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Rabiot à l’OM : les anciens « traîtres » parisiens se souviennent

Par Gaspard Couderc

Quelques jours après la signature d’Adrien Rabiot à l’OM et à un peu plus d’un mois de chaudes retrouvailles avec le PSG en Ligue 1, la question des transfuges de la capitale vers la cité phocéenne se pose à nouveau, quinze ans plus tard. Certains de ses prédécesseurs prennent la peine de l’avertir de ce qui l’attend.

Rabiot à l’OM : les anciens « traîtres » parisiens se souviennent

L’esprit altier, le buste bombé, la longue chevelure battue par les vents à mesure qu’il arpente le terrain, Adrien Rabiot semble dégager une confiance en soi quasi inaltérable. S’il a pu parfois friser la condescendance, le Duc peut se targuer d’être un joueur de classe mondiale, dont le parcours convoque le sans-faute. 450 matchs au PSG puis à la Juventus, 47 sélections en Bleus et un statut de vice-capitaine du club italien plus tard, le relayeur surprend son monde en décidant de signer chez le rival honni, l’OM. D’aucuns y voient une régression, lui qui était libre cet été et a refusé de signer au Milan et dont le nom revenait avec insistance du côté de l’Atlético ou de Manchester United. D’autres, au contraire, veulent croire au transfert de la décennie, divine surprise pour une Ligue 1 en manque de stars depuis les départs successifs de Neymar ou Mbappé. Pour l’OM aussi qui récupère un des meilleurs milieux d’Europe, titulaire inamovible de l’équipe de France. Mais qu’en est-il pour le joueur ?

Accueilli lundi à Marignane comme une rock star, il a déjà annoncé vouloir ramener Marseille en Coupe d’Europe et gagner des trophées. Un discours certes rodé, mais qui démontre son envie, intacte à 29 ans, de triompher dans un club qui n’a plus rien gagné depuis la défunte Coupe de la Ligue en 2012. Le challenge, excitant sur le papier n’en demeure pas moins lourd mentalement, lui qui va devoir à la fois se départir de son image de Titi et surmonter la fronde qui gronde chez les supporters parisiens, avec comme point d’orgue un Classique au Parc des Princes le 16 mars prochain.

Joue-la comme Claude Lowitz

Pourtant, Rabiot n’est pas le premier à avoir vécu ce genre d’aventure. L’un des premiers à avoir essuyé les plâtres, c’est Claude Lowitz, arrière gauche international olympique à l’honnête carrière franco-française. On est en 1985 et il sort d’une grosse saison à Metz, avec comme acmé la mythique victoire contre Barcelone. « Au PSG, il n’y avait que des internationaux et un entraîneur incroyable, Gérard Houllier, le challenge était immense », se remémore-t-il. Deux ans plus tard et un championnat de France dans la besace, il décide de signer à L’OM : « Je m’étais blessé, et Paris achetait des joueurs à mon poste, donc je décide de partir. Je suis du Sud-Ouest, Marseille ça me parle. » Tropisme régional ou opportunité sportive ? « À l’époque, ça ne posait pas de problème, je n’ai eu aucun souci au niveau des supporters. Des deux côtés. » Une époque révolue ?

Ça va être compliqué pour lui, c’est sûr, aujourd’hui le public ne pardonne rien.

Claude Lowitz, ex du PSG (1985-1987) et de l’OM (1987-1988)

Questionné sur le transfert de Rabiot, il a cette formule : « Ça va être compliqué pour lui c’est sûr, aujourd’hui le public ne pardonne rien. » Est-ce à croire que, dans les années 1980, la rivalité n’était pas aussi forte que de nos jours ? Il est vrai que le PSG était plutôt dominant, Marseille balbutiant encore dans son ère Tapie. Selon le défenseur lotois, la réponse pourrait plutôt venir du comportement des supporters, alors plus respectueux. Si de nombreux autres joueurs ont ensuite expérimenté cette ligne de crête, Lowitz est seulement le deuxième de l’histoire (après François Brisson) à avoir été transféré directement de Paris à Marseille, ses successeurs ayant eu la bonne idée de jouer ailleurs entre-temps. Notons toutefois que celui qui est désormais à la tête du Pôle Espoirs fédéral de La Réunion n’était ni un Titi ni un historique du PSG (il n’y a joué que deux saisons), tout le contraire d’un certain Adrien Rabiot.

« Il y a tout à Marseille pour qu’il s’épanouisse »

L’accent ne trompe pas, c’est bien Daniel Bravo au bout du fil. Légende du PSG, vainqueur de la Coupe des coupes en 1996, il a filé à Marseille deux ans plus tard. Un crime de lèse-majesté ? « Pour moi, ce sont des histoires de supporters, ça me fait bien rigoler que le public du PSG parle de traître : on est des pros, nous, les joueurs, alors pourquoi on s’interdirait de jouer dans ces deux grands clubs ? », s’interroge-t-il, avant de préciser : « Je suis de ceux qui défendent toujours les joueurs, dont le choix n’est pas celui d’un supporter. » De son côté, il n’en garde que de bons souvenirs : « Marseille m’a fait rêver, et Paris, ça a été mes meilleures années. »

Daniel Bravo sous le maillot marseillais en 1999 contre Parme (Finale de la Coupe de l’UEFA).
Daniel Bravo sous le maillot marseillais en 1999 contre Parme (Finale de la Coupe de l’UEFA).

