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Merci qui ? Merci Michel !

Par Ronan Boscher
6 minutes
Merci qui ? Merci Michel !

Si le Z de Paris va dire au revoir au Parc, le Z de Nantes, Der Zakarian, saluera une dernière fois son équipe. Mais peut-être pas son président.

La rupture est un art. Faut-il lâcher ou être lâché ? Waldemar Kita, au début du mois d’avril, au micro de beIN Sports, commence à baliser le terrain, avouant se donner « jusqu’à fin avril » pour décider de l’avenir de l’idylle avec son entraîneur en fin de contrat, Michel Der Zakarian. Le président joue le tiraillement entre son cœur et sa raison : « C’est un garçon que je respecte et aime beaucoup. J’aimerais continuer avec lui au niveau humain. Mais il y a aussi une question professionnelle. Les vrais dirigeants doivent faire la distinction entre le travail et l’amitié. C’est toujours délicat de se séparer de quelqu’un qu’on aime beaucoup. » Puis Waldemar feint la porte ouverte, en laissant la balle dans le camp de Michel, sa belle : « Il est fort possible que Michel me dise : « Je suis désolé, je ne suis pas du tout d’accord avec votre philosophie. » Alors, on se sépare, on s’embrasse, ou pas, parce que tout le monde s’embrasse et se tue dans le football. Je n’aime pas l’hypocrisie, j’aime les choses claires. Michel est un garçon clair, net et précis, mais je voudrais qu’on définisse ensemble ce qu’on veut faire pour le futur. Le futur, c’est dans deux-trois ans, pas dans six mois. »

« …Voilà, j’arrête »

Le président nantais a raison sur un point : Der Zakarian aime « les choses claires » . Trois semaines plus tard, l’entraîneur nantais va droit au but, sur la pelouse du Vélodrome, toujours au micro de beIN Sports, après un match nul contre l’OM. MDZ expédie les affaires courantes en 40 secondes, regrettant évidemment le déchet technique assez flippant de cette rencontre, avant d’en venir au fait : « Je suis en fin de contrat et je tenais à le dire clairement : je ne serai plus l’entraîneur du FC Nantes l’année prochaine. Je n’ai plus envie de travailler avec M. Kita et… voilà, j’arrête. » L’entraîneur et son président ne se sont plus parlé depuis deux semaines. La mâchoire toujours aussi serrée et le teint toujours aussi – naturellement – hâlé, le Zak’ rend les armes, malgré lui, et finit sur le terrain de l’amour : « Ce qui m’ennuie le plus, c’est… voilà, de quitter le FC Nantes, parce que c’est mon club de cœur. » La décision est raisonnable : en amour, mieux vaut ne pas rester avec sa moitié pour sa seule maison. Quelques minutes avant son dernier match à la Beaujoire, contre Caen samedi dernier, un bibelot souvenir, à la limite de l’épitaphe – « Michel Der Zakarian – Entraîneur du FC Nantes – 2012-2016 » -, un bouquet et un cadre sont remis au Zak, en bord de pelouse, par l’attachée de presse du club. « De la part du président » . En tribunes.

Pourtant, Michel Der Zakarian a mis quatre ans à prendre soin de la maison temporairement brinquebalée entre Ligue 1 et Ligue 2, après 44 années consécutives dans l’élite du foot français. En 4 ans dans le 4-4, MDZ et son équipe ont retrouvé la Ligue 1, ont réussi à rameuter le public à la Beaujoire, en doublant l’affluence moyenne par match (25 000 âmes depuis la remontée de 2013) après des tristes années Ligue 2. Une Beaujoire qui est devenue plus indulgente avec son équipe, moins impatiente aussi, presque plus courageuse. «  Le public a changé avec les descentes et remontées, éclairait Reynald Pedros dans nos colonnes la saison dernière. Une nouvelle génération est arrivée pour soutenir le FC Nantes. Ce ne sont plus les parents rabâchant à leurs enfants la génération du début des années 90. C’est important que chacun écrive son histoire sur ce club. Nous avons eu la nôtre, magnifique, celle de 1983 aussi et celle d’aujourd’hui aussi, avec des moyens et un parcours complètement différent.  » Pour Michel Der Zakarian, le parcours de son FC Nantes a toujours terminé autour des 45 points, autour de la 13e place, autour de départs canon en phase aller et plus de difficulté sur la phase retour. Mais il a donné avant tout de la stabilité sportive et un peu plus d’humilité aux habituels desseins nantais. «  Je suis très heureux du boulot effectué avec mon staff depuis 4 ans, du très bon boulot, simplifiait le Zak au micro de beIN. On a su remonter le club en Ligue 1, le maintenir trois années d’affilée.  » Comme si MDZ avait réussi à chasser du 44 les fantômes de l’esthétique et du résultat obligatoires. Exit la chimère du jeu à la nantaise, le FC Nantes du Zak’ a renoué avec le public en montrant sur le terrain du caractère, du combat à défaut de jeu flamboyant, enfin un gardien de but et la modestie de ses moyens avec un groupe plutôt bonnard, à l’image des chasses au trésor organisées dans la ville par Lucas Deaux.

Coupes et finition

Le «  mandat MDZ II  » aura aussi défié cette propension nantaise au turnover élevé sur un banc qui a usé trois fois plus d’entraîneurs au XXIe siècle – à partir du licenciement de Raynald Denoueix – que sur la période 1960-2000. Mais ce n’est pas sa seule réussite. Il a renoué le contact entre les pros et la formation (Veretout, Nkoudou, Dupé, Rongier, Djidji, Dubois ou Iloki), une liaison que le suiveur nantais pensait perdue. Il a réussi aussi à faire quelque chose de Filip Djordjevic, de Yacine Bammou un international marocain, de Vizcarrondo un capitaine, à coacher les dernières minutes professionnelles de Fabrice Pancrate, à rendre ce club presque sympathique malgré un sourire très discret. Ce bilan a manqué sans doute d’un peu plus d’irrationnel d’une part, malgré un highlight en janvier 2015 contre Lyon en Coupe de France. Les parcours dans les coupes nationales ont été au mieux frustrants (une demi-finale de Coupe de la Ligue), au pire décevants. D’autre part, plus basiquement, la maison nantaise version MDZ II a toujours manqué de finition, sans véritable buteur. À ce jour, seul Troyes marque moins de buts (27) que Nantes (33) en Ligue 1. C’est mieux que la saison dernière déjà (29)… À l’heure où le Parc dira au revoir ce samedi au «  Rêvons plus grand  » version Zlatan, Nantes dira donc au revoir à une sorte de «  Rêvons plus petit  » que Der Zakarian avait fait accepter au public nantais, habituellement exigeant. Un affront de trop, sans doute, pour un Waldemar Kita plutôt impopulaire à la Beaujoire et rêvant toujours de plus grand, à l’image de son entrée courageuse dans le enlarge penis jeu, à destination des marchés asiatiques. « Les Chinois sont très demandeurs » , justifiait-il dans le JDD. Pour ce qui est du FC Nantes en tout cas, les envies présidentielles de grandeur ont désormais un nouveau nom : René Girard. Au moins la promesse d’un beau duo.

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