- C1
- Finale
- PSG-Inter (5-0)
PSG : un triomphe mais certainement pas un exploit
La victoire contre l’Inter est belle, et son premier sacre en Ligue des champions tout autant, mais s’agit-il véritablement d’un exploit ? Sans bouder le plaisir, ce trophée reflète avant tout la sanction du statut – économique et sportif – du club parisien sur le Vieux Continent.

« On a beaucoup travaillé pour ça… Quatorze années. Honnêtement, ça n’a pas été facile du tout pour en arriver là. » Nasser al-Khelaïfi, président du Paris Saint-Germain, n’a pas le triomphe modeste. En zone mixte, il s’est même permis de régler ses comptes avec la presse : « Tout le temps, vous tapez sur nous. Maintenant, on a gagné la Ligue des champions. » Le président de la République, Emmanuel Macron, a entonné le même refrain au moment de recevoir les héros de Munich à l’Élysée : « Peu vous imaginaient là. » L’histoire est belle, donc. Le PSG, seul contre tous et toutes : contre les méchants journalistes, contre l’arbitrage, contre la malédiction de la remontada, contre les vents contraires, contre les poteaux à Dortmund…
Sauf qu’à force de volonté et d’acharnement, le club de la capitale a réussi l’exploit de remporter la C1 au bout d’une année miraculeuse. « Une délivrance, plus qu’une fierté : un moment de gloire », selon le capitaine Marquinhos. Cependant, l’ivresse qui s’est emparée de la capitale et des plateaux télévisés amène quelque peu à oublier à quel point ce succès est finalement logique. Logique au regard des investissements de QSI (plus d’un milliard et demi), et au regard du temps qui passe. Luis Enrique a su, en revanche, y mettre la manière. La victoire était normale, elle est devenue méritée et incontestable grâce à l’Espagnol.
Dans les mémoires, quoiqu’un peu courtes
Certes, ce sentiment que l’épopée du PSG a commencé l’an dernier avec l’équipe actuelle (façonnée sous la houlette de son entraîneur hispanique, et débarrassée de Kylian Mbappé) colle parfaitement à l’atmosphère qui régnait ce samedi dans les rues de Paname. Parmi les supporters agglutinés sur les terrasses d’un Paris suffoquant sous un orage qui ne voulait pas éclater, peu se souvenaient sans doute du retournement de tendance contre City ou de la séance de tirs au but face à Liverpool. Le temps était clément, tout le monde voulait passer une bonne soirée en dissertant autour d’un spritz du conte de fées d’une équipe « sans stars » et « jeune » qui décroche la lune avec une coupe aux grandes oreilles. Mais le PSG n’est pas né avec QSI, même si QSI règne depuis bientôt quinze ans.
À force de se moquer – parfois à raison – et de critiquer – souvent justement –, on oublie ce que représentait déjà le PSG de l’ère qatarie : quatre quarts de finale, deux demi-finales et deux finales. Le PSG était un « gros club » (troisième budget en Europe, comme l’Olympique de Marseille en 1993), auquel il ne manquait qu’une étoile pour devenir « grand ». La vraie question qui doit se poser est donc la suivante : pourquoi cela a-t-il mis si longtemps ? Après un milliard et demi d’euros dépensés pour d’immenses joueurs débauchés ou des entraîneurs compétents essorés, l’attente fut longue. L’an dernier encore, le PSG possédait la plus grosse masse salariale d’Europe. En janvier, Khvicha Kvaratskhelia a été transféré de Naples pour 70 millions. Quelques mois plus tôt, Désiré Doué était arrivé pour 50 millions de Rennes et Bradley Barcola pour un montant similaire de Lyon… Le PSG avait de bons, parfois de très bons joueurs, ils sont désormais grands. Cette coupe a juste coûté un peu moins cher cette saison qu’elle ne l’aurait été les saisons précédentes.
Du passé faisons table rase
Tout le négatif a toutefois été renvoyé dans les oubliettes de l’histoire : les mauvais choix, les achats délirants, le culte du nom ronflant, les échecs surréalistes contre Manchester United ou Dortmund, le match raté contre le Bayern Munich, la remontada… La première C1 du PSG est sans conteste méritée, et il s’agit ni plus ni moins d’un train qui arrive en gare… avec du retard. Changement d’époque, déjà. Dès dimanche, un autre narratif se met en place.
« C’était très important pour Paris, pour la France. On ne parle pas que du PSG, mais de la France. On a le drapeau français sur notre maillot, on est fiers de ça », dixit Nasser, reçu à l’Élysée (plutôt qu’à l’hôtel de ville). « Vive le PSG, vive la République, vive la France », a conclu, avec diligence, Emmanuel Macron. En réalité, il s’agit simplement d’une belle saison et d’une belle équipe d’un club très riche. Ce qui, au demeurant, n’est déjà pas mal.
L’inspiration décisive de Gianluigi Donnarumma avant la finale de Ligue des championsPar Nicolas Kssis-Martov