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  • Bilan année 2014

Les dix vrais moments forts de 2014

Par Nicolas Kssis-Martov et Arnaud Clement
10 minutes
Les dix vrais moments forts de 2014

La finale de la Coupe du monde ? C'est non. La retraite de Thierry Henry ? C'est non. Le Ballon d'or de Cricri ? C'est non. Alors quels sont les dix événements qui ont fait 2014 dans le football circus ? Une sélection forcément subjective mais indiscutable, entre larmes, records, injustice, langue espagnole et fessées retentissantes.


La Décima pour le Real Madrid

24 mai 2014
Reconnaissons à l’année 2014 un mérite : après 12 ans d’attente et le génie de ZZ contre le Leverkusen de Ramelow et Schneider, vous n’aurez plus à entendre parler de cette fameuse Décima, la dixième coupe aux grandes oreilles du Real Madrid, seul acrobate du football circus à passer ce cap ô combien symbolique. Décima, un terme qui vous a brisé les tympans, n’est-ce pas ? En tout cas nettement plus que de voir ce Real à l’œuvre cette année, superpuissance huilée capable d’en passer cinq au Bayern en deux demi-finales. Une équipe complète sublimée par un CR7 plus cyborg que jamais, chiffrant 17 buts sur l’épreuve, et façonnée par un Ancelotti entrant définitivement au panthéon du ballon rond avec sa cinquième C1. Le plus fou dans tout ça ? Que l’Atlético de Simeone, plein de générosité et de furia, ait été à deux minutes et une tête de Sergio « Zorro » Ramos de caler le plus beau doigt de l’histoire de la rivalité madrilène. De quoi vous faire passer deux camps par tous les états…

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Et Marseille découvrit Bielsa…

27 mai 2014
L’OM ne pouvait se payer des stars, alors l’OM s’est offert un savant fou. Marcelo Bielsa débarque dans la cité phocéenne, qui lui semblait promise comme Naples à Maradona, fidèle à sa réputation d’El Loco. Et il met le foot français à l’amende. Il n’a pas seulement changé la donne, il administre une petite leçon de choses permanente avec un credo oublié depuis longtemps : pour gagner, il est plus important de marquer davantage que son adversaire que de poursuivre la quête du zéro but encaissé, surtout dans un championnat avec la victoire à trois points. Assis sur une glacière aussi célèbre que la doudoune d’Arsène Wenger, adepte du travailler plus pour gagner plus et des confs de presse de haute voltige, il épuise ses joueurs qui, au fur et à mesure des résultats, se font toutefois une raison à la mode « l’an prochain en Premier League » . Il ne se heurte qu’à un seul mur, celui de l’argent, qui achète le talent quand, le temps d’un match, les crampons dorés parisiens se remirent à dérouler leur supériorité évidente en engrangeant sans douleur un Classico de plus. Pierre Ménès expliquait en début de saison que tout titre échappant désormais au PSG relèverait de l’accident industriel. Bielsa a juste transformé la L1 en ZAD.


Puyol, Zanetti et Giggs à la retraite

Fin mai 2014
Mais où sont passées ces neiges éternelles, fidèles à une seule et même montagne ? Après Paolo Maldini, Jamie Carragher ou Paul Scholes, trois autres footballeurs de génie, mariés pour toujours à la maison-mère, ont tiré leur révérence cette année, Carles Puyol, Javier Zanetti (il a percé un an à Banfield avant d’arriver en 1995 à l’Inter, ndlr) et Ryan Giggs. Des garçons ayant joué respectivement 597, 949 et 963 matchs avec leurs clubs et qui ont connu le football avec Rivaldo, Ronaldo, Cantona… Une vraie rareté que tout un chacun respecte plus que ce blaireau célébrant ses buts en embrassant l’écusson pour en faire de même avec un autre un an plus tard. Alors, on fait quoi maintenant sans ces valeurs refuges d’amour du maillot ? On apprécie les derniers coups francs faisant hurler Anfield signés Gerrard, on savoure le toucher d’un Totti ou la générosité d’un De Rossi, on regarde autant qu’on le peut Xavi à l’œuvre, on se délecte d’une intervention de Marc Planus… Et on attend des nouveaux marqueurs de loyauté. Lahm, Schweinsteiger, Iniesta ou Fletcher marchent dans leurs traces.


