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Jean-Clair, net et précis

Par Jérémie Baron
Jean-Clair, net et précis

Débarquant chez les Bleus en remplacement de Wesley Fofana, le Niçois de 23 ans, qui s'était perdu en cours de route après une explosion très rapide, est récompensé de sa mue opérée sur la Côte d'Azur depuis deux ans.

« Jean-Clair, il est “attachiant”. On a envie de le tirer par les oreilles. C’est-à-dire que parfois, tu peux discuter pendant un quart d’heure avec lui, il est agréable, mais à un moment, tu vas lui dire : “Jean-Clair, j’en peux plus, tu m’énerves”. Il pompe de l’énergie et du temps. » En mars 2021, c’est par ces mots que Bernard Diomède décrivait Jean-Clair Todibo, passé par son académie et qu’il avait eu sous ses ordres en équipe de France U20. Et il n’était pas le seul à voir le jeune défenseur français comme un branleur à qui il faut se retenir de ne pas vouloir mettre des pichenettes : au moment où l’ancien Toulousain arrivait en prêt à l’OGC Nice en ayant a priori fait une croix sur son avenir au FC Barcelone, on pensait le train quasiment déjà passé. Deux ans plus tard, le tableau est tout autre : voilà le Guyannais installé en valeur sûre de Ligue 1 chez les Aiglons, et désormais en néo-international A chez les Bleus, depuis que Didier Deschamps l’a choisi pour remplacer au pied levé Wesley Fofana. « Il fait partie de ces joueurs qui n’ont pas des parcours linéaires, estime le sélectionneur. Il est parti jeune au Barça (en janvier 2019, NDLR), après il a été beaucoup prêté avec plus ou moins de réussite. À Nice, il a gagné en confiance. A-t-il perdu du temps ? Ça a dû lui servir pour avoir de l’expérience. »

« C’est pour moi une fierté d’y aller en tant que niçois », a quant à lui lâché l’intéressé en apprenant la nouvelle. Des mots qui traduisent une fidélité au Gym et veulent dire quelque chose, quand on se souvient qu’il était plutôt un joueur baladé de club en club chaque saison, il y a encore peu de temps (il a connu cinq équipes différentes entre les hivers 2019 et 2021, avec des passages oubliables à Schalke et Benfica).

Schalke sa croix

Arrivé au Barça à 19 ans (« C’est mon club de cœur ! Je vais là-bas en pensant pouvoir m’imposer, et surtout, c’est un rêve de jouer au Barça »), alors qu’il n’avait que 10 matchs pros dans les pattes et avait refusé un contrat pro au Téfécé, JCT n’aura porté les couleurs blaugrana que cinq fois avec l’équipe fanion, notamment parce que mettre sur le banc Gerard Piqué n’est pas à la portée du premier venu. « Il y avait une forte pression sur les épaules du coach Valverde. C’est difficile de faire jouer un jeune alors qu’il y a Piqué. Moi-même, si je suis le coach, je fais pareil », concédait celui qu’on présentait un temps comme le futur Varane. S’enchaînent ensuite les blessures, la frivolité et le Covid à Gelsenkirchen (ainsi qu’un « Baise ta grand-mère ! » adressé à Erling Haaland lors d’un derby de la Ruhr) puis le placard à Lisbonne. Bilan de ce voyage à travers l’Europe ? Dix-sept rencontres professionnelles en deux ans, et une carrière quasiment à l’arrêt. « Tomber dans le grand bain du Barça si jeune, puis essuyer des erreurs à Schalke ou à Benfica, ce sont des choses qui te refroidissent vite et te forcent à te remettre en question, rembobine-t-il aujourd’hui. Et à réfléchir sur ce qu’on veut vraiment devenir et où on veut aller. […] Le step était trop haut, trop tôt entre Toulouse et Barcelone, même si, au niveau du foot, la différence n’était pas énorme, je pense l’avoir prouvé. Mais dans la tête, le palier était énorme. »

Il doit apprendre à prendre le temps du repos pour être en pleine possession de ses moyens et ne pas passer la nuit devant les jeux vidéo.

Michael Reschke, ex-directeur technique de Schalke, en mars 2021

« C’est naze d’aller à Barcelone et de ne pas jouer, racontait-il même quelques semaines après sa signature à Nice. La présentation à Barcelone, c’est la folie, mais je n’ai joué que cinq matchs, c’est bidon en vrai.  […] À Schalke, c’est moi qui ai fait les erreurs. Un manque d’humilité, de sérieux, de professionnalisme a fait que mon prêt a été un échec personnel. C’est une grosse erreur de jeunesse. Je m’en suis excusé auprès de Michael Reschke (alors directeur technique) qui devenait fou. […] Ça m’a donné un bon coup derrière la tête. Ce prêt m’a fermé énormément de portes, j’ai commencé à réfléchir différemment. […]. Je m’en veux énormément, car j’ai manqué de respect à mon travail et à moi-même. […] On me paie pour jouer au foot et je me prenais pour je ne sais pas qui. » Le fameux Michael Reschke, alors directeur technique des Königsblauen et donc témoin des retards à l’entraînement du phénomène et de ses lapins posés aux physiothérapeutes, égratignera son ancien joueur dans nos colonnes : « Il doit apprendre à prendre le temps du repos pour être en pleine possession de ses moyens et ne pas passer la nuit devant les jeux vidéo. »

