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Le Real s’offre un bain de jouvence
Avec les achats de Martin Ødegaard et de Lucas Silva, le Real Madrid poursuit sa politique de transferts de jeunes pépites. Fini l'époque des Galacticos, désormais place est faite à un rajeunissement de l'effectif. Une stratégie pas sans risque.
Avec son taux de chômage de plus de 50 %, la jeunesse espagnole se fait la malle. Encore l’an dernier, ils étaient plus de 300 000 jeunes compatriotes de Mariano Rajoy à avoir choisi l’exil. Entre des débouchés ridicules et des stages aux conditions drastiques, le futur du pays prend ses valises : hasta la proxima ! À contre-courant de cette fuite des cerveaux, le football reste une spécialité locale. Ainsi, comme l’a publié le quotidien El Pais, l’Espagne est le leader mondial des transferts de joueurs mineurs. Sur les quelque 1607 transferts enregistrés par la FIFA en 2014, les clubs de la RFEF trônent fièrement à la première place avec leurs 400 transfuges de moins de 18 ans, soit 22 % du total mondial. Cette spécialité ibère – le Portugal figure au deuxième rang avec 10 % – a déjà coûté au Barça une suspension d’un an de mercato et au Real Madrid une enquête toujours en cours. Justement, les Merengues ont fait du rajeunissement de leur effectif leur cheval de bataille. Mais à quel prix ?
Le coup Ødegaard, la Fabrica délaissée
Un prix cher, en ce qui concerne le transfert de la pépite norvégienne qui émoustillait toutes les grandes écuries européennes. Il y a une dizaine de jours, au beau milieu d’une frénésie médiatique digne d’un Galacticos, un gamin de 16 ans était donc présenté en grande pompe à la Ciudad Real Madrid. Martin Ødegaard, plus jeune international de l’histoire européenne, avait donc choisi le club madridista et sa vitrine de trophées. Bien que déjà adepte de la langue de bois, le minot vient de sauter de nombreuses étapes en un transfert. Pour Emilio Butragueño, « le plus important est que Martin soit ici et que nous soyons très enthousiastes avec son futur » . Pour s’offrir ce Norvégien pré-pubère, la Maison Blanche a sorti l’artillerie lourde : un salaire à la hauteur de celui d’Isco, un papa embauché dans la cantera de Valdebebas et un chèque de plus de 4 millions d’euros pour son club formateur. Après quelques jours d’attente, le Real a enfin reçu le feu vert de la FIFA pour aligner sa jeune pépite. Jusqu’à la fin de la saison, il devrait s’entraîner avec les grands en semaine pour jouer avec la réserve de Zizou le week-end.
Ce transfert s’inscrit dans une politique de « baby stars » souhaitée par Florentino Pérez et son board. Avec l’arrivée du tout jeune Lucas Silva en provenance de Cruzeiro, la moyenne d’âge du Real Madrid a encore une fois baissé. Aujourd’hui, pas moins de sept joueurs sur les 23 de l’effectif de l’équipe première ont moins de 23 ans. Une tendance qui ne devrait pas mollir avec les prochaines périodes de mercato. A contrario, cette stratégie de recrutement est plus contre-productive que complémentaire du travail effectué par la Fabrica. Ainsi, le centre de formation merengue, qui teste pas moins de 8000 jeunes par an, retrouvera un rôle qui lui colle à la peau depuis déjà quelques années : être le centre de formation des clubs de Liga, moins celui du Real Madrid. Certes, intégrer l’équipe première du Real Madrid illico après la cantera relève du miracle, il n’en reste pas moins un problème pour l’identité du fanion de Chamartin. Carlo Ancelotti, attentif au dit problème, aimerait ainsi faire de Jesé Rodríguez et Cherysev (aujourd’hui en prêt à Villarreal) des étendards de la formation maison.
Conflits en perspective
À défaut d’une identité 100 % madridista, Florentino Pérez prône une certaine « hispanolisation » de son effectif. Des recrues jeunes et espagnoles, donc. Après l’été du retour au bercail de Carvajal et des venues d’Isco et d’Illarramendi, le big boss de la Maison Blanche aurait jeté son dévolu sur la nouvelle pépite de l’aile gauche de Mestalla. Gaya, 19 ans et déjà indéboulonnable de l’équipe de Nuno, est « le garçon qu’il faut signer » , selon les dires d’un Florentino pas vraiment attentif aux micros postés autour de lui. Avec le milliardaire Peter Lim aux commandes, les Chés ne sont plus dans l’obligation de brader leurs jeunes talents. Problème, la clause libératoire de Gaya étant à 18 millions d’euros, le Real peut l’actionner à tout moment. Rufete, directeur sportif de Valence, a lui fait une affaire personnelle de la prolongation de Gaya. Cette situation, qui se terminera par un transfert ou une prolongation, est symptomatique des problèmes dont peut faire face le Real Madrid avec cette stratégie. Malgré tous les millions du monde, l’actuel roi du Vieux Continent ne peut se fâcher avec tous ses homologues. Auquel cas, il verra tous ses canteranos se faire la malle en Europe.
Par Robin Delorme, à Madrid