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Strasbourg : Julien Stéphan, la fin de l’aventure alsacienne

Par Clément Gavard
5 minutes
Strasbourg : Julien Stéphan, la fin de l’aventure alsacienne

Strasbourg a annoncé ce lundi la mise à pied de Julien Stéphan, victime de très mauvais résultats cette saison (1 victoire en 18 matchs) après un premier exercice pourtant réussi. À 42 ans, le jeune entraîneur continue d'apprendre le métier.

L’histoire entre Strasbourg et Julien Stéphan avait débuté par une défaite à la Meinau contre Angers, un après-midi d’août 2021, et s’est donc terminée face au même adversaire, dans le même jardin et par une élimination de la Coupe de France au bout d’une séance de tirs au but perdue par les Alsaciens (0-0, 4-5 TAB). Ce lundi midi, le Racing a annoncé la décision du président Marc Keller de mettre à pied l’entraîneur, alors que l’intérim sera assuré par Mathieu Le Scornet, son bras droit. Le technicien paie les mauvais résultats et la spirale infernale dans laquelle son équipe s’est embourbée cette saison. « Le seul remède, c’est la victoire », insistait-il vendredi soir. Une victoire qu’il n’aura connue qu’une fois en dix-huit rencontres disputées avec Strasbourg en 2022-2023 (3-2 à Angers – encore -, le 9 octobre).

En novembre, Stéphan était déjà sous la menace et il se murmurait que le but égalisateur de Habib Diallo à la 87e du match contre Lorient avant la trêve de la Coupe du monde l’avait sauvé. « Je ne sais pas si on peut être le problème quand on était la solution trois mois plus tôt, avait-il soufflé à l’époque. J’avais bien conscience dès le départ qu’on allait vivre une année beaucoup plus difficile. Aussi difficile, avec autant de différences de performances à certains postes, pas forcément… Mais ça fait partie de la vie d’un entraîneur. » À 42 ans, le jeune coach, qui avait lui-même rendu son tablier à Rennes en mars 2021, est poussé vers la sortie pour la première fois de sa carrière. C’est aussi le métier qui rentre, d’une certaine façon.

 Je ne sais pas si on peut être le problème quand on était la solution trois mois plus tôt.

La montagne russe

Les trois défaites subies (Paris, Troyes, Angers) depuis le retour du championnat sont un bon résumé de la saison strasbourgeoise : il manque souvent peu de choses pour voir le vent tourner dans le sens alsacien, mais il en manque aussi beaucoup pour retrouver le Racing version 2021-2022. Après un premier exercice remarquable, le meilleur de l’histoire de Strasbourg dans l’élite en matière de points (63), avec une sixième place et une attaque explosive (60 réalisations), Stéphan et son staff n’ont jamais réussi à trouver les solutions pour relancer une équipe et des joueurs en perdition. Ludovic Ajorque est toujours aussi silencieux (1 but) et le récent passage à quatre derrière n’a pas permis à une défense très fragile de retrouver un minimum de solidité. C’est toute la difficulté de durer sur un même banc et faire vivre un modèle de jeu basé sur l’intensité au-delà d’une saison. En Bretagne, les derniers mois de l’entraîneur vainqueur de la Coupe de France 2019 avaient été pénibles, sa formation s’étant enfermée dans un jeu de possession stérile. Ce sera le défi de Le Scornet, adjoint de Stéphan depuis ses débuts à Rennes, où il a lui aussi fait ses gammes à la formation pendant de longues années, d’activer les bons leviers pour relancer la machine alsacienne.

 Dans ce métier, on arrive à maturité très, très tard. Je ne sais même pas si on arrive à maturité complète. On verra dans dix ou quinze ans si j’y suis encore.

L’apprentissage permanent du métier d’entraîneur

Pour Julien Stéphan, c’est la fin d’une aventure et le début d’une nouvelle coupure, durant laquelle la sensation de repos peut rapidement être éclipsée par le sentiment de vide et le manque de l’adrénaline de la compétition. Après Rennes, où il était monté très haut très vite, avant une situation d’échec vécue comme « une cicatrice qui a beaucoup saigné », le Breton avait pris le temps de réfléchir sur le métier. Ces derniers mois, il avait trouvé la bonne personne, une spécialiste, pour « vider son sac » après avoir longtemps cherché. « Il y a des moments où on est dans le dur, il faut les cacher, les masquer, confiait-il au podcast L’Enfer du banc de L’Équipe. Je m’octroie maintenant des moments où je m’isole car c’est indispensable, mais on a besoin de l’aide de quelqu’un de compétent. Dans notre métier, il faut qu’on se fasse accompagner. » Au-delà de cette quête personnelle, l’homme obsédé par le contrôle (l’école Didier Deschamps) s’est fait un nom dans le football français. Il n’est pas le premier à prendre la porte, il ne sera pas le dernier, ils sont même déjà neuf cette saison en Ligue 1. Son mariage avec Strasbourg et Marc Keller à la fin du printemps 2021 pouvait ressembler à une baisse de standing, mais c’était surtout une opportunité à saisir.

Dix-huit mois plus tard, le public de la Meinau n’avait jamais vraiment réclamé sa tête, et l’annonce de sa mise a pied inéluctable au vu des résultats a davantage provoqué de la tristesse que du soulagement chez les supporters strasbourgeois. Cela ne fait pas tout, mais ce n’est pas rien pour un entraîneur, dont la triste saison n’a peut-être pas abîmé sa récente légitimité. Parfois considéré comme arrogant dans le milieu, notamment à ses débuts, il s’est fait plus discret dans le Rhin. Chaque prise de parole dans les médias se présentait pourtant comme une belle occasion de philosopher sur son job : « Dans ce métier, on arrive à maturité très, très tard. Je ne sais même pas si on arrive à maturité complète. On verra dans dix ou quinze ans si j’y suis encore, on en reparlera. Je veux continuer à développer ma curiosité sur le jeu. L’obsession qu’on doit avoir, c’est de créer du jeu, du spectacle et des occasions de but pour marquer. » Ce qu’il n’a pas réussi à proposer cette saison, ou très peu, laissant son équipe glisser dans la zone rouge (19e). À Strasbourg, Stéphan ne cachait pas qu’il avait toujours du mal à trouver le sommeil après les matchs. « Les nuits sont de plus en plus courtes », disait-il. Les prochaines seront peut-être un peu plus longues.

Dans cet article :
Strasbourg et Reims n’offrent aucun but à la Meinau
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