Tu as toujours eu une relation particulière avec Gary Neville. Parle-nous un peu de vos confrontations.
C’était à une époque où il y avait une grosse rivalité entre Manchester United et Arsenal, les matchs étaient toujours tendus. En ce qui concerne nos duels, vu qu’on jouait dans la même zone, il essayait de prendre l’ascendant sur moi. Son truc, c’était d’instaurer un jeu d’intimidation entre nous, un peu comme les boxeurs. Donc bon, c’était des insultes, des regards, il me marchait sur les pieds, des trucs qui font partie du jeu, en fait. Et au début, je ne vais pas raconter d’histoires, il gagnait à ce petit jeu-là (rires). Les premiers matchs que j’ai disputés contre lui, ce n’était pas évident pour moi. Je n’étais pas habitué à ça, mais je m’y suis fais petit à petit.
Il a instauré très tôt cette rivalité entre vous, finalement ?
Dès les premiers matchs, ouais. D’entrée, on peut dire qu’il ne m’a pas fait de cadeau. Je crois même me souvenir qu’il m’avait glissé un « Welcome in England » après m’avoir mis un coup lors de mon premier match contre lui. Pour lui, c’était normal, ça faisait partie de son jeu, de ce qu’on lui avait appris en Angleterre. Au final, ça a été à moi de m’adapter et d’arriver à faire la différence avec mes qualités.
Il y avait une vraie haine entre vous, ou était-ce seulement dans le jeu ?
Non, je ne dirais pas qu’il y avait de la haine, c’était plus dans l’esprit de la rivalité entre nos deux clubs à l’époque. Il savait qu’on allait être en duel à chaque match, donc il jouait le truc à la dure, à la provocation, pour me faire disjoncter. Et justement, les gars de mon équipe m’avaient dit de ne pas entrer là-dedans, et de me contenter de faire ce que je savais faire, juste jouer mon jeu, quoi.
Il y avait beaucoup de coups, forcément ?
Oui, bien sûr. Des vrais duels à l’anglaise, en fait. Des coups quand l’arbitre ne voit pas, des insultes tout le match. En même temps, c’est l’esprit anglais. Sur le terrain, on ne fait pas de cadeau.
Combien de temps tu as mis pour t’adapter à ça ?
Honnêtement, je ne me rappelle pas, mais je pense que sur les trois-quatre premiers matchs face à United, je n’étais pas trop à l’aise. Après, je suis arrivé à passer outre et j’ai misé sur mes qualités : la vitesse et les dribbles. C’était la seule chose à faire pour le déstabiliser, car il ne fallait absolument pas tomber dans son jeu. Mais je peux te dire que plusieurs fois, j’ai pris de sévères taquets.
Tout le monde connaît la célèbre embrouille entre Vieira et Keane dans le tunnel d’Highbury, ce que les gens savent moins, c’est qu’elle vient de la rivalité entre toi et Neville, en fait ?
Ouais, c’est ça. Pat est allé le voir dans le couloir car il savait que c’était chaud entre nous, et il lui a fait comprendre que cette fois, on était chez nous et qu’il n’avait pas intérêt à mettre des taquets à tout le monde. Très vite, le ton est monté. Là, il y a Roy Keane qui est arrivé. Du coup, les deux se sont embrouillés, je me rappelle qu’ils se sont donné rendez-vous sur le terrain, c’était ultra chaud. Mais voilà, c’est l’Angleterre, ça fait partie du charme.
Et pendant les protocoles d’avant-match, vous aviez l’habitude de vous serrer la main de façon normale, ou c’était déjà tendu ?
Non, avant le match il n’y avait pas de soucis en règle générale. En revanche, une fois sur le terrain, le mec changeait totalement d’attitude. Il fallait juste que j’arrive à rester concentré, même si parfois ce n’était pas évident.
Et sinon, au niveau sportif, était-il vraiment fort ?
Ouais, c’était un bon défenseur. Il remplissait parfaitement sa mission. Il arrivait toujours à bloquer l’ailier gauche, à l’emmerder un maximum. Et puis, de temps à temps, il était aussi capable d’amener un plus offensivement. Personnellement, je pense que c’était un bon défenseur, dans l’ensemble.
Pas le genre de mec facile à passer ?
Non, loin de là. Déjà, il était méchant et il était très fort sur l’aspect psychologique. Dès le départ, tu savais que ça allait être compliqué face à lui. Je me rappelle qu’au début, j’étais inexistant, dès que j’avais la balle, je la donnais, je ne prenais aucun risque. C’était sa manière de gagner les matchs, faire peur pour faire déjouer l’adversaire. Il n’y allait pas forcément pour faire mal, c’était surtout de l’intimidation.
Tu peux dire qu’il restera comme ton meilleur ennemi, finalement ?
Ah bah franchement, sur toutes mes années en Angleterre, oui, c’est clairement mon meilleur ennemi. À chaque fois que je jouais contre lui, je savais que ça allait être super chaud. Il y a eu un paquet d’embrouilles entre nous, ça c’est certain. Et puis, bon, je ne vais pas dire toutes les insultes qu’on s’est échangées…(rires)
Et ça restait sur le terrain ou parfois ça se terminait dans le couloir, après le match ?
Ah ça durait souvent jusque dans le tunnel. Que ce soit à Highbury ou à Old Trafford, les fins de match étaient toujours tendues, même après le coup de sifflet de final. Il est arrivé qu’il m’attende dans le tunnel pour me dire quelques amabilités, mais ça restait toujours au niveau des insultes, on n’en est jamais venu aux mains. C’est toujours resté verbal.
Tu étais dégoûté quand il n’était pas là ?
T’es fou, j’étais super content ! Je ne sais pas si c’est arrivé souvent, mais quand c’est arrivé, je savais que j’allais passer une bonne soirée. Il faut bien avoir conscience que parfois il était vachement pénible, se faire insulter tout un match, c’est chiant. Il n’arrêtait jamais, hein.
Tu te rappelles la première fois où tu l’as recroisé hors terrain ?
Je ne me rappelle plus à quelle occasion c’était, mais ça devait être à Londres. On s’est parlé normal, sans problème. Je lui avais dit « merci pour les coups, hein » . Et il m’avait répondu que c’était son jeu, que c’était comme ça. Mais ça s’est très bien passé. Quand je le revois aujourd’hui, on se serre la main, on discute. Nos duels, c’est du passé. Je sais qu’il m’a emmerdé, moi aussi je l’ai fait chier, mais il n’y a aucun souci. L’autre jour, j’ai croisé son frère, on a discuté deux minutes, et à la fin, je lui ai dit de saluer son frère de ma part, ce à quoi il a répondu que Gary me saluait également.
Tu lui souhaites donc un bon anniversaire, aujourd’hui ?
Ah bah oui, sans problème. Je ne pense pas être invité à la fête (rires), mais je lui souhaite évidemment un joyeux anniversaire. Je peux même dire qu’aujourd’hui, c’est l’un des meilleurs consultants foot en Angleterre. Et je pense que c’est un type qui a le potentiel pour être le prochain sélectionneur de la sélection anglaise. Il a du caractère en tout cas, sur comme en dehors du terrain.
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