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René la taupe
Ce qui devait arriver arriva, René Girard n'est plus l'entraîneur du FC Nantes. Un divorce logique après des semaines de résultats pourris, qui sanctionne un coach qui a trop fermé les yeux sur la situation de son équipe, et une nouvelle preuve qu'il est quasiment impossible de travailler avec le président Kita.
En se couchant hier soir, François Hollande a certainement laissé tourner les pensées dans son cerveau présidentiel. Le renoncement, l’aveu d’échec, la sortie digne, les six mois qu’il lui reste pour diriger son pays. Mais au-delà de ces questions très terre à terre, le président avait en tête sa place dans l’histoire. Le seul sujet qui l’intéresse réellement, et auquel il dédiait presque tous ses efforts, avec en point d’orgue son allocution inattendue d’hier soir. Dix minutes pour une décision inédite, qui ont totalement bouffé le reste de l’actualité, à commencer par la sortie un peu moins digne d’un autre homme en manque de résultats, René Girard. Et si l’ancien adjoint de Roger Lemerre s’est amusé à s’interroger sur la place qu’il laissera dans l’histoire nantaise hier soir sous sa couette, la séance d’introspection n’a pas dû l’empêcher de dormir bien longtemps. Aussi évidente que cruelle, la réponse saute aux yeux : René Girard a été une erreur de casting qui a duré six mois, dont le passage à la Beaujoire a été pourri par Waldemar Kita, mais surtout par lui-même. Car tout mettre sur le dos d’un président bourru avec qui plus personne n’arrive à bosser depuis des années est trop facile. À force d’autosatisfaction, de jeu triste à pleurer et de déclarations à l’emporte-pièce, René Girard a solidement gravé sa pierre tombale sans avoir besoin de personne. Et malgré sa part de responsabilité, Kita campe toujours le rôle de celui qui a le flingue chargé, et qui dit à l’autre : « Toi, tu creuses. »
Un club à part malgré tout
Depuis quinze ans et le titre fantastique de 2001, le FC Nantes n’a rien gagné, a embrassé la Ligue 2, s’est abonné au bas de tableau, et est devenu un club quelconque. Oui, mais les Canaris refusent de se considérer comme tel. Après tant de temps passé à être la plus belle fille de la soirée, le FC Nantes tient à ce qu’on le traite comme un club à part. Une de ces équipes au cachet unique, dont le nom a une résonance particulière dans l’imaginaire populaire. Les Nantais ont passé trop d’années à se farcir des personnalités qui ont abîmé leur blason, et ne voulaient plus d’un coach sans ambition et sans projet de jeu. Manque de bol, René Girard en était la parfaite incarnation. Un de ces entraîneurs typiquement français vus et revus, dont le dernier fait d’armes était d’avoir mené la barque lilloise, et qui se reposait sur l’exploit du titre avec Montpellier en 2012 pour bâtir sa légitimité. À l’aube de la 16e journée, Nantes est 19e avec la pire attaque du championnat. « Il faudra peut-être réviser les ambitions fixées » , prévenait Girard début septembre, en affirmant que Nantes devait viser la 15e place. Trois semaines plus tard, Kita appelait Rolland Courbis pour qu’il remplace Girard. Sans suite, même si l’agacement de Girard l’avait poussé à répondre un peu avenant « Téléphone à ta grand-mère » à un journaliste qui le questionnait sur le sujet. Malgré tout, Girard restait soutenu par son vestiaire et préservé par le public, qui préfère lyncher Kita. Un Kita dont les relations avec Girard étaient devenues tendues, et qui a répliqué en nommant provisoirement Philippe Mao – coach de la réserve – à la tête de l’équipe. Introniser Mao, une réaction logique pour un homme né en 1954 en pleine Pologne communiste.
Par Alexandre Doskov