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Domenech et les vaches sacrées

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Domenech et les vaches sacrées

Alors que la France entière doute de sa sélection, Raymond Domenech semble habité de certitudes, autour de quelques joueurs indéboulonnables. Des vaches sacrées trop encombrantes ?

Domenech serait-il esclave de ses joueurs autant que de ses vieux schémas ? Au moment de discuter de la succession de celui qui avait amené la France dans le mur, Thierry Henry, Franck Ribéry et Patrick Vieira avaient assuré le sélectionneur de leur soutien. Liés au “coach”, ils constituent surtout son ultime paravent quand la tempête menace d’emporter Ray’ dans le naufrage bleu. Domenech doit tout à des hommes (Ribéry et Henry surtout, Anelka dans une moindre mesure) qui ont sauvé la face d’une équipe encore à la recherche d’une identité, six ans après la prise de fonction du sélectionneur.

Affaibli, Ray dispose encore de quelques anticorps pour résister aux désidératas des joueurs, comme son insistance à placer Henry à gauche et Ribéry à l’opposé le prouve. Des joueurs qui exposent publiquement leurs désaccords sur leur positionnement et la vulnérabilité du sélectionneur en s’appuyant sur une opinion hostile. Les footballeurs de haut niveau sont aussi des animaux politiques.

En prenant en main l’Equipe de France, Domenech avait une première fois tranché dans le vif : renouvellement des cadres, Henry et Vieira excepté. Ray’ avait ensuite effectué de vrais choix, comme de se passer de Pirès, Mexès, Dacourt, Frey et Trézeguet. Certains rappelés de temps à autre, mais toujours considérés comme d’éventuels recours plutôt que des titulaires en puissance.

Coupeur de têtes, Raymond Robespierre en a aussi imposé de nouvelles, comme celle de Malouda, titulaire les pieds dans le ciment de 2006 à 2008, malgré une vox populi largement défavorable à l’ex Guingampais. On pense aussi à Lassana Diarra, imposé après quatre petites titularisations avec Chelsea, ou Yoann Gourcuff qui venait de débarquer à Bordeaux après une saison en fond de teint à Milan. Pas que des mauvaises idées.

Donnez-leur de l’air

Certains font encore valoir les précédents 98 et 2006 pour appeler à la modération des critiques. La vérité : l’avant-propos de la Coupe du Monde ressemble surtout à celui de l’Euro 2008, quand Domenech s’accrochait à Sagnol, Thuram et Vieira, comme à des vaches sacrées. Incapable de faire un choix, il amena trois poids morts à l’Euro. Aujourd’hui, c’est devant que pointe la menace, avec une animation offensive plombée par trois joueurs au rendement insuffisant, et un schéma sans doute pas adapté (4-2-3-1). En cause, pas le déclin physique, sauf pour Henry, le totem capitaine, mais un manque de bonne volonté. Des joueurs seulement prêts à tout donner quand ils sont alignés à leur poste, ou plutôt là où ils estiment que leur poste se trouve. En clair, un gros problème d’ego surdimensionnés, et forcément flattés par leur statut d’indéboulonnable.

Le match face à l’Espagne a confirmé le manque de disposition de Domenech à entamer de véritables travaux d’aménagement dans la propriété bleue à quelques mois du débarquement en Afrique du Sud. Pourquoi n’avoir pas donné sa chance à Cheyrou, et au milieu au losange, alors que l’association Toulalan-Diarra se révélait toujours aussi improductive ? Pourquoi titulariser au statut plutôt qu’au mérite ? C’est simple, Domenech ne choisit plus, se reposant sur ses cadres coûte que coûte. La Toul’ et Lass se doivent d’être sur la pelouse, comme Anelka, Henry et Ribéry.

Quand l’empilement des talents conduit à l’asphyxie collective, le bon sens conduit à réclamer de l’oxygène. Mercredi, les entrées de Govou et Malouda, de véritables joueurs de couloirs, ont donné de l’air aux Bleus. Plus humble, ils laissent également davantage d’espaces aux latéraux et au développement d’une complicité dans les couloirs. Domenech est-il pour autant prêt à aligner l’un des deux et sacrifier une vache sacrée pour cela. On voit mal Ray’ se passer de son capitaine, Thierry Henry, ou de Ribéry, son seul détonateur offensif. Anelka ? A 31 ans, il n’a disputé aucune Coupe du Monde. Va-t-il passer sa première et dernière sur le banc, en vache sacrifiée ?

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