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Albert Riera, le globe-moqueur

Par Quentin Fredon et Clément Gavard

Depuis son arrivée sur le banc de Bordeaux en octobre, Albert Riera s'illustre par ses sorties médiatiques remarquées et ses bisbilles avec quelques homologues français du championnat de Ligue 2. Au-delà du personnage déroutant et parfois agaçant, il y a un entraîneur sous influence espagnole et guidé par une certaine ouverture au monde.

Albert Riera, le globe-moqueur

Il n’est là que depuis cinq mois, mais il s’est déjà imposé à sa manière comme un personnage incontournable de la Ligue 2. Il y avait Albert Riera le joueur, plutôt élégant et passé par Bordeaux, Liverpool ou encore l’Espanyol Barcelone ; il y a maintenant l’entraîneur, dont la communication fait des étincelles dans l’antichambre du football français. Au point que l’UNECATEF, le syndicat des coachs en France, a dû siffler la fin de la récré entre le technicien espagnol, nommé sur le banc des Girondins le 12 octobre, et son prédécesseur David Guion. « Le respect de ses collègues devrait être la règle d’or de notre métier », pouvait-on lire dans le communiqué. Seulement, Riera n’est pas du genre à dire ce qu’il ne pense pas.

Clashs en stock

Celui qui est désormais l’entraîneur de Troyes avait dit ne jamais avoir vu quelqu’un d’« aussi irrespectueux de ses collègues » après que Riera a ouvertement lancé qu’il ne pouvait « pas apprécier ce qu’il y avait avant », c’est-à-dire le travail effectué par Guion et son staff au Haillan. La suite s’est passée sur Instagram, où l’Espagnol en a remis une couche  Un menteur est attrapé plus tôt qu’un boiteux…»), renforçant un peu plus sa réputation de machine à punchlines de la L2. Il n’y a pas de langue de bois quand Riera se présente devant la presse. Il peut lâcher « on n’est pas Valenciennes, on a la qualité pour faire plus de quatre passes d’affilée » après un succès contre VA, ou encore assurer connaître 25 systèmes de jeu différents pour son équipe.

On peut se chamailler, ça fait partie du cirque, mais à partir du moment où on attaque ma personne après un licenciement sans rien connaître… Ce mec ne vaut rien à mes yeux.

Régis Brouard

Au sortir d’une victoire bastiaise contre les Girondins, Régis Brouard avait sauté sur l’occasion pour chambrer l’ancien milieu. Ce dernier n’avait pas manqué de s’en souvenir au moment de sa mise à l’écart par le club corse fin janvier. « Lorsque je suis arrivé, j’ai dit que j’avais 23 ou 25 systèmes de jeu, avait-il rappelé sur son terrain préféré. Mais quelqu’un a dit : “Il suffit d’avoir un système !” Ce quelqu’un qui a dit cette phrase n’est plus entraîneur aujourd’hui. » Une sortie rare et surprenante, loin du corporatisme qui peut parfois exister entre les coachs. Brouard n’a pas répondu, mais il a ruminé. « On peut se chamailler, ça fait partie du cirque, mais à partir du moment où on attaque ma personne après un licenciement sans rien connaître… Ce mec ne vaut rien à mes yeux, répond-il. J’ai compris qui était la personne. »

Académie en Sibérie et tiki-taka

Qui est Albert Riera, justement ? Au-delà des souvenirs plus ou moins lointains du joueur qu’il était, ses premiers mois dans le costume d’entraîneur dans l’Hexagone ont permis de découvrir sa personnalité et ses idées. Sa première carrière témoigne d’une certaine ouverture d’esprit. Après avoir quitté son île natale, Majorque, à 20 ans, il est passé par la France, l’Angleterre, la Grèce, la Turquie, l’Italie et la Slovénie. « Celui qui doit s’adapter, c’est toi, disait-il en 2020 au Diario de Mallorca. Pour moi, ça a été facile. Ça m’a aidé de partir de Majorque, d’arriver à Bordeaux et apprendre la langue. » Riera ne se met aucune barrière et traverse les frontières sans trop hésiter. C’est ce qu’il a fait entre ses deux vies en s’installant en Sibérie – sa femme est russe et originaire d’Omsk, lui parle la langue – où il a inauguré une académie de foot portant son nom en octobre 2018. « J’ai créé cette académie parce qu’ils me l’ont proposé, développait-il dans le Diario de Mallorca. Ils aiment beaucoup le foot espagnol, la possession, le tiki-taka, ça a beaucoup de succès. »