Espagne-Pays-Bas, la fin de la pensée unique

13 juin 2014
Si 2014 a vu l’Espagne reprendre le dessus côté clubs, elle a aussi vu sa sélection découvrir le cimetière des éléphants après six ans de balade des gens heureux. Comment a-t-on pu passer du 4-0 qui faisait peine pour l’Italie en finale de l’Euro 2012 aux cinq buts passés par les Pays-Bas en à peine quarante minutes ? Une sélection engoncée dans sa philosophie de jeu – pour ne pas dire ses stéréotypes – des individualités et un collectif à bout de souffle, des adversaires enfin parés leur faire manger leur « toque » , même avec une possession à 35%, un Van Gaal fin tacticien, un trident Sneijder – Robben – Van Persie de gala, et vous obtenez la deuxième plus belle claque de ce Mondial. Celle-là même qui allait sceller leur élimination. La cinquième fois qu’un champion en titre ne passe pas les poules après l’Italie (1950 – 2010), le Brésil (1966) et la France (2002). Cinq, c’est aussi une marque déposée au pays de la manita. Arroseur arrosé, vous dites ?

Vidéo

France-Honduras, plus de son, mais de l’image

16 juin 2014
Que diable, qu’est-ce qu’un France-Honduras viendrait foutre dans les dix moments de l’année ? Ce n’est pas tant qu’il ait été classé comme pire match du Mondial par un site américain de statistiques qui forge sa particularité, mais bel et bien l’absence d’hymnes nationaux et la première utilisation officielle de la Goal line technology. Le premier événement – ou plutôt non-événement -, attribué à une sono défaillante, est une incongruité pas vue depuis l’édition 1966, année où la Corée du Nord se qualifie pour la phase de poules. Pour boycotter le régime, la FIFA décide qu’aucun des symboles patriotiques ne sera joué, exceptions faites du match inaugural et de la finale, God Save the Queen oblige. Quant au baptême de la vidéo dans le football, bien qu’expérimentée lors de deux Coupes du monde des clubs, une Coupe des confédérations et en championnat anglais, on la doit à cette frappe de Benzema détournée dans son but, puis vite ressortie par Valladares. Tu vois, Karim, tu l’as, ta trace dans l’histoire !


Après le Maracanazo, le Mineirazo

8 juillet 2014
Et si Hubert Bonisseur de la Bath, aka Noel Flantier dans ses pérégrinations à Rio, avait eu le nez creux ? En tout cas, depuis cet été, il n’est plus le seul à douter de cette théorie selon laquelle l’Allemagne est une démocratie, tout du moins sur le plan footballistique. Il a été rejoint par des millions de Brésiliens, encore traumatisés par le blitz qui s’est abattu sur le but de Júlio César dans ce stade de Belo Horizonte qui a désormais sa triste histoire, celle du Mineirazo. L’histoire d’une sélection perdue sans ses deux héros, Neymar et Thiago Silva, et mitraillée sous les yeux de son peuple par le froid et méticuleux travail de bombardement de la Mannschaft. Reconnaissons toutefois un mérite à Fred, qui a pris pour toute la patrie ce soir-là, et sa bande : avoir accepté d’épauler les finalistes du Maracanazo de 1950, notamment leur gardien Moacir Barbosa, dans leur solitude face à la vindicte populaire au pays de la victoire.


Luzenac ou la fin du rêve français ?

Août 2014
Les contes de fées ne finissent pas toujours bien. Le petit club de Luzenac AP, logé au fin fond de son Ariège, avait gagné son billet pour la L2. Une belle aventure avec un profil à la Hoffenheim, soutenu par la gloire du cru, Fabien Barthez, prestigieux parrain… Seulement en France, le foot pro fonctionne de fait comme une quasi-ligue fermée sans oser le dire, en maintenant l’illusion de la méritocratie républicaine et sportive avec, pour assurer les basses œuvres, une DNCG qui sert d’alibi ou de gendarme, c’est selon. Après moult rebondissements durant tout l’été et de nombreux allers-retours de tribunal administratif en arbitrage du CNOSF, une belle intervention ministérielle au milieu pour assaisonner le tout d’un peu de démago, la LFP sonne la fin de la récré et le retour au pays du capitalisme en short réellement existant. Tout le monde ravale ses aigreurs, Luzenac AP repart en DHR pour 2014-2015, le RC Lens attend ses chèques azéris pendant que le PSG règle ses problèmes avec le fair-play financier. Tant pis, on n’est pas nés sous la même étoile…

