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Sochaux et la gestion du succès
Les Francs-comtois le savent : la saison prochaine sera forcément plus compliquée que celle écoulée. Sochaux qualifié en coupe d'Europe, ce n'est toujours qu'un accident. Un heureux accident cependant.
Cette saison 2011 était une saison d’opportunités en Ligue 1. Lille mis à part, aucune autorité ne s’est réellement dégagée. Et Sochaux a su saisir l’opportunité pour retrouver, comme en 2003 et 2004, son meilleur classement, cinquième, depuis son retour dans l’élite en 2001. Pourtant, l’été dernier, lors des matches de préparation (défaites 5-0 contre Bâle, 1-0 contre Evian), personne n’y croyait vraiment. Jérémie Bréchet dans le texte, en juillet 2010 sur sofoot.com : « On est clairement, clairement prétendant au maintien » . Sochaux venait aussi de perdre le patron de son entrejeu, Stéphane Dalmat, laissant sa Peugeot 308 à la concession pour le Stade Rennais. Avec deux saisons passées à souffrir dans le rétro, on tirait plutôt la gueule dans le Doubs. Un motif d’espoir cependant : les jeunots prometteurs (Martin et Boudebouz en tête) avaient une nouvelle fois emmagasiné des matches au compteur. « J’espère qu’on va tous passer un cap, les jeunes, tous ceux qui commencent à prendre un peu de maturité en championnat pour compenser ce départ (Dalmat, ndlr) » scénarisait le même Bréchet en juillet dernier.
Contrôle technique
Il ne croyait pas si bien dire. Les blessures longues durées des cadres du groupe (Richert, Faty, Bréchet) auront révélé quelques petits nouveaux (le gardien Cros en tête de gondole) et les jeunes attendus, comprenez Boudebouz et Martin, ont pris le contrôle technique de cette nouvelle équipe. Merci le centre de formation. Le FCSM, c’était en 2011, une marque déposée du 442 en losange, une des seules équipes à jouer avec deux pointes, deux ailiers, un numéro 10 et numéro 6 à l’ancienne. Et au bout du compte, une des seules équipes à nous éviter l’ennui. D’une année sur l’autre, le résultat est quand même stupéfiant : 60 buts, soit deux fois plus que l’an dernier, un niveau pas atteint pour le club en L1 depuis 1980 (77 buts). Francis Gillot s’est même assis sur ses préférences tactiques – « ce n’est pas le système que je préfère le 442 en losange, mais je me suis adapté au potentiel de l’équipe » avouait-il sur le site du club. Anin s’impose en sentinelle, et les cinq de devant s’amusent. Le landernau du 25 en parle même, pour le fun, comme des « Cinq fantastiques » : Martin, Boudebouz, Maurice-Belay, Maïga et Ideye. Plus spectaculaire que sa devancière (époque Pedretti et les reprises de volée de Micka Isabey), le Sochaux 2011 est resté moins efficace dans la pêche au point, au titre (58 points contre 63 et 64 en 2003 et 2004, une coupe de la Ligue en 2004). Mais profitant de la déliquescence de Rennes, du ralentissement de Lorient, d’un Saint-Etienne ou d’un Toulouse irrégulier et d’un printemps rythmé à un train d’enfer (une seule défaite, à Lille, sur les dix derniers matches), les Lionceaux poinçonnent, en cassant sur la ligne d’arrivée, leur cinquième place. Marvin Martin connaît deux bonheurs supplémentaires : des débuts en sélection très réussis et la remise du trophée du meilleur joueur du club des mains de Pierre Moscovici. Bref, on nage dans le bonheur.
Aujourd’hui, l’horizon a légèrement changé. Francis Gillot pensait rester « à 95% » à Bonal mais a préféré le challenge de Bordeaux. Les spéculations contradictoires sont nombreuses autour de l’avenir de Marvin Martin, dont l’avenir immédiat semble partagé entre Sochaux et Lyon. Au sein du club, on ne croit pas franchement à un départ. Pourquoi Marvin Martin prendrait-il le risque de quitter une équipe faite pour lui, dans une position de meneur de jeu idéale pour ses qualités, en vue d’une saison, qui, si elle est bien négociée, pourrait lui offrir l’Euro 2012 l’été prochain ? Pour l’instant, le président Lacombe tient bon et compte bien faire une dernière saison avec Martin. Les spéculations étaient toutes aussi nombreuses autour du remplacement de Gillot. Pas moins de dix-sept candidatures, dont celle inévitable de Paul Le Guen, ont été présentées. Les RH ont choisi Mécha Bazdarevic, ancien de la maison, accompagné de son fidèle second, Stéphane Gili, un chic type. Bazda, plus connu dans le costume de l’entraîneur spécialiste de la montée, se retrouve avec un double et sérieux challenge dans les mains : faire exister encore une année ce groupe tout en pensant à sa reconstruction pour l’été 2012 (départs certains de Boudebouz et de Martin).
Un nouveau cycle ?
De ces fameux « Cinq fantastiques » , seul Maurice-Belay, en fin de contrat, a aujourd’hui quitté le navire pour rejoindre son coach à Bordeaux et de source sochalienne, il ne pourrait y avoir que deux départs parmi les cinq, Maurice-Belay inclus. Martin et Boudebouz déclarés intransférables, Maïga plutôt à l’aise dans le Doubs, Ideye Brown pourrait, en cas d’offre sympathique venue de l’Est de l’Europe (Dynamo Kiev), remplir les caisses sochaliennes déjà bien nourries par les 26 millions d’euros forcément inattendus de droits TV. Le puissant Sloan Privat, de retour d’un prêt très réussi dans le Clermont de Der Zakarian, pourrait être alors la bonne carte à abattre, d’autant que son partenaire d’attaque de Clermont, Romain Alessandrini est ardemment désiré dans le pays de Montbéliard. Si le départ de Maurice-Belay a été compensé par l’arrivée de Sébastien Roudet, une valeur sûre, Sochaux est encore en quête d’un défenseur central pour combler le vestiaire vide de Jacques Faty, envolé en Turquie à Sivasspor. Le quotidien local Le Pays annonce Paul Baysse, pour l’instant un peu trop cher (5-6 millions d’euros), de Brest.
Le chantier, à première vue, n’est peut-être pas énorme. Sochaux ne connaîtra vraisemblablement pas la même saignée qu’un Lorient par exemple. Mais il devra sans doute savourer cette potentielle bonne dernière saison qui s’annonce, avant de s’attacher à un autre gros chantier : construire un nouveau cycle, qui, comme d’habitude, prendra ses racines au centre de formation. Paraîtrait qu’un Jérôme Roussillon ou un Quentin Pereira sont d’ailleurs à suivre…
Ronan Boscher
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