Même son de cloche pour Rabiot ? C’est en tout cas la thèse que défend le Toulousain : « Évidemment, c’est une super recrue pour l’OM, mais pour lui aussi c’est une bonne nouvelle. Il veut se faire plaisir et réussir son pari de gagner des trophées. Il y a tout à Marseille pour qu’il s’épanouisse ». Si en 1998, c’est un Daniel Bravo en fin de carrière qui débarque sur la Canebière, le Duc, pas encore trentenaire, arrive lui en pleine possession de ses moyens : « Il sort d’une grosse saison et il est tellement habitué aux grands matchs qu’il va se mettre tout le monde dans la poche. » Le retour au Parc l’année prochaine pourrait d’ailleurs tout mettre à plat. « Il va être sifflé par les Parisiens, ça c’est sûr, peut-être qu’ils ne lui pardonneront jamais, mais connaissant son caractère, je pense qu’il va fermer l’oreille et ne pas être trop attentif à ce qui se dit autour de lui. »

Il a fallu que j’aie une discussion avec certains supporters pour leur demander de me laisser du temps.

Patrick Colleter, ex du PSG (1991-1996) et de l’OM (1997-1999)

Tout chez lui fleure bon les années 1990. Style de jeu ultra-agressif, mi-mulet mi-coupe au bol, carrière presque exclusivement estampillée Division 1, six clubs français au compteur et… une sélection avec l’équipe de Bretagne. Vous l’avez ? Il s’agit de Patrick Colleter, qui, en sortant de sa journée de boulot, raconte avec application sa propre expérience et celle qu’il imagine pour le natif de Saint-Maurice. « Au début, c’était compliqué à l’OM, j’étais catalogué comme le Parisien, même si j’avais fait Bordeaux entre-temps, retrace le Brestois. Il a fallu que j’aie une discussion avec certains supporters pour leur demander de me laisser du temps. » Avec un profil à la Di Meco, arrière gauche dur sur l’homme, il se fait respecter en quelques semaines. C’est finalement ça, le secret : « Rabiot a l’expérience, il est habitué aux chaudes ambiances en Italie, ça ne lui posera pas de problèmes », puis d’asséner, catégorique : « S’il est bon, il va être adopté. »

L’autre Cissé

Si le mercato a été cette année marqué par le transfert de Rabiot à l’OM, l’été 2009 ressemble carrément à une opération spéciale téléguidée par la paire Dassier-Deschamps. Pas moins de trois anciens Parisiens rejoignent la cité phocéenne : Fabrice Abriel, Gabriel Heinze et Édouard Cissé. Ce dernier, devenu consultant, rejoue la scène : « Je viens de jouer deux ans en Turquie, j’ai fait le doublé et j’ai un certain Didier Deschamps qui me propose de le rejoindre, il me dit qu’il lance une équipe pour gagner le championnat. » Alors que le milieu défensif a passé une décennie au PSG, il n’hésite pas, la trentaine entamée aidant. « Je me suis fait copieusement siffler quand je suis revenu à Paris, Gabi encore plus. Mais c’était de bonne guerre… On avait gagné 3-0 », lance-t-il, goguenard. Il faut dire que le rapport de force s’était définitivement inversé, pour un PSG pas encore sous pavillon qatari, plongé dans la fin de la sombre ère Colony Capital et un OM qui finira bien champion cette année-là. Rien n’indique toutefois qu’il se passera la même chose quatorze ans plus tard pour Rabiot, impliqué dans le « projet De Zerbi ». Mais selon Cissé, le timing est favorable : « Là où il a de la chance, c’est qu’il y a eu des précédents. Il n’y a qu’à regarder dans les autres championnats, partout les grands joueurs signent chez le rival, c’est devenu banal. »

Pour autant, on oublie volontiers les conditions dans lesquelles le milieu est parti de Paris. Après sept ans au club, ponctués de prestations XXL, il est poussé vers la sortie après avoir refusé de prolonger. Il va ensuite cirer le banc pendant de longs mois et en garder une blessure qu’on imagine encore vivace. Dès lors, est-il possible d’être un traître vis-à-vis d’un club qui vous a lâché ? « Globalement à Paris, ça se termine souvent mal et avec ce qui s’est passé avec Adrien, il n’y a aucune raison pour qu’il leur demeure fidèle », explique Édouard Cissé. Mais pourquoi Marseille alors qu’on parle d’un furioclasse ? « Il était libre de signer où il voulait et si ça ne s’est pas fait dans des clubs plus huppés, il s’est sûrement dit “Je vais à Marseille ça va être sympa, je vais beaucoup jouer et revenir en Bleus.” »

Selon lui, ce transfert est un accord gagnant pour toutes les parties : « Marseille l’engage gratuitement, Rabiot va pouvoir se montrer, a fortiori en France, puis pourra potentiellement aller chercher un autre club dans six mois ou un an, et l’OM récupérera un beau chèque. C’est aussi du business. » Tandis que certains médias évoquent une coquette prime à la signature de 10 millions d’euros, que son agente de mère est réputée extrêmement dure en affaires, on est en droit de se dire que le facteur financier a pu être déterminant. D’autre part, plusieurs de ses anciens coéquipiers à Créteil, son premier club, rapportaient en 2019 à So Foot qu’il était un vrai supporter marseillais. Bien avant cet épisode donc. Des circonvolutions que le Duc laisse volontiers à la plèbe, lui sur qui tout a toujours glissé.

Accueilli à Marseille en rock star, Rabiot a « hâte de retrouver le Vélodrome »

Par Gaspard Couderc

Propos recueillis par GC.

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