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Il s’y est impliqué au-delà de son simple patronyme, en participant à des séances durant les premiers mois ou en expliquant aux footballeurs en herbe (ou plutôt en steppe) comment bien se déplacer sur le terrain. Son credo est d’ailleurs le suivant : « La technique et le talent sont importants, mais si vous ne savez pas comment bouger et vous positionner, ce sera difficile d’y arriver. » Une certaine idée de la philosophie de celui qui aime la cuisine russe, le ski et qui estime que la température idéale à Omsk est -15 degrés. « C’est comme zéro degré en Espagne, on s’y habitue », dit-il.

La technique et le talent sont importants, mais si vous ne savez pas comment bouger et vous positionner, ce sera difficile d’y arriver.

Albert Riera

Le globe-trotter reste sous influence espagnole, surtout quand il s’agit de foot. Il a cumulé 16 capes (pour 4 buts) entre 2007 et 2009, assistant de près à la naissance de la grande Espagne et d’un football qui sera érigé comme modèle absolu dans les années 2010. « On aime gagner à la 90e dans un match où on n’a pas été bon, mais vous ne voulez pas gagner tous les matchs comme ça, déroule Riera. Ce que vous voulez, c’est bien jouer, prendre du plaisir. »

Des vacances avec Guardiola à l’apprentissage entre la Slovénie et Bordeaux

S’il n’est pas copain avec David Guion ou Régis Brouard, il l’est avec Xabi Alonso ou Xavi, deux hommes avec lesquels il a passé son diplôme d’entraîneur, durant lequel il a notamment réalisé un stage à Manchester City aux côtés de Pep Guardiola et Mikel Arteta. Il est même parti en vacances plusieurs fois avec le boss des Citizens. Riera connaît du beau monde, aime parler de foot et dit avoir été marqué par certains de ses entraîneurs : Rafa Benítez, Ernesto Valverde et surtout Luis Aragonés. Il n’a pas utilisé son CV pour commencer plus haut, apprenant d’abord aux côtés de son ancien coach Fatih Terim à Galatasaray, puis se lançant en Slovénie, où il a fait le doublé avec l’Olimpija Ljubljana malgré une arrivée dans un contexte très tendu (instabilité, conférence de présentation interrompue par les ultras, etc.). Il venait de commencer une nouvelle aventure au NK Celje, un autre club slovène, quand Bordeaux est venu le chercher à l’automne. La semaine dernière, Mark Zabukovnik, défenseur de Celje, expliquait à nogomania.com que le technicien avait « élargi sa vision du foot ».

Comment expliquer alors que cette ouverture ne semble pas exister avec ses homologues du championnat dans lequel évolue Bordeaux aujourd’hui ? Ces tensions s’inscrivent aussi dans la dichotomie entre les entraîneurs français et étrangers. « Si un Français dit ce qu’il a dit sur les schémas de jeu, tout le monde se fout de sa gueule, estime Brouard. Bien sûr que je veux défendre les entraîneurs français. Vous pensez qu’ils travaillent mal ? Même les plus grands, Klopp, Guardiola, se remettent en question, et lui va donner des leçons ? »

L’ancien coach de Bastia pense que Riera n’a pas conscience de la réalité chez la majorité des clubs de Ligue 2 qui doivent composer avec des moyens très limités. Ce serait le cœur de l’incompréhension, entre autres griefs. « Il ne faut pas oublier que Bordeaux a un budget de 40 millions, une équipe de fou, des supporters incroyables et de très bonnes conditions de travail, ajoute-t-il. Il ne sait pas comment les autres clubs travaillent. S’il le savait, il pourrait un peu la fermer. » L’entraîneur en herbe devra peut-être soigner la forme pour ne pas collectionner plus d’ennemis qu’il n’en faut pour avancer dans ce métier, où il continue d’apprendre en peinant à redresser les Girondins (13es avec 36 points après 27 journées) et en savourant un nul arraché à la 94e minute sur la pelouse de Rodez.

Dans cet article :
Dans cet article :

Par Quentin Fredon et Clément Gavard

Propos de Régis Brouard recueillis par QF et CG
Propos d'Albert Riera tirés du Diario de Mallorca

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