Prendre un IDS par la main, la solution suisse
En Suisse aussi il y a des interdits de stade. Les fameux IDS. Aux Young Boys de Berne, dont le stade high tech accueillait trois des rencontres de la poule de la France, une solution originale consiste à les faire venir aux matchs encadrés d'un «ami». Une idée qui peut paraître naïve énoncée ainsi, mais qui en appelle simplement aux vertus du dialogue entre dirigeants et supporters. Interview des coordinateurs du projet.
Après une période noire et de grand n’importe quoi, les Young Boys de Berne de Hakan Yakin refont surface. Deuxièmes de la dernière SuperLeague (le championnat suisse), ils commencent à se relever de leurs années noires, entre passages en D2 et organigramme déficient.
Cela ne fait qu’une saison que les Young Boys ont récupéré un directeur sportif. Une période difficile qui n’a pas entamé l’enthousiame de Lukas Meier, un supporter des Young Boys, responsable local du réseau FARE, et accessoirement étudiant en histoire. Avec le travailleur social Rafael Ganzfried, ils pilotent le projet « 2e chance » , porté par leur association Fanarbeit, créée en février 2007. Fanarbeit, structure indépendante, est financée pour moitié par les Young Boys, mais aussi par la mairie et le canton. Elle regroupe des supporters (majoritaires), mais aussi des représentants du club, et des politiques. Rafael et Lukas nous expliquent les ressorts de leur innovant projet.
Comment est né ce projet 2e chance ? En fait, en Suisse, la politique de sécurité au sein des stades s’est durcie ces dernières années. A Berne, en début de saison dernière, une cinquantaine de supporters étaient interdits de stade pour deux ans. Une lourde sanction pour des choses souvent stupides, comme le jet d’un verre de bière, une insulte, des fumigènes. Les fans nous ont alors demandé de faire quelque chose avec notre association Fanarbeit, pour que les IDS puissent voir les matchs à domicile. Nous avons réfléchi et proposé le projet.
En quoi consiste t-il exactement ? Concrètement, un ami d’un IDS dépose un dossier et passe un entretien, au terme duquel on le juge apte ou non à encadrer son pote. Le jour du match, on connaît exactement leur emplacement dans le stade. Ils doivent arriver ensemble 30 minutes avant le coup d’envoi, et repartent ensemble 30 minutes après le coup de sifflet final, des périodes propices aux débordements émotionnels. Le but c’est de donner une possibilité au supporter de montrer au club qu’il peut se conduire normalement pendant un match. Dans les moments de tension, quand le supporter est prêt à exploser pour quelque raison que ce soit, son ami doit intervenir, le raisonner. Mais il ne se porte pas garant non plus. Si l’IDS se met en infraction, seul lui sera sanctionné, d’ailleurs le droit ne permet pas de pénaliser l’ami.
L’IDS et son ami doivent-ils respecter un code de conduite strict ? Non. D’ailleurs, faut être franc, dans notre phase pilote, des supporters arrivaient complètement bourrés aux matchs, depuis on a fait passer le message. A Saint-Gall, une initiative similaire à la nôtre a été développée, mais après quelques rencontres des supporters ont lancé des objets sur des policiers, et le projet a été stoppé net.
Cette politique porte-t-elle ses fruits à Berne? Oui. Tous ceux qui sont entrés dans notre programme ont vu leur interdiction de stade, prise par le club et la police, annulée. La période de test dure une demi-saison. Par notre intermédiaire, ce dialogue entre club et supporters aide à pacifier leurs relations.
Y-a-t-il souvent des problèmes de violence à Berne? Non, beaucoup moins qu’à Bâle ou Zurich. Il faut aussi savoir que notre nouveau stade est équipé de presque 100 caméras, donc mieux vaut se tenir à carreau. Aujourd’hui, ça se passe plutôt sur les aires d’autoroute, dans la forêt où les supporters se donnent rendez-vous pour un fight. A Berne, il doit y avoir 12 vrais hooligans, pas plus.
Propos recueillis par Thomas Goubin, envoyé spécial à Berne
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