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Foot et rugby : nos pelouses vont craquer

Par Quentin Ballue

Exposées aux piétinements, aux arrachements et à l'enchaînement des matchs, les pelouses de l'Hexagone sont scrutées de près depuis le coup d'envoi de la Coupe du monde de rugby. Les footeux retiennent leur souffle.

Foot et rugby : nos pelouses vont craquer

Pour les jardiniers, c’est la semaine de tous les dangers. Dimanche, Toulouse reçoit Metz au Stadium. Un stade où Japonais et Samoans auront ferraillé moins de 72 heures plus tôt. Mercredi 4 octobre, l’ASSE retrouvera son chaudron pour recevoir Dunkerque, trois jours seulement après Australie-Portugal. Jeudi prochain, l’OM réinvestira son Vélodrome, quatre jours à peine après Afrique du Sud-Tonga. Dimanche 8, l’OL accueillera Lorient à 15h, sur une pelouse probablement en souffrance après le passage des All Blacks et de l’Uruguay le 5, puis des Bleus et de l’Italie le lendemain. Un sacré défi pour les équipes chargées d’assurer les meilleures conditions de jeu à toutes les parties.

Balais à rosée, millimètres et captain run

Les deux sports n’ont pas tout à fait les mêmes besoins. Là où, par exemple, les footeux aiment jouer sur une pelouse humide pour que le cuir fuse, les rugbymen, eux, en sont beaucoup moins friands face au risque d’un ballon glissant. « On décale nos arrosages selon les matchs, indique Stéphane Cazabat, responsable de la pelouse du Stadium de Toulouse. Quand il y a un match de rugby à 13 ou 14h, dès le matin, on brosse manuellement avec des balais à rosée de trois mètres de large pour faire tomber l’humidité sur le sol. » Une pelouse accueillant du rugby doit évidemment être plus résistante aux pressions et aux appuis, d’où des mesures de dureté du sol. Le cahier des charges diffère également au niveau de la hauteur de tonte : là où le ballon rond roule sur 25 millimètres d’épaisseur, l’ovalie requiert un peu plus. « On booste la pelouse pour qu’elle pousse, explique Marianne Petiot, directrice des sports à Saint-Étienne Métropole. La période est assez propice, on n’est pas en plein mois de juillet. On arrose, on utilise des engrais, la luminothérapie. Chaque jour, on tond largement 3-4 millimètres de hauteur d’herbe. En rugby, la tolérance est entre 28 et 35. On a une marge. S’il faut que la pelouse pousse de 2-3 millimètres en deux ou trois jours, elle le fait largement. » Pas de problème à ce niveau-là, donc, quand un Angleterre-Chili arrive trois jours après LOSC-Ljubljana à Villeneuve-d’Ascq.

En revanche, le gazon morfle, agressé par les crampons et l’enchaînement des rencontres. « On parle beaucoup des matchs, mais on a aussi le captain run, souligne Marianne Petiot. En réalité, en fonction du type d’entraînement mis en place à ce moment-là, on a presque deux matchs de rugby en deux jours, la veille de match et le jour de match. Ça sollicite beaucoup les pelouses. » Le calendrier a été aménagé pour que la cohabitation du ballon rond et de son cousin ovale se fasse dans les meilleures conditions. Pendant la période la plus riche du Mondial en matière de matchs, les clubs de foot se sont exilés au maximum. En septembre, un seul des cinq matchs de l’OM se tient au Vélodrome. Sainté, Bordeaux, Nice ou le TFC, eux, auront passé près d’un mois sans jouer à domicile. Ce qui n’a pas empêché certains accrocs.

Quand on fait un plaquage, c’est une greffe. Les gens pensent qu’on déroule un tapis et que ça joue, mais il y a un gros travail à faire derrière, et une part de chance, pour l’implanter dans le substrat.

