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Sócrates de Médicis

Par Alexandre Doskov
Sócrates de Médicis

Incarnation de la beauté du football brésilien, Sócrates n'aura connu qu'une seule expérience à l'étranger, avec un passage décevant à la Fiorentina. Une aventure peu concluante sportivement parlant, mais motivée au départ par un coup de gueule politique, encore et toujours.

Après six saisons passées aux Corithians et près de 300 matchs disputés avec le mythique maillot du club paulista sur le dos, Sócrates s’en est finalement allé. Mais à trente ans, contrairement aux autres légendes brésiliennes Pelé ou Carlos Alberto parties profiter de leur vie de trentenaire à New York, pas question de filer aux États-Unis. Trop facile, trop évident. Surtout, Sócrates reste Sócrates, et ne veut pas d’un départ simple, sans saveur et sans message. Alors après des années de lutte contre la dictature militaire en place au Brésil depuis 1964, après la Démocratie corinthiane, les déclarations sur la liberté, les maillots à messages, et tout ce qu’a fait Sócrates pour dépasser le cadre du sport, le joueur va un peu plus loin. Lié au mouvement « Diretas Já » ( « Des élections directes dès maintenant » , en VF), la star des Corinthians profite d’une gigantesque manifestation en avril 1984 pour faire une promesse solennelle. Un contrat en or l’attend à la Fiorentina, et il a déjà donné son accord. Mais la lutte pour la démocratie est plus importante, alors devant plus d’un million de personnes, il prend la parole et jure : si le Congrès organise une élection présidentielle libre et au suffrage universel direct, il renoncera à son départ et restera jouer au Brésil. Couillu. Mais l’élection en question n’arrivera jamais, et Sócrates met finalement sa menace à exécution. Le voilà envolé pour la Toscane.

Un docteur en violet

Ce départ est d’abord l’aveu d’un certain échec. La Démocratie corinthiane a été une aventure exceptionnelle, romanesque et menée par des personnalités hors du commun, mais concrètement, elle n’a pas donné grand-chose. Les Corinthians ont montré l’exemple, mais personne n’a sauté dans la roue, et la démocratie n’est toujours pas installée malgré les fous espoirs de Sócrates et de sa bande. Cultivé, éclairé, aimant la vie, le bon vin et la compagnie féminine, Sócrates débarque à Florence, ville d’une qualité et d’un raffinement hors pair, où il a théoriquement tout pour se plaire. En revanche, pour un amoureux de la démocratie et du pouvoir confié au peuple, la ville des Médicis n’a pas toujours été un modèle, mais les belles heures des intrigues et des coups tordus florentins appartiennent désormais à l’histoire. Sportivement, le défi de Sócrates est également alléchant. Depuis son arrivée quelques années plus tôt, le patron de la Fio Flavio Pontello a donné un élan nouveau à la Viola, et deux ans après être passés à un point du titre, lors de la saison 1983-1984, les Florentins ont terminé troisièmes de Serie A. Aux côtés de Daniele Massaro, Giancarlo Antognoni et des autres cadors de l’équipe, Sócrates rejoint donc un prétendant au titre et une équipe qui s’apprête à jouer la Coupe de l’UEFA. Et à son âge, il est temps que « Le Docteur » garnisse un peu son palmarès, lui qui n’a remporté que trois championnats de l’État de São Paulo en dix ans passés au pays, et qui est toujours bredouille avec la sélection. Manque de pot, l’expérience tourne au vinaigre. Sócrates s’acclimate mal à la vie en Italie, où les footballeurs brésiliens ne sont pas légion.

Le mal du pays

Lui, l’insouciant, se retrouve dans un environnement pesant, étriqué, qu’il ne comprend pas : « Quand je suis arrivé à la Fiorentina, plusieurs choses m’ont perturbé. En Europe, tout est planifié sur l’année. Au Brésil, je ne savais pas ce que j’allais faire dans un quart d’heure. » Avec son maillot pourpre sponsorisé Opel sur les épaules, Sócrates galère aussi sur le terrain, et la Fio s’enlise. Les Florentins sautent dès le deuxième tour en Coupe d’Europe, et termineront neuvièmes de Serie A. Avec presque dix buts en une trentaine de matchs, la saison de Sócrates n’est pas honteuse, mais il en a assez vu, et opte pour un retour au Brésil. Plusieurs années plus tard, il déclarera avoir été écœuré par la corruption du foot italien : « Le capitaine est arrivé dans le vestiaire et a dit : « Aujourd’hui, c’est match nul. » J’ai répondu : « Comment ça, match nul ? T’es fou ? Ne comptez pas sur moi. » Pendant les quarante-cinq minutes que je suis resté sur le terrain, je n’ai pas reçu un ballon. Et le match s’est terminé par 0- 0. L’objectif, ce n’était pas le championnat, mais les paris. » Il retrouve une place au Flamengo, dans un pays changé en partie grâce à lui et où la démocratie est enfin arrivée en 1985. Le jour du décès de Sócrates, en décembre 2011, le Brésil pleure donc une icône populaire. À Florence, où il n’a pas laissé un souvenir impérissable, le moral est aussi en berne. Le dimanche de sa mort, la Fio fait une minute de silence, joue brassard noir au bras, avec cette banderole en tribune : « Le Docteur est monté au ciel pour faire une talonnade à Dieu. » Le même jour, les Corinthians remportaient le championnat du Brésil, que Sócrates n’avait jamais réussi à gagner.

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