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Quelle place pour les femmes dans les célébrations après les matchs de foot ?

Par Ulysse Llamas
5 minutes

La folle soirée du 31 mai l’a montré : lors des fêtes du foot, l’espace public est monopolisé par les garçons, souvent violents et tapageurs. Si de nombreuses réactions se sont fait entendre, il est temps de permettre aux femmes de participer à la fête en toute sécurité.

Quelle place pour les femmes dans les célébrations ?

« J’étais au bar avec des amis, et évidemment, il y avait plein d’hommes. J’ai eu l’impression de voir une auto-escalade. Ils n’arrêtaient pas de se filmer entre eux. C’était la course à celui qui en ferait le plus, à celui qui ferait le plus preuve de virilité. » Capucine Ottino n’a pas fêté la victoire du PSG, le soir du 31, mais après le sacre en Ligue des champions. Elle était à Nice, et comme beaucoup en France, elle a vu la force plutôt que l’étreinte, la baston plutôt que la joie, et la toute-puissance masculine. « Voir tous ces hommes marcher ensemble, être violents, agressifs, ça m’a fait monter une angoisse… »

La victoire du PSG en C1 s’est transformée en défouloir de violence. Clémence a vécu la même scène à Paris, à côté de Châtelet : « Dès la fin du match, des gens commencent à courir dans tous les sens. Puis forcément, des mecs m’ont regardée. J’ai donc décidé de rentrer. » Le Parisien a relaté des violences sexistes. De nombreuses publications sur les réseaux sociaux ont témoigné des galères. Libération s’est emparé du sujet. L’éléphant dans la pièce : l’homme.

Espace à moitié public

Les mâles ont investi l’espace public, les femmes y ont renoncé. La fête sent l’urine, et fait hurler les klaxons et les sifflements. « Dans ces soirées, si on ne prend que la question de l’âge, du milieu social, ou qu’on dit que ces violences sont inévitables, on ne changera pas les comportements, avance Lucile Peytavin, historienne et autrice du Coût de la virilité. Ce que la France économiserait si les hommes se comportaient comme les femmes. On voit que le premier facteur qui définit le profil des auteurs de violences, c’est le sexe masculin. On retrouve ce gouffre statistique partout : au tribunal, en prison… »

@lunaindaclub

Je suis encore choqué de ce qu’il s’est passé, ça me dégoûte tellement du foot. #paris #liguedeschampion #psg #paris #feministe #girlssupportgirls #men #allmen

♬ son original – lily-rose

Zoé Espitallier a fondé le média féministe Bonne à marier. Elle commente : « Lors de ces soirées, on voit des hommes qui se valident entre eux. Ils se proclament maîtres de la rue. Même quand l’émotion est positive, on en vient à la violence. C’est triste. On n’a pas appris aux hommes à exprimer leurs émotions autrement que par la violence. » Comment l’expliquer ? Certainement pas par la testostérone. « Aucune étude ne montre que c’est biologique, relate Lucile Peytavin. Au contraire même, certains articles scientifiques montrent que chez un individu, la testostérone peut être aussi bien liée à des comportements altruistes qu’à des comportements agressifs. Ça doit commencer très tôt. On sait par exemple que les parents ne projettent pas les mêmes attentes sur leur futur enfant. » Les hommes ne sont donc pas prédéterminés, mais acculturés à la violence.

Ce ne sont pas tous les hommes, mais toutes les femmes ont peur. La violence et l’impunité masculines dans l’espace public doivent être questionnées.

Zoé Espitallier, fondatrice du média Bonne à marier

« Le foot, comme tous les autres sujets, ne crée pas de la violence par lui-même : quand les femmes supportent des équipes, elles ne sont pas violentes, analyse-t-elle. Mais le foot, par le fait de battre l’adversaire, par la compétition, la domination, est un des maillons d’une longue chaîne qui véhicule des valeurs viriles aux hommes. » Une étude anglaise avait montré que les violences conjugales augmentaient de 25% les soirs de match. Mais le constat dépasse le ballon. Zoé Espitallier, militante et créatrice de contenus féministes, poursuit : « Puisque le foot rassemble et est populaire, on s’est saisi de cette question après la finale, mais la soirée de la finale n’est pas une exception. Les femmes se sentent en insécurité à cause des hommes tous les jours. Ce ne sont pas tous les hommes, mais toutes les femmes ont peur. La violence et l’impunité masculines dans l’espace public doivent être questionnées. » La soirée du 31 a donc mis en lumière le quotidien des femmes : sorties en groupes, stratégies d’évitement, autorestriction…

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Quelles réponses à apporter ?

Dans son ouvrage, Lucile Peytavin a chiffré les conséquences de la surreprésentation des hommes dans la délinquance et la criminalité à 95,2 milliards d’euros. « Si des femmes avaient eu ces comportements-là, qu’est-ce qu’on aurait dit ? On accepte ce robinet de violence parce que ce sont des comportements masculins, et parce que c’est du foot. Il ne faut pas que le foot devienne une excuse à la violence. On peut mettre en avant l’idée qu’il est un dépassement de nous-mêmes, pas d’écrasement des autres. » 

On doit travailler autour de la construction de la virilité, de la masculinité, de l’acceptation de l’autre, agir en prévention, réfléchir à ce qui est fait dans les fédérations sportives.

Lucile Peytavin, historienne et autrice du Coût de la virilité

Quelles autres réponses que le dispositif policier, une réponse « à la force par la force », peuvent être apportées ? À court terme, la mise en place de safe zones ou d’espaces de fête intégralement féminins peuvent être envisagés. « Peut-être que cela enverrait un signal aux hommes : on a besoin d’être séparés pour que chacun puisse profiter du moment comme il ou elle le souhaite », projette Capucine.

« Des applications existent : The Sorority, Umay, App Elles. Des programmes existent, énonce Zoé Espitallier, la créatrice de contenus. Ou des programmes d’action très concrets, comme Stand Up. Il faut penser aux cinq verbes d’action : distraire, déléguer, documenter, diriger et dialoguer. Dans les festivals de musique, il y a aussi des “référents VSS”. De manière générale, plutôt que de déployer 50 000 hommes armés, ce serait bien qu’on mette de l’argent dans les associations. » À plus long terme, des politiques d’éducation féministes doivent être mises en place. Lucile Peytavin conclut : « On doit travailler autour de la construction de la virilité, de la masculinité, de l’acceptation de l’autre, agir en prévention, réfléchir à ce qui est fait dans les fédérations sportives. Il faut éduquer les hommes avec empathie. Ce n’est pas aux femmes de changer leurs comportements. » Comportement ? Bah ouais.

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