S’abonner au mag
  • France
  • Paris Saint-Germain

Trois questions pour comprendre l’affaire PSG-Rabiot

Par Jérémie Baron
6 minutes

Ce jeudi devant la cour d’appel de Paris, Adrien Rabiot a obtenu la requalification de ses contrats avec le PSG en CDI, ce qui contraint son ancien employeur à lui verser 1,3 million d’euros. On fait le point avec Me Jean-Jacques Bertrand, avocat en droit du sport.

Trois questions pour comprendre l’affaire PSG-Rabiot

→ Pourquoi les contrats d’Adrien Rabiot avec le PSG ont-ils été requalifiés en CDI ?

Déjà, un rappel : en décembre 2018, à cause de son refus de prolonger son contrat avec le PSG, qui expirait en juin 2019, Adrien Rabiot avait été mis à l’écart par le club de la capitale, et ce, jusqu’à la fin de son bail dans la Ville Lumière. Après ce douloureux divorce, le joueur a décidé d’attaquer le PSG. Mais contrairement à Hatem Ben Arfa, qui était allé sur le terrain du harcèlement moral après avoir lui aussi été lofté par Paris – HBA n’avait obtenu « que » 100 000 euros sur les 7,7 millions qu’il réclamait, rappelle L’Équipe –, Rabiot a préféré tenter une autre approche en demandant la requalification de l’ensemble de sa relation contractuelle avec Paris en CDI.

La réaction d’Adrien est aussi fondée parce qu’à l’époque, on lui a retiré arbitrairement la possibilité de jouer au football.

Romuald Palao, avocat d’Adrien Rabiot

L’homme aux bouclettes avait d’abord saisi les prud’hommes, mais la juridiction de première instance ne lui avait pas donné gain de cause, ce qui l’avait amené à interjeter appel devant la cour d’appel de Paris. « Adrien n’aurait pas fait cette demande de requalification si tout s’était bien passé au PSG, explique l’entourage du joueur auprès de l’Agence France-Presse. Il a lancé cette procédure parce qu’on l’a écarté de l’équipe, on lui a fait vivre pendant sept mois des moments très désagréables. »

La cour a déclaré recevables les demandes du milieu de terrain, ce qui oblige le club à lui verser 1,3 million d’euros. Une décision qui « vient sanctionner le club pour la mise à l’écart du joueur arbitraire et injustifiée, estime auprès de l’AFP l’avocat du gaucher, Romuald Palao. En outre, il avait été à l’époque sanctionné de façon abusive par le club, une sanction qui n’aurait pas dû exister. En sollicitant une requalification en CDI de ses contrats à durée déterminée pendant neuf ans en tout au PSG, Adrien Rabiot a juste fait valoir ses droits. La réaction d’Adrien est aussi fondée parce qu’à l’époque, on lui a retiré arbitrairement la possibilité de jouer au football. »

Me Jean-Jacques Bertrand, avocat en droit du sport ayant représenté Adrien Rabiot par le passé, appuie ces propos auprès de So Foot : « Cette décision, elle montre le non-respect par un club des obligations d’un employeur, malgré les lois dans le monde du sport. Le droit du travail s’applique à tout le monde. Le cas d’Adrien Rabiot démontre que les clubs employeurs, aussi prestigieux soient-ils, ne respectent pas toujours le droit du travail. Et là, on leur rappelle, c’est tout. »

→ Pourquoi 1,3 million d’euros ?

La grosse partie de ce pactole représente l’indemnité de requalification (341 628 euros, soit un mois de salaire) et l’indemnité compensatrice de préavis (683 256 euros, soit deux mois de salaire), conséquences directes de sa « CDIsation » (chiffres glissés par Le Parisien). « Tous les salariés en CDI doivent être licenciés après une convocation en entretien préalable et une lettre de licenciement. Sinon, c’est une rupture sans cause réelle ni sérieuse et cela entraîne des indemnités », pose Me Bertrand. Rabiot récupère également une partie des salaires qui lui avaient été retirés, et bénéficie de l’annulation des sanctions financières dont il avait fait l’objet. Sans oublier une petite liasse de 10 000 euros pour sa mise à l’écart du groupe pro.

