Mathys Tel : précis pas pressé, mais jusqu’à quand ?

François Rabelais a dit un jour que « tout vient à point à qui sait attendre ». Dommage qu’il n’ait pas pensé à préciser ce qui vient à celui qui n’attend pas. Mathys Tel aurait pu s’en inspirer, même si sa bio Instagram indique le contraire : « PRÉCISPASPRESSÉ » (oui, avec les majuscules). Débarqué au Bayern Munich à 17 ans, le gamin du Stade rennais n’a pas vraiment attendu pour se pointer dans le grand bain et dans un très grand club. Utilisé avec parcimonie et surtout en sortie de banc, il a tout de même réussi à y gratter 28 apparitions toutes compétitions confondues, pour 6 réalisations dès sa première campagne. Un bilan honorable, qu’il a explosé l’année suivante, avec 41 matchs, pour 10 buts et 6 offrandes.

Sauf que cette saison, Vincent Kompany, tout juste débarqué en Bundesliga, n’a pas choisi de suivre la voie ouverte par ses prédécesseurs Julian Nagelsmann et Thomas Tuchel. Beaucoup moins utilisé sur la première partie de l’opus 2024-2025, il a décidé de plier les gaules, au terme d’un mercato hivernal à rebondissements qui l’a vu atterrir à Londres, à Tottenham. Si ce n’est pas encore Byzance, les signes sont encourageants.

Des débuts frustrants mais prometteurs

Buteur dès son deuxième match chez les Spurs, lors d’une défaite en Cup contre Aston Villa, l’ancien Rennais a laissé croire à une deuxième partie de saison de feu, lancée sous les meilleurs auspices. C’était oublier les débuts, les vrais, contre Liverpool en Carabao Cup trois jours plus tôt, au sein d’une équipe écrasée 4-0 par des Reds supérieurs en tous points, qui annonçaient eux la véritable couleur de la saison de Tottenham : bien grise, comme son maillot.

Placés à une indigne 14^e place, les protégés d’Ange Postecoglou n’ont plus grand-chose à jouer cette saison et le cadre devrait être idéal pour Tel, à qui son coach n’a pas mis de pression à son arrivée, arguant immédiatement qu’il n’attendait pas de lui d’avoir un impact immédiat. « J’ai eu une conversation avec lui et elle n’a porté que sur le football, et je pense qu’il trouvera ici un très bon endroit pour lui. Quel que soit son âge, il aura sa chance ici. Je pense que la façon dont nous jouons lui conviendra et que ce que nous sommes en train de construire au-delà – j’ai pensé que c’était l’endroit idéal pour sa prochaine étape », avait même lâché le Grec devant les médias.

Oubliez donc cette année au Bayern (458 minutes en 14 matchs, 0 but), il a déjà plus joué en cumulé dans le nord de Londres (487 minutes en 7 matchs) en deux mois, dont six titularisations. En d’autres termes, quand il joue, son coach a assez confiance en lui pour le faire débuter. Un point important alors que la concurrence s’est renforcée en interne, avec le retour de blessure de Wilson Odobert (20 ans), touché aux ischio-jambiers depuis de très longues semaines mais recruté pour près de 30 millions l’été dernier, qui gratte lui aussi du temps de jeu et a eu la bonne idée de planter le doublé de la qualification contre l’AZ Alkmaar en Ligue Europa. La chance de Tel, et même d’Odobert, c’est finalement que le secteur offensif des Spurs n’est ni fiable ni régulier cette saison et que la fin d’année sans enjeu devrait leur permettre de se montrer. Au moins, Tel aura profité de la trêve pour faire le plein de confiance avec un doublé avec les Espoirs, histoire de rentrer plein gaz à Londres.

Un comportement qui séduit

À 20 ans, celui qui jouait encore une demi-finale de coupe Gambardella avec Désiré Doué ou Djaoui Cissé sous les couleurs du Stade rennais il y a trois ans, n’en est pas non plus à un point de stagnation dramatique. D’abord parce qu’il n’a pas encore 20 ans, il les aura à la fin du mois, et parce qu’il lui faut un temps d’adaptation nécessaire à un nouveau championnat, moins réputé que la Bundesliga pour laisser des boulevards aux attaquants rapides et véloces. Alors à défaut de marquer régulièrement, Tel sait comment rentrer dans le cœur des supporters : en étant lui-même.

Par lui-même, on pourrait entendre généreux dans l’effort. Il y a aussi une certaine implication. Après une vilaine défaite à Craven Cottage avant la trêve, c’est lui qui s’est donné la peine d’aller s’expliquer avec les supporters, réclamant de l’unité avec un calme absolu, alors que certains fans n’hésitaient à lui envoyer des mots doux. Quand son coach est pris à partie, il vient évidemment jouer les pacificateurs. Ce même entraîneur qui soulignait « sa bonne mentalité » à l’heure de ses débuts.

Même lorsqu’il commet la gaffe de publier une photo avec un maillot de Fulham sur ses réseaux, il la supprime et fait l’effort d’aller s’excuser en commentaires, alors qu’il aurait pu se contenter d’ignorer tous ceux qui l’insultaient (ou inventer un piratage, la classique). Tant de comportements qui devraient aussi lui permettre de se mettre ses nouveaux fans dans la poche. Loin d’être une mauvaise idée, alors qu’une atmosphère délétère pourrait bien régner dans les travées du Tottenham Hotspur Stadium si les résultats ne s’améliorent pas dans les semaines à venir.