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Luciano Spalletti et l’impossible renaissance italienne
Ce dimanche, Luciano Spalletti a annoncé avoir été démis de ses fonctions de sélectionneur de l’équipe d’Italie. Un nouvel échec pour le football transalpin, qui ne parvient toujours pas à se mettre à la page et qui vit aujourd’hui dans la peur de louper la Coupe du monde pour la troisième fois consécutive.

La sélection italienne est peut-être aujourd’hui confrontée aux plus grands travaux de toute son histoire. Et la première étape sera de trouver un nouvel architecte. Car ce dimanche, Luciano Spalletti a offert une sortie lunaire en conférence de presse en annonçant lui-même son licenciement de son poste de sélectionneur, deux jours après la débâcle concédée face à la Norvège en qualifications pour le Mondial (3-0) et à la veille d’un match face à la Moldavie : « J’ai été licencié, le président Gravina m’a annoncé que je serai relevé de mes fonctions après le match face à la Moldavie. J’aurais aimé rester et tenter de changer les choses, mais je prends acte de cette décision. » Un nouveau coup dur pour la Fédération italienne, qui avait pourtant tenté un pari intéressant en misant sur l’ancien entraîneur du Napoli, et qui doit finalement repartir une nouvelle fois de zéro. En attendant, le spectre d’une troisième Coupe du monde consécutive manquée commence déjà à planer au-dessus de la Botte.
Un bilan peu glorieux
À l’heure de faire le bilan, force est de constater que Luciano Spalletti n’a pas été à la hauteur de la tâche. Si le sexagénaire est parvenu à qualifier la Nazionale pour l’Euro – au terme d’un match ô combien compliqué face à l’Ukraine –, les champions en titre ont été quelconques en terre allemande, avec une qualification in extremis contre la Croatie en phase de groupes et une élimination sans gloire face à la Suisse. La suite ? Quelques éclaircies en Ligue des nations, avec de belles victoires face à la France et la Belgique, avant de chuter au terme de la double confrontation face à l’Allemagne en quarts de finale. La défaite cuisante en Norvège, principal adversaire des Italiens sur la route vers les États-Unis, a été la goutte de trop pour la Fédération. « Avec ces résultats, je sais que j’ai créé des problèmes au football italien et j’en suis particulièrement désolé », a regretté Spalletti lors de l’annonce de son départ. « Je savais que ce serait un défi difficile, mais j’étais convaincu de pouvoir nous qualifier pour la Coupe du monde. »
Si le bilan comptable n’est déjà pas fameux (11 victoires, 6 nuls et 6 défaites), la forme laisse elle aussi à désirer. Que ce soit à Naples, à Rome ou à l’Udinese, Luciano Spalletti avait toujours réussi à imprimer sa marque en infusant une identité de jeu claire et offensive et en se basant sur son intuition pour faire ses choix. Une méthode qui n’a absolument pas pris avec la sélection. Les changements incessants en défense lors des premiers mois, entre un système à trois ou à quatre défenseurs, n’ont notamment pas permis à l’équipe de se reposer sur une base solide. Pour couronner le tout, le caractère colérique du Toscan a parfois pu mettre à mal le sacro-saint équilibre dont une sélection a besoin : recherche d’une taupe pendant l’Euro, guerre ouverte lancée à Francesco Acerbi et volonté de n’en faire qu’à sa tête, en lançant par exemple le néophyte Diego Coppola (zéro sélection) en défense face aux Norvégiens… Se pose ainsi la question de savoir s’il était vraiment fait pour prendre la tête d’une équipe nationale.
Des problèmes structurels
Si Luciano Spalletti a échoué, le football italien fait plus globalement face à une crise plus profonde. Les problèmes structurels sont nombreux, inquiétants : la formation et la post-formation ne suivent plus les standards européens, avec trop peu de jeunes joueurs italiens qui bénéficient d’un réel temps de jeu dans les meilleures équipes de Serie A, souvent trustées par des joueurs étrangers. L’AC Milan ou la Juventus, jadis piliers de la Nazionale, connaissent aussi des jours particulièrement difficiles et ne peuvent plus servir de repères. Le vivier s’est appauvri, les talents émergent trop tard et les joueurs offensifs de grande qualité sont en ce moment particulièrement difficiles à débusquer. Pour succéder à Luciano Spalletti, la presse italienne évoque Stefano Pioli et Roberto Mancini… mais surtout Claudio Ranieri. L’ancien coach de Leicester City, de Chelsea et de Nantes sort d’une saison remarquable avec la Roma : arrivé en pompier de service, il était parvenu à sortir la Louve de la seconde partie du classement pour la hisser jusqu’à une belle cinquième place. De là à imaginer qu’un homme de 73 ans puisse dépoussiérer pour de bon le vieux football transalpin ? Cette fois, il ne s’agit pas de réparer : il faut tout reconstruire.
Claudio Ranieri a refusé de reprendre la sélection italiennePar François Linden