son couronnement surprit du fait que son second, l’Espagnol Luis Suárez (déjà vainqueur en 1960), avait gagné en 1964 la C1 avec l’Inter et l’Euro avec l’Espagne. Oui, mais… Véritable buteur compulsif, au point d’être surnommé plus tard « Dennis Law United », le striker blond avait claqué 46 buts toutes compètes confondues cette saison, propulsant MU en second du championnat anglais derrière Liverpool ! L’année précédente, Denis s’était distingué en marquant le premier but en finale de FA Cup face à Leicester City (3-0). À l’international, il avait contribué à faire triompher l’Écosse au prestigieux Tournoi britannique (le fameux British Home Championship annuel, avec Angleterre, Galles, Irlande du Nord et Écosse), un succès ponctué par une victoire 2-1 à Wembley face aux Three Lions. C’est de ce jour que le jeune Rod Steward, apprenti rock star et apprenti footballeur, avait fait de Denis Law (et Jim Baxter) ses deux héros à vie de l’équipe d’Écosse. Encore plus marquant, le 23 octobre 1963 lors d’un match de gala FIFA à Wembley, Angleterre contre le reste du monde (2-1), Denis avait été sélectionné dans l’équipe mondiale aux côtés d’Eusébio et Di Stéfano.

Aux yeux de certains arbitres, j’étais une cible !

Denis Law

C’est même lui qui avait marqué pour les Bleus face aux Blancs. Au moment de remporter le Ballon d’or 1964, il n’était donc pas le parfait inconnu distingué par hasard. L’attaquant complet (1,75m, taille appréciable à l’époque) incarnait la « force celte », tous ces joueurs supplétifs des clubs anglais venus d’Écosse, de Galles et d’Irlande et qui leur ont sans cesse apporté un supplément d’âme (fighting spirit) et de technicité. Jamais avare de compliments, le Roi Pelé déclara au sujet de Denis Law, dans les années 1960, qu’il aurait été l’un des rares Européens dignes de figurer en Seleção… D’un naturel facétieux, voire blagueur, Lawman avait aussi une personnalité bien affirmée, souvent en proie aux bisbilles avec le corps arbitral. Une altercation verbale avec l’arbitre Gilbert Pullin fin 1962 lui valut une réputation de mouton noir en Angleterre : « Aux yeux de certains arbitres, j’étais une cible ! commenta-t-il plus tard. Cet incident avec Pullin a sans doute été à l’origine des punitions incroyablement lourdes reçues plus tard dans ma carrière. » Pas grave ! Du caractère, il en fallait pour pouvoir jouer dans le grand Manchester United drivé par le légendaire Matt Busby, le coach de MU qui l’avait fait venir du Torino au printemps 1962.

Sir Denis Law, gentleman footballeur

La rage de réussir, Denis l’avait certainement puisée dans une enfance très pauvre, cadet d’une famille de sept mômes dont le père, pêcheur d’Aberdeen, s’esquintait à nourrir la maisonnée. Atteint d’un strabisme qui le fit jouer au foot avec des lunettes, le mordu de ballon, pas si maladroit, eut la chance d’être engagé en 1955, à 15 ans, comme aspirant pro au grand club anglais de Huddersfield, alors en D2. Une opération correctrice des yeux le décomplexera à jamais. Après quatre années d’apprentissage et une première sélection écossaise en 1959, c’est le grand saut à Manchester City (tiens, tiens) en 1960 ! Mais après deux saisons, Law l’ambitieux veut aller voir ailleurs. Ce sera au Torino, en Italie, en joueur britannique parmi les précurseurs à évoluer dans le Calcio, que son transfert battra le record pour un British player (110 000 livres). Mais au bout d’une saison de catenaccio et de rares ballons à négocier (1961-1962), c’est donc Matt Busby qui le rapatriera en Albion. Symbole du United post-Busby Babes (décimés lors de la catastrophe aérienne de Munich en 1958), Denis Law sera l’un des héros des années de gloire, vainqueur de la FA Cup 1963 et du titre de champion d’Angleterre 1965 et 1967.

Denis Law et Sir Alex Ferguson.
Denis Law et Sir Alex Ferguson.

Déjà atteint de problèmes au genou, il zappera, hélas, la finale victorieuse de « Ligue des champions » 1968 (Coupe des clubs champions) qu’il regardera toutefois dans l’allégresse, à la télévision… En mai 1969, à Amsterdam, un couple d’admirateurs du nom de Bergkamp baptisèrent leur fils du prénom « Dennis » (mais avec deux N), en l’honneur du crack écossais. Les blessures se faisant plus insistantes, il vivra le lent déclin d’une équipe de MU vieillissante et partie en vrille après les départs de Sir Matt Busby en 1969, puis fin 1971. Après sa retraite définitive à l’été 1974 avec City rejoint sans conviction en 1973, Dennis Law entama une reconversion de consultant TV très apprécié sur diverses chaînes. Sa fille Diana fut même salariée au service de presse de MU. Avant d’être progressivement bouffé par Alzheimer, il se consacra aussi à des œuvres caritatives. Anobli tout comme Bobby Charlton, ils traînaient à Old Trafford des allures de gentlemen « anglais » avec une classe propre aux héros du peuple « d’en bas ». Plus sympa et plus abordable que le grand Bob, il a accompagné vers la fin de vie tous ses anciens coéquipiers de United, allant jusqu’à veiller George Best sur son lit de mort à l’hôpital. Et puis le « King » (son surnom) s’en est allé à son tour. Rod Steward, avec qui il avait passé des moments foot & rock mémorables, est inconsolable. Le Roi est mort. Vive le roi…

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