Stéphane Cazabat

Le sacro-saint plaquage

Paulo Fonseca a regretté une pelouse irrégulière contre Ljubljana, six jours après que l’on a vu des bandes d’herbe se soulever de manière impressionnante sous la puissance d’une mêlée franco-uruguayenne. « On a tous cette angoisse de la pelouse qui se soulève, confie Marianne Petiot. La pelouse arrive par rouleau de dix mètres, et elle est plaquée. Dans la plupart des stades, on a réalisé des plaquages pendant l’été. Les jonctions ne sont pas complètement faites, cela demande plusieurs mois. Ça peut arriver que les bandes se soulèvent selon les appuis. À Geoffroy-Guichard, on “coud” les zones un peu fragiles entre elles pour améliorer leur tenue. » Stéphane Cazabat complète : « Quand on fait un plaquage, c’est une greffe. C’est toujours un pari. Les gens pensent qu’on déroule un tapis et que ça joue, mais il y a un gros travail à faire derrière, et une part de chance, pour l’implanter dans le substrat. » La greffe a bien pris du côté de l’île du Ramier, moins dans le Nord.

Tous les stades concernés par la Coupe du monde de rugby sont équipés d’une pelouse hybride, plus résistante qu’un ensemble 100% naturel. À Toulouse, l’alternance est une habitude puisque le Stade toulousain dispute entre trois et cinq matchs par saison au Stadium. Une dizaine de jardiniers s’affairent à chaque fin de match pour remettre la pelouse en état, réaliser les tontes de propreté et mener les opérations mécaniques. Même niveau de mobilisation dans la Loire, où les effectifs ont été renforcés. « On a des moyens humains importants, 7 jours sur 7, note Marianne Petiot. On mobilise une dizaine de personnes par jour. En temps normal, on a trois jardiniers, et on monte à quatre ou cinq en jour de match. » Saint-Étienne Métropole a aussi déboursé près de 7000 euros pour louer des tondeuses supplémentaires. « Deux tondeuses hélicoïdales, spécifiques au rugby », pour tondre plus rapidement et être dans les temps les jours de match, puisque l’aire de jeu doit être prête 4h30 avant le coup d’envoi.

« Une pression de dingue »

En même temps, les pouvoirs publics préparent déjà le retour des Verts dans leur antre. Après Australie-Fidji, le 17 septembre, les équipes « ont fini à minuit en vue du match de l’ASSE le 4 octobre. Quatre personnes ont nettoyé l’intégralité des tracés de rugby, au balai et au jet d’eau, pour que la peinture ne soit pas laissée un mois. On a choisi une peinture effaçable pour limiter au maximum le visuel des marques de rugby pour la suite. » Des opérations que les clubs locataires suivent évidemment de près. « On travaille en confiance avec l’ASSE, explique Marianne Petiot. Quand il y a des problèmes, on leur signale, on ne le cache pas sous le tapis. On leur transmet les éléments de suivi, ils ont accès aux données agronomiques de la pelouse. » Néanmoins, l’herbe n’est pas toujours aussi verte.

Une autre métropole glisse qu’elle reçoit « une pression de dingue » de la part des dirigeants de l’équipe occupante. « Ils ont très peur de se retrouver avec un champ de patates au mois d’octobre, ils sont d’une exigence élevée. À les écouter, il faudrait qu’on rachète une pelouse après chaque match. » Celle de Lyon a été changée cet été, comme à Lille, Nice, Marseille ou encore Toulouse. Mais la possibilité de la renouveler n’est pas à exclure. « On a toutes les pelouses de réserve prévues, glissait Martin d’Argenlieu, qui gère l’Orange Vélodrome, à France Bleu. Une pelouse plaquée, qui peut se poser très rapidement si besoin (en 3-4 jours). Et on envisage, après la Coupe du monde, si besoin, de remplacer la totalité du terrain. » L’amour est dans le pré, mais encore faut-il que le gazon soit de qualité.

Par Quentin Ballue

Propos recueillis par QB.

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