- CAN 2025
- Gr. A
- Maroc-Comores (2-0)
Maroc, l’élan de l’Atlas
Pour le premier match de CAN sur son territoire depuis 37 ans, le Maroc a pu communier à l’occasion de sa victoire contre les Comores (2-0), à Rabat.
« La plus belle Coupe d’Afrique de l’histoire. » On l’entend souvent de la bouche des Marocains, mais cette fois, c’est Gianni Infantino, du haut de son perchoir, qui en fait la promesse. Le temps de quelques instants, le président de la FIFA s’offre une apparition christique, devant le public du stade Moulay-Abdellah, pour cirer quelques pompes et se faire mousser par la même occasion sous la pluie de Rabat, avant que le discours de son homologue de la CAF, Patrice Motsepe, ne soit rapidement couvert par les chants soutenus des tribunes. Juste l’interlude d’une rutilante cérémonie d’ouverture – au cœur d’un écrin flambant neuf, trônant fièrement tout au bout de l’interminable avenue Hassan-II, et qui peut changer de robe à l’infini lorsque la lumière du jour s’estompe –, pour une compétition qui l’est tout autant : si le Maroc s’est offert l’organisation de cette CAN, 37 ans après la dernière – celle de 2014, prévue dans le pays, avait finalement eu lieu en Guinée équatoriale après un drôle de jeu entre les fédérations marocaine et africaine –, c’est pour en mettre plein la vue. Et se faire kiffer.
« La Côte d’Ivoire, c’était pas mal, mais on va monter en puissance. Tout le monde va découvrir la ferveur des supporters marocains, c’est incomparable », annonçait avant la rencontre un supporter local, qui espère évidemment, comme en 2024, voir le pays hôte triompher. Cinquante ans sans sacre dans la compétition, ça pèse et cela donne sans doute encore un peu plus de souffle aux fans lorsque survient l’hymne national, d’abord, puis que le prince héritier Moulay El Hassan descend pour envoyer un timide plat du pied en guise de coup d’envoi, ensuite. Le déluge et la lenteur des protocoles n’auront pas raison de la ferveur qui habite ce peuple – énormément de familles, colorées de la tête aux pieds, mais aussi, par ailleurs, quelques supporters vêtus d’un drapeau de la Palestine – en ce 21 décembre.
37 ans et 6 heures d’attente
Pour le moment, il n’y a pourtant que dans les infrastructures que le Maroc est champion d’Afrique, avec les millions voire milliards dépensés – principalement – dans la construction et la rénovation de ses stades, en vue de cette CAN, mais aussi du Mondial 2030 partagé avec l’Espagne et le Portugal – une enceinte de 115 000 places doit encore voir le jour à Casablanca, d’ici-là. Une fierté pour les uns, heureux de voir le pays faire avancer le développement du football africain, mais une ignominie pour beaucoup d’autres, qui sont sortis dans les rues ces derniers mois pour condamner ces dépenses records, à l’heure où hôpitaux et écoles sont laissés à l’abandon, et où le chômage bat son plein (voir notre reportage à Casablanca, en novembre, dans le So Foot n°231).
Côté terrain, le football marocain a vécu dans ses différentes catégories une bien belle année 2025, qu’il serait bon de prolonger : une sélection U20 finaliste de la CAN et vainqueur du Mondial, et une équipe A’ titrée en Coupe arabe il y a quelques jours seulement. Yassine Bounou, Achraf Hakimi, Nayef Aguerd, Azzedine Ounahi – l’ancien Marseillais, qui régale aujourd’hui les yeux à Girona, est le chouchou local –, Romain Saïss, Ismael Saibari et tous les autres, dont les ganaches décorent les boulevards du pays et même les paquets de fusilli en supermarché, sont maintenant en mission, surtout après la sortie en huitièmes il y a deux ans. « Nous venons pour le trophée, et nous travaillons très dur pour », dira évidemment Anass Salah-Eddine, plus tard, dans le bourdonnement de la zone mixte.

Cette soirée, c’est aussi la resplendissance d’un concert de Coldplay lorsque les bracelets lumineux offerts aux 60 000 supporters se mettent à cligner, ou les décibels d’un show d’AC/DC quand la sono sature pour accompagner les cris après un plat du pied de Brahim Díaz mettant enfin le Maroc devant. Ouf : l’assistance commençait à s’impatienter, après le penalty gâché par le numéro 9, Soufiane Rahimi, avant la pause. Tout cela sera oublié – et plié – avec le bijou du remplaçant Ayoub El Kaabi, déjà prétendant au plus beau pion du tournoi. Beau mais débridé, et évidemment palpitant : tous les ingrédients de ce à quoi la CAN du Maroc doit ressembler sont déjà dans ce match.
« Nous sommes heureux d’avoir donné une victoire à nos supporters, ils étaient déjà là à attendre six heures avant le coup d’envoi », soulignera Sofyan Amrabat. Reste désormais aux 20 autres nations à entrer en piste. Avec un souhait émis par ce supporter camerounais, croisé samedi, à Casablanca : « Beaucoup d’unité, parce qu’on en a besoin en ce moment, en Afrique et dans le monde. Pas de division entre les pays du Maghreb et les pays de l’Afrique (subsaharienne). Parce qu’on est tous africains. »
Fin de CAN pour Romain SaïssPar Jérémie Baron, au stade Moulay-Abdellah