La Serie A fidèle à ses traditions

5 octobre 2014
Si vous doutiez de l’intérêt de suivre la Serie A, ce match s’est avéré comme un délicieux mélange d’Ancien Testament, de tragédie grecque et d’anarcho-punk. D’un coté, une Juventus impériale et populaire, portée par une équipe de rêve. En face l’AS Roma, son légionnaire « semper fidelis » Totti et son classieux Rudi Garcia, son aura de club alternatif pour esthètes. Le résultat de ce choc : trois penaltys, deux cartons rouges pour Álvaro Morata et Kostantinos Manolas, après un début de bagarre, sept jaunes et surtout cinq buts. Un jouissif et explosif festin de foot libéré, libertaire et chaotique, grâce à un arbitrage qui explose les limites du bon goût. Sans parler d’un public qui fout le feu, dans tous les sens du terme, et des entraîneurs en roue libre (Rudi Garcia, sorti pour avoir exprimé sa passion du violon à un homme en noir fort peu mélomane). Et comme il s’agissait vraiment d’un très grand match, les politiques s’en sont évidemment mêlés, jusque dans l’hémicycle où le député du Parti démocrate, Marco Miccoli, a demandé d’enquêter sur ces « incroyables erreurs d’arbitrage » , qui pouvaient avoir des répercussions sur les deux clubs cotés en bourse, une situation « absolument inimaginable dans un autre pays du monde civilisé » . On s’ennuie vraiment en France.

Vidéo

L’Indian Super League sur les rails

12 octobre 2014
Triste mais implacable constat, le monde du ballon rond n’englobe toujours pas le sous-continent indien. Cela pose un léger problème quand on prétend au titre de sport planétaire n°1. L’Inde, à la fois puissance nucléaire, civilisation millénaire, pays-marché de 1,2 milliard d’habitants/consommateurs et grande puissante économique ascendante, peut difficilement être ignorée. Or, de leurs anciens colonisateurs britanniques, les Indiens n’ont voulu gardé que le très snob cricket, devenue une passion. Mais ils ont aussi pris conscience que pour exister mondialement, tout prétendant à la table des hautes instances internationales se doit d’avoir son football (regardez les vaines tentatives chinoises). Un enjeu non négligeable alors que la Coupe du monde revient en Asie en 2022. Vu le nombre d’Indiens qui meurent sur les chantiers qataris, il serait dommage de ne pas participer à la fête. En s’inspirant du modèle américain, une Indian Super League, ligue fermée sur deux mois, a été montée à la va-vite, avec huit franchises. Méthode éprouvée, on a aussi récupéré quelques anciennes stars telles que Del Piero, déjà passé avec son bâton de pèlerin à crampon par la case Australie, ou encore David Trezeguet. Cependant, peu de joueurs locaux qui tiennent la route, pas de pratiquants, un succès populaire indexé sur le Bollywood et les stars de la « batte » dans les tribunes, tout cela pour voir triompher un Atlético de Kolkata qui s’imagine Colchonero du cru… Le chemin reste long avant qu’Inde-Chine devienne un choc de titans.


Ebola 1 – 0 CAN 2015 au Maroc

12 novembre 2014
Ce fut l’un des scénarios catastrophe de la fin d’année. La Coupe d’Afrique des nations devait se tenir dans le royaume chérifien. L’occasion pour ce dernier, avec la Coupe du monde des clubs de la FIFA en préliminaire, de démontrer sa capacité à recevoir de grands événements. Sauf que le continent connaît une grave crise sanitaire avec l’épidémie Ebola. Le Maroc, suite « à la décision du ministère de la santé d’éviter les rassemblements auxquels prennent part des pays touchés par le virus Ebola » , demanda le report de la compétition. La Confédération africaine du football et son sourcilleux, un rien ombrageux, président Issa Hayatou refusèrent catégoriquement de tenir compte de ce principe de précaution, disproportionné selon eux. De négociations de sourds en lutte d’influence entre souveraineté des états et « super méga force » du Power Football, la CAF finit par délocaliser en Guinée équatoriale. Avec pour conséquence, et sanction, de mettre l’ensemble du foot marocain à la diète pour deux ans. Les mauvaises langues et autres rumeurs « sans fondement » prétendent que ce fut surtout la peur d’une consécration algérienne à domicile qui conduisit à cette décision. On a déjà hâte d’y être…

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