Année zéro après JC

Heureusement, la suite a enfin souri au Français. « Et puis il y a l’OGC Nice, la rencontre avec Julien Fournier, tout ce qui permet à un jeune de 20 ans de comprendre qu’il jouait son avenir, explique-t-il. Les choses ont pris une autre tournure quand j’ai compris ce que je pouvais faire et ce que j’étais en train de faire. L’écart était énorme. On va dire que l’idée générale, c’est de prendre au sérieux son travail, de me dire que c’est un vrai métier et que c’est important. Avoir le sentiment d’être un pro. »

J’avais été assez dur sur ce que je pensais de lui, par rapport au talent qu’il avait et son évolution. J’avais trouvé en face de moi un garçon extrêmement lucide sur ses manques et les erreurs qu’il avait commises.

Julien Fournier

À l’origine de sa venue, Fournier – directeur du football au Gym à l’époque – se souvient très bien des conditions de l’arrivée du défenseur : « Dans les discussions préalables à sa venue, j’avais été assez dur sur ce que je pensais de lui, par rapport au talent qu’il avait et son évolution. J’avais trouvé en face de moi un garçon extrêmement lucide sur ses manques et les erreurs qu’il avait commises. Ce qui m’avait scotché tout de suite, parce qu’on a une certaine image de lui, c’est cette extrême maturité. Il y avait une vraie prise de conscience. Je lui avais dit qu’on allait lui donner sa chance et qu’on serait derrière lui tout le temps. Quand il est arrivé chez nous, il s’est de temps en temps éparpillé, il fallait le remettre dans le droit chemin. Il a toujours écouté et corrigé ses erreurs, cherché à s’améliorer. C’est un garçon, et les gens ne le savent pas trop, d’une extrême intelligence et sensibilité. C’est une éponge. Il a compris qu’il était au bord du précipice. Il n’avait pas beaucoup de clubs après lui. En arrivant à Barcelone, inconsciemment, il s’était peut-être dit que le football c’était facile. Il a fallu redescendre d’un étage, voire de deux. Il a beaucoup, beaucoup travaillé. »

Sur la Côte d’Azur, Todibo a trouvé tout ce qui lui avait jusqu’ici manqué : une stabilité, une régularité assez bluffante, et un club où exprimer ses qualités de défenseur moderne. « On cherchait des vrais défenseurs à l’aise avec le ballon : JC, il est là-dedans. La difficulté, c’est qu’il était en prêt avec option d’achat, et il a fallu que je l’impose à l’entraîneur de l’époque (Christophe Galtier) qui ne le voulait pas, continue Fournier. J’ai dit à Christophe : “C’est un joueur qui a un potentiel incroyable, et tu vas lui faire du bien en lui apprenant à être encore plus rigoureux défensivement.” Mais l’option a été levée très tardivement. » Il y a, dans cette métamorphose, l’importance d’un Didier Digard, d’abord adjoint sur le banc niçois depuis novembre, puis numéro 1 à partir de janvier. « On a tout de suite créé des liens très forts, et il a toujours été très à l’écoute, raconte l’entraîneur de 36 ans. J’avais ressenti qu’il en avait besoin et envie. Il voulait faire tomber l’image qui était collée à lui, à juste titre comme il l’a dit. Il est plus ouvert, plus épanoui, et un joueur content, c’est un joueur performant. »

À l’Allianz Riviera, il forme aussi, depuis l’exercice 2021-2022, une redoutable paire avec Dante, de 16 ans son aîné. Et il n’y a qu’à voir les deux échanger devant les caméras de Prime Video pour comprendre le lien qui les unit. « Je le vois comme un professeur, il a une vision du jeu tellement poussée, il a tout vécu, il a gagné une C1 », raconte le jeunot au sujet du Brésilien. « Dante maintient un niveau de performance élevé, et il est dans la transmission, appuie Fournier. JC a compris qu’il était là pour l’aider et le faire progresser. Apprendre à côté de Dante, c’est une chance inouïe. C’est facile de jouer à côté de Dante, comme c’est facile de jouer à côté de Todibo. » À la différence que l’ancien de Wolfsburg et du Bayern avait dû attendre ses 29 ans avant d’être appelé à représenter son pays.

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Dans cet article :
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Par Jérémie Baron

Propos de Julien Fournier recueillis par JB, ceux de Didier Digard et Jean-Clair Todibo via L'Équipe et Onze Mondial, ceux de Bernard Diomède et Michael Reschke tirés du portrait de Todibo dans le So Foot #184 (mars 2021)

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