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Giorgia Meloni souffle le calcio et le froid

Par Tristan Pubert
Giorgia Meloni souffle le calcio et le froid

Alors que se tenaient en Italie les élections législatives ce dimanche, c’est bien Fratelli d'Italia, le parti d’extrême droite mené par Giorgia Meloni, qui est sorti en tête des suffrages avec pas moins de 26% des voix. L'ambitieuse Romaine de 45 ans, qui a comme grandes phobies « l’islamisation de l’Europe » ainsi que les « lobbys LGBT », a déjà également utilisé le football pour se faire une place médiatique.

« Je suis Giorgia, je suis une femme, je suis une mère, je suis italienne, je suis chrétienne, personne ne me l’enlèvera. » Ce samedi 19 octobre 2019 entrera dans l’histoire de l’Italie. À Rome, en ce début de week-end d’automne, ce n’est pas la rimonta de la Lazio face à l’Atalanta – arrachant le nul 3-3 après avoir été menée 3-0 au Stadio Olimpico – qui marquera les esprits, mais bien le discours de Giorgia Meloni, leader du groupe d’extrême droite Fratelli d’Italia. Une allocution pleine de détermination de la politicienne qui, ce jour-là, va énormément gagner en popularité dans toute la Botte. Trois années ont passé, et celle qui place « Dieu, famille et partie » au-dessus de tout s’apprête à s’installer tranquillement à la présidence du Conseil italien. Des élections qui ont aussi permis à deux personnages singuliers du football italien, Claudio Lotito (Lazio) et Silvio Berlusconi, respectivement présidents des clubs de la Lazio et de Monza, de devenir sénateurs. Et forcément, dans cette histoire, le ballon rond n’est jamais très loin ?

Lazio ou Roma : il s’agirait de choisir

Alors que le visage de Giorgia Meloni est devenu omniprésent dans le paysage médiatique transalpin, une question revient de manière récurrente sur les lèvres des Italiens : quelle équipe de football supporte-t-elle ? Le quotidien La Repubblica en a même fait l’objet d’une enquête, parvenant à retomber sur certains de ses anciens blogs, datant des années 1990 et début 2000. Sous le pseudonyme Khy-ri, elle revendique son amour pour la Lazio, l’exprimant avec des majuscules : « SEMPRE FORZA LAZIO ». Comme n’importe quelle supportrice du plus vieux club de la capitale, en somme, et qui n’hésite pas à piquer l’ennemi héréditaire. Lorsqu’un blogueur lambda au nom de Mauri explique que « parmi les équipes italiennes engagées dans les compétitions européennes, seule la Roma peut perdre et n’est pas au niveau », la jeune Giorgia acquiesce : « Je suis absolument d’accord avec vous, à tous les niveaux. Seule la Roma peut perdre tout ce qu’elle a à perdre. » L’ami Maury répondra alors à ce message : « Si tu n’étais pas de la Lazio, je t’aimerais bien. »

Que je sois fan de la Roma est connu de tous et évidemment ma foi footballistique ne me permet pas de porter un maillot de la Lazio. Cela signifie que par solidarité, je donnerai ce maillot de la Lazio à ma mère, supportrice du club.

Giorgia Meloni serait donc plus Paolo Di Canio que Francesco Totti ? Au vu de la proximité des opinions prêtées aux supporters laziali et celles qu’elle défend aujourd’hui sur la scène politique, cela se tient, mais ce n’est pas aussi simple qu’il y paraît. Avec l’âge, Meloni délaisse ses blogs miteux et laisse entendre que son cœur penche alors pour l’autre club romain. Un comportement de footix ? Peu importe, désormais, elle ne jure que pour le triple champion d’Italie. En 2015, au travers d’un post Facebook, la protégée de Berlusconi réagit à un article du journal Le Monde sur le maillot de la Lazio qui fait écho (directement ou indirectement, à vous de choisir) au IIIe Reich allemand : « Que je sois fan de la Roma est connu de tous et évidemment ma foi footballistique ne me permet pas de porter un maillot de la Lazio. Cela signifie que par solidarité, je donnerai ce maillot de la Lazio à ma mère, supportrice du club. » Pour cette nostalgique de l’Italie fasciste et mussolinienne, aucun mot sur la référence au Reich, évidemment.