« Les clubs, qui connaissent un peu leur droit, disent que le joueur peut s’entraîner normalement, que c’est l’entraîneur qui fait la sélection de l’équipe, que ce n’est pas la décision de la direction et que ce n’est donc pas une rupture de contrat, continue l’avocat. C’est ça la difficulté pour les joueurs, mais Rabiot avait dans son dossier la déclaration publique du directeur sportif. Car c’était affirmé par Antero Henrique à l’époque : il n’était pas question qu’il rejoue, parce qu’il ne voulait pas prolonger. Et ils ne l’ont pas fait rejouer. »

→ Qu’est-ce que les clubs français peuvent craindre ?

Comme pour le cas Lassana Diarra, ceci n’est pas encore une révolution. Me Bertrand le rappelle, « il y a déjà eu des décisions comme celle-ci, mais ça n’a pas eu la médiatisation du dossier d’Adrien. J’ai eu le cas d’un entraîneur à Créteil, je me souviens aussi de la décision de la cour d’appel de Poitiers pour une basketteuse (on pense également au rugbyman Patricio Albacete, NDLR). Ce n’est pas une décision qui va faire la révolution du football. On n’est quand même pas au niveau de Bosman. Là, c’est cas par cas. N’importe quel joueur, n’importe quel entraîneur ne peut pas dire “J’ai un CDI, je n’ai plus un CDD”. Si vous avez un CDD qui respecte la loi, ce sera difficile d’en sortir. Les clubs n’ont pas à s’inquiéter, ils ont juste à respecter la loi. »

Pour que ce soit une révolution dans le football, il faudrait mettre à néant tous les CDD, dire que ce sont des CDI.

Me Jean-Jacques Bertrand, ancien conseiller d’Adrien Rabiot

« Pour que ce soit une révolution dans le football, il faudrait mettre à néant tous les CDD, dire que ce sont des CDI, ce qui laisserait la porte ouverte à des départs intempestifs et à des pertes de valeur. » À travers le dossier Rabiot, c’est aussi le combat contre les « lofts » qui est en jeu : « La justice ne prend pas encore en compte cette situation, quand des clubs ne veulent plus respecter leurs obligations à l’égard des joueurs et les mettent à l’écart, et qu’il y a des problèmes de preuve. C’est l’étape d’après, il y a une plainte qui est déposée par l’UNFP à cet égard. »

En 2015, dans le monde sportif professionnel en France, un CDD spécial issu du Code du sport est venu remplacer le CDD d’usage issu du Code du travail : « Afin d’assurer la protection des sportifs et entraîneurs professionnels et de garantir l’équité des compétitions, tout contrat par lequel une association sportive ou une société […] s’assure, moyennant rémunération, le concours de l’un de ces salariés est un contrat de travail à durée déterminée », peut-on lire dans l’article L222-2-3 de ce Code du sport.

« Si les règles de forme de cette loi ne sont pas respectées, le contrat est d’office qualifié en durée indéterminée », précise Me Bertrand. « Il y a une critique qui a été faite sur cette loi, prétendument instaurée pour protéger les sportifs et les entraîneurs, alors qu’il a été démontré que le fait de ne pas pouvoir invoquer une requalification en CDI protégeait plus les employeurs que les salariés. » Le contrat d’Adrien Rabiot, dont la dernière prolongation datait de 2014 – soit avant ce nouveau texte –, n’est pas concerné par cette loi.

Ilya Zabarnyi se rapproche de plus en plus du Paris Saint-Germain

Par Jérémie Baron

À lire aussi
Les grands récits de Society: L'affaire Yvon Gérard - Le notaire a disparu
  • Grand Récit
Les grands récits de Society: L'affaire Yvon Gérard - Le notaire a disparu

Les grands récits de Society: L'affaire Yvon Gérard - Le notaire a disparu

Le 17 août 2022, Yvon Gérard saluait sa famille, sortait de chez lui et s'évaporait dans la nature. Depuis, il n'est pas réapparu. Que s'est-il passé?

Les grands récits de Society: L'affaire Yvon Gérard - Le notaire a disparu
Articles en tendances

Votre avis sur cet article

Les avis de nos lecteurs:

Nos partenaires

  • Vietnam: le label d'H-BURNS, Phararon de Winter, 51 Black Super, Kakkmaddafakka...
  • #Trashtalk: les vrais coulisses de la NBA.
  • Maillots, équipement, lifestyle - Degaine.
  • Magazine trimestriel de Mode, Culture et Société pour les vrais parents sur les vrais enfants.
  • La revue de presse foot des différents médias, radio et presse française/européenne, du lundi au vendredi en 3 à 4h!
  • Pronostic Foot 100% Gratuits ! + de 100 Matchs analysés / semaine