- Français de l'Etranger
«Je vis dans une famille d’accueil»
A Histon, dernier de la cinquième et dernière division pro anglaise, la vie spartiate de Rémy Clerima, 20 ans.
Par quel biais es-tu arrivé chez les inconnus de Histon ?
Un mec dans mon équipe de Blanc-Mesnil connaissait un agent. Il lui a parlé d’une journée de détection vers Alfortville ou Créteil, je ne sais plus. La recommandation d’un agent était nécessaire pour participer. J’y suis allé quand même. Ma catégorie d’âge a joué en fin de journée. A la mi-temps, un agent m’a demandé mon numéro. Une semaine plus tard, il m’a appelé pour savoir si je voulais jouer en Angleterre. Il parlait anglais et français, j’ai dit OK.
Et donc, faux plan ou véritable opportunité ?
Je me suis rendu compte que l’agent en question n’en voulait qu’à l’argent. Ce n’est pas quelqu’un de bien. D’ailleurs, il me réclame une indemnité pour résilier notre contrat. Bon, j’ai trouvé une personne pour régler cette histoire, a priori ça ne me coûtera rien.
Est-ce que tu domines ton sujet en Cinquième division ?
Je me débrouille pas mal, ça va. Notre stade n’est pas trop mal par rapport à ceux d’autres clubs. Il y a 4.000 places mais je ne l’ai jamais vu plein. Face à Cambridge, notre voisin, il y avait 2.000 personnes. En début de saison, le terrain était nickel mais ça se gâte car l’entretien n’est pas la priorité des dirigeants. Le club avait beaucoup de dettes et les dirigeants ont utilisé leur peu d’argent pour les éponger.
La technique ne doit pas être essentielle ?
Ici, tu oublies la tactique et la qualité technique. C’est le physique qui compte ! Ça dégage en l’air, c’est rentre dedans. Je n’étais pas habitué à ça en arrivant de France. Au début, les adversaires me poussaient mais l’arbitre ne sifflait pas alors je poussais aussi mais ce coup-là, il y avait faute (rires). Il faut s’y habituer. Au dernier match, j’ai pris une béquille à la cuisse, j’ai eu du mal à me relever. J’étais même incapable de marcher. Mais j’ai fini le match parce qu’il n’y avait pas d’autre défenseur compétent dans l’équipe !
Déjà cinq buts pour toi.
(Rires) Je leur rapporte des points. Il y a un latéral irlandais avec qui je m’entends bien dans l’équipe, tout le monde l’écoute. Il a dit qu’on avait fait que défendre toute la saison parce que nos attaquants ne tirent pas. On prend au moins un but par match donc j’essaie d’apporter quelque chose offensivement. Mais le club est presque assuré de descendre en Conference (Histon a 27 points et 16 de retard sur le premier non-relégable).
Il paraît que ce n’est pas le grand amour avec ton capitaine ?
Disons que le capitaine et le vice-capitaine ont la grosse tête et restent entre eux alors qu’ils sont peu performants. On communique peu. A mon arrivée, ils me criaient dessus sans raison. Un jour contre Luton, j’en ai eu marre et j’ai répondu. Imagine un peu : ils me sont tombés dessus à cause d’une erreur défensive sur… le cinquième but adverse ! Il n’y avait rien à dire sur les buts précédents ? Maintenant, ils sont plus calmes avec moi.
La vie est agréable pour un footballeur à ce niveau ?
Histon est l’un des clubs qui distribue les plus petits salaires à l’inverse de Luton ou Crawley. Je touche 800 livres par mois, c’est dans la moyenne haute. Ma famille compte sur moi. J’envoie de l’argent à ma mère vu que je n’ai pas de grosses dépenses. Et comme le club n’a pas les moyens de me payer un logement, je vis dans une famille d’accueil où ça se passe très bien. J’ai ma chambre mais à mon âge, je préfèrerais avoir mon propre appart. Heureusement qu’ils sont cool, ils me laissent sortir quand je veux. C’est même eux qui me forcent à sortir ! Le seul truc, c’est que je les préviens quand je suis ne suis pas à la maison.
Parle-nous de Histon, la ville.
Il n’y a pas grand-chose à faire mais Cambridge est toute proche, c’est une ville étudiante vraiment animée. Entre les pubs et les soirées, tu peux très bien sortir tous les soirs.
Quel était ton parcours avant de signer à Histon ?
Blanc-Mesnil (Seine-Saint-Denis) est mon club de toujours. J’ai aussi fait un essai à Rennes et j’ai raté l’occasion d’en faire un autre à l’Inter Milan vu que mon club a fini par envoyer un autre joueur soi-disant parce que je n’étais pas trop en forme cette semaine-là. J’ai eu la haine contre mon club. J’ai voulu me tirer à Noisy-le-Sec mais il y a eu un malentendu avec le coach donc je suis retourné à Blanc-Mesnil. Lorient avait entendu parler de moi. J’y ai fait un essai, ça s’est bien passé, ils m’ont rappelé deux mois plus tard. J’ai passé un an dans le groupe de Cfa2.
Tu as des perspectives d’avenir ?
Un joueur de notre division est parti directement dans un club de Championship. Notre équipe étant assez jeune, les clubs de la région comme Ipswich et Norwich nous observent. Il y a moyen de partir, mon nom a déjà circulé. Je ne compte pas rester à ce niveau après avoir fait mes preuves cette année. Les gens me disent que je suis encore jeune et que les défenseurs sont plus expérimentés. Mais je suis sûr que je peux jouer en League One.
Mickaël Osganian
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