Autre fait d’armes, quatre ans plus tôt, alors qu’elle est ministre de la Jeunesse italienne, Giorgia Meloni doit décerner la Coupe d’Italie à l’équipe de foot à cinq de la Lazio. Lors de la remise du trophée, elle lâche aux joueurs laziali : « Vous êtes la seule Lazio que je peux soutenir. » Enfin, en 2017, un certain Francesco Totti décide de tirer sa révérence. La native de Rome en profite pour remercier le monument romain et lui transmettre subtilement une invitation : « Francesco, merci pour ce que tu as fait pour nous durant toutes ces années. Mais où vas-tu ? Rome a besoin de toi, le sport italien a besoin de toi. » Un appel du pied que déclinera logiquement l’élégant Francesco.

Nous établirons des bourses d’étude pour les sportifs de notre pays. Combien de Totti, Checchi, de frères Abbagnale avons-nous perdus à cause de ces déviances ?

Fan de l’Islande, et pas que pour le clapping

Si les frontières entre Biancocelesti et Giallorossi semble poreuse, la femme politique a tout de même bien saisi l’importance capitale au sein de la société du football et du sport dans son ensemble. « Le football professionnel, en plus d’être une sorte d’antidépresseur naturel, est un secteur économique qui engendre de la richesse et distribue des ressources aux autres sports et au sport de masse », déclarait-elle au Corriere dello Sport en mai 2020. Non sans manichéisme, la boss de Fratelli d’Italia souhaite faire du sport une arme contre la délinquance : « Nous établirons des bourses d’étude pour les sportifs de notre pays. Combien de Totti, Checchi(fondeur champion du monde en 2006, NDLR), de frères Abbagnale(rameurs médaillés olympiques, NDLR)avons-nous perdu à cause de ces déviances ? »

Pour mener à bien ce projet, elle souhaite s’inspirer du modèle islandais : « Peu de gens savent que l’Islande était, dans les années 1990, la nation européenne présentant le taux le plus élevé de consommation de drogues, d’alcool et de tabac chez les jeunes. En quelques années, cette nation est parvenue à inverser la tendance. Comment ? Ils ont simplement décidé d’investir dans la jeunesse, en instituant une sorte de « droit au sport ». Ainsi, l’Islande est parvenue à former plusieurs générations de sportifs en bonne santé et performants. » Avec son programme « Il Diritto allo Sport » (le droit au sport, en VF) directement inspiré du pays de Kolbeinn Sigþórsson, la « mamma » italienne et chrétienne de 45 ans argumente qu’investir dans la jeunesse « signifie investir dans l’avenir, cultiver le talent et lutter contre la drogue et la déviance et ainsi faire évoluer une nouvelle génération d’Italiens pleins de valeurs que le sport peut leur transmettre ».

Pas de chichi pour Mancini

En décembre dernier, Giorgia Meloni rendait hommage à Roberto Mancini en lui décernant un mini-trophée pour le féliciter et le remercier des exploits réalisés par la Squadra lors du dernier Euro. Un brin gêné, le sélectionneur de la Nazionale accepte de recevoir cette récompense et se verra même chanter le plus bel hymne du monde avec la cheffe du parti d’extrême droite à ses côtés. Mise à part cette légère accolade, « le milieu du football garde toujours autant ses distances avec le monde politique », comme le souligne le sociologue italien Pippo Russo : « Aucune personnalité du football italien ne s’est officiellement positionnée en faveur de Giorgia Meloni, que ce soit pour la soutenir ou l’attaquer. »

Pourtant, un dossier les concerne directement : la Supercoupe d’Italie. Depuis deux ans, celle-ci ne se déroule plus à Rome, ni même en Italie, mais bien Arabie saoudite. Une destination qui pourrait être moins ensoleillée à partir de 2024, puisqu’elle pourrait être organisée en Hongrie. Viktor Orbán serait prêt à casser sa tirelire pour accueillir le gratin du football transalpin et aurait déjà transmis une première proposition à la Lega Calcio avec des négociations qui pourraient se fluidifier avec Giorgia Meloni, très proche du Premier ministre hongrois. Néanmoins, selon Pippo Russo, le levier politique ne sera pas actionné : « Je ne pense vraiment pas que Meloni viendra intervenir sur le football. La relation entre le football et la politique en Italie est une relation d’opportunisme mutuelle. Aucun dirigeant politique n’ose toucher aux intérêts du football. » Du moins, quand lesdits dirigeants politiques ne sont pas les mêmes que ceux à la tête des clubs de football. Et ça, c’est une autre paire de manches.

Dans cet article :
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Par Tristan Pubert

Propos de Pippo Russo recueillis par TP.
Illustrations : Midjourney.

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