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L’Allemagne doit-elle rappeler Manuel Neuer pour la Coupe du monde ?
Alors que l’Allemagne affronte ce vendredi soir le Luxembourg sans pouvoir encore assurer sa qualification pour le Mondial 2026, la question du gardien titulaire secoue la sélection. Ter Stegen est blessé, Baumann n’était pas censé être là, et derrière, les jeunes manquent encore de bouteille. De quoi raviver une idée que l’on croyait enterrée : et si Manuel Neuer revenait ?
Entre ses deux derniers matchs de qualification – ce vendredi face au Luxembourg, puis lundi contre la Slovaquie –, la sélection allemande a surtout une certitude : rien n’est encore certain. L’équipe de Julian Nagelsmann cherche son équilibre, et surtout son dernier rempart. Depuis que Marc-André ter Stegen soigne son dos à Barcelone, le poste de gardien est devenu une patate chaude. Oliver Baumann, d’ordinaire tranquille à Hoffenheim, se retrouve propulsé titulaire (8 sélections) sans vraiment l’avoir demandé. Quant à Noah Atubolu et Jonas Urbig, les deux jeunes de service, ils sont à l’âge où on découvre la pression des matchs à élimination directe à la télévision, pas sur le terrain.
Le fantôme de Neuer plane encore
Manuel Neuer, lui, a tiré sa révérence internationale après l’Euro 2024. Une sortie discrète, à l’image d’un joueur qui pensait avoir tout donné au pays. Sauf que la retraite du capitaine a laissé un vide immense, presque irréparable. « Manuel Neuer est un gardien d’une extra-classe, qu’on ne trouve pas partout », rappelle Bodo Menze, fondateur du centre de formation de Schalke en 1991, où le portier a grandi pendant 20 ans avant d’enchaîner les saisons au Bayern. Jens Lehmann et Oliver Kahn étaient des gardiens très forts sur leur ligne, mais Neuer a interprété le rôle différemment : tu peux presque lui donner un poste de joueur de champ dans un club de troisième division. »
Autrement dit, on n’a pas perdu qu’un gardien : on a perdu une façon de jouer. Et c’est bien là tout le problème. Pour Thierry Barnerat, spécialiste des gardiens auprès de la FIFA et analyste vidéo de Thibaut Courtois, la différence est abyssale : « Même sur le déclin, Neuer dégage quelque chose de très fort. Quand on voit ce qu’il est encore capable de produire, Baumann est très très loin de ce niveau-là. » Résultat : à chaque fois qu’un gardien allemand se plante, c’est encore le nom de Neuer qui revient sur toutes les lèvres. Comme un fantôme qu’on n’arrive pas à chasser.
Un come-back pas si improbable
En Allemagne, le débat n’est plus seulement nostalgique. Bodo Menze l’assure : « Le retour de Neuer en sélection est une possibilité. Rudi Völler a échangé avec lui à ce sujet. Je connais Manuel, et je sais qu’il est ambitieux comme très peu de footballeurs. Je peux imaginer qu’il vienne à la Coupe du monde : il a une forme extraordinaire. » Reste à savoir si le corps suivra. Le gardien du Bayern est revenu d’une grave blessure, et Thierry Barnerat rappelle que « c’est un miracle qu’il soit revenu, mais il n’a pas retrouvé le niveau qu’il avait avant ».
Le retour de Neuer en sélection est une possibilité. Rudi Völler a échangé avec lui à ce sujet.
Pourtant, même diminué, Neuer reste une référence : « Quand le Bayern gagne le titre 2022-2023 avec Yann Sommer, c’est quand même lui qui vient soulever le trophée à la fin », glisse Barnerat, preuve que son aura dépasse de loin la ligne de but. À 39 ans, Neuer n’a plus la même explosivité, mais son expérience et sa lecture du jeu pourraient bien peser dans la balance. Et puis, entre un gardien mythique un peu rouillé et un titulaire de circonstance, le choix n’est pas si absurde.
Les jeunes, encore trop verts
L’alternative des jeunes talents ne convainc personne. Noah Atubolu et Jonas Urbig ont du potentiel, mais pas encore les épaules. « Ce sont de très bons talents, mais ils n’ont pas encore une grande expérience », confirme Menze, prudent. Barnerat, lui, est plus catégorique : « C’est impossible de lancer des jeunes aujourd’hui. Vous êtes l’Allemagne, une des quatre meilleures nations du monde. Si vous alignez un jeune, c’est qu’il joue la Ligue des champions et qu’il connaît la pression des grands matchs. » En clair, on ne lance pas un gamin de 22 ans dans une Coupe du monde juste parce qu’on a peur d’appeler un vétéran. Pas en Allemagne, en tout cas.
Tout dépendra désormais du rétablissement de Ter Stegen. S’il revient à temps, le débat s’éteindra de lui-même. Sinon, le retour de Neuer pourrait passer du fantasme au plan B très concret. « Si Ter Stegen ne peut pas revenir, on est obligés de prendre Neuer, tranche Barnerat sans détour. Mais s’il est à 100%, Neuer restera chez lui. » Le paradoxe est cruel : l’Allemagne, pays de Kahn, Lehmann et Sepp Maier, se retrouve à court de gardiens capables d’endosser le costume. Face à ce vide générationnel, la tentation de rappeler le dernier grand nom devient presque rationnelle. Après tout, comme le glisse Menze, « Neuer est un talent tellement extraordinaire qu’on ne trouve pas partout. Je ne peux le comparer qu’avec Lev Yachine, et encore. » Alors, tant qu’il est encore là, pourquoi ne pas lui offrir une dernière danse sous le maillot blanc à 40 ans ?
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Tous propos recueillis par CDB




















