Le Hertha fait le mur

1 – Une fin de saison 08-09 traumatisante

Le 14 février dernier, devant 75 000 enamourés au Stade Olympique, les Berlinois battent le Bayern Munich pour la première fois en huit ans et décrochent du même coup la première place de la Bundesliga, grâce à un doublé d’Andriy Voronin. Enfin, se dit-on, le club de la capitale va pouvoir se mêler à la lutte pour le titre. Tout semble lui réussir. Son entraîneur suisse Lucien Favre a la cote et vient de prolonger son contrat, le duo défensif international Friedrich–Simunic, complété dans les cages par Drobny, constitue l’un des meilleurs remparts outre-rhin et devant, Voronin et Pantelic cartonnent. Cette fois c’est la bonne, le plus petit des grands clubs allemands (seulement deux titres vieux de 80 ans et deux coupes de la Ligue en quasi 120 ans d’existence) va sortir de l’ombre. Oui mais non. C’aurait été trop beau. Au moment de l’emballage final, Die Alte Dame –La Vieille Dame– déraille : le capitaine Friedrich termine prématurément la saison sur blessure, la star montante Ebert est suspendue pour avoir fêté ses 22 printemps complètement raisin en défonçant des voitures et Liverpool casse l’ambiance en annonçant que quoi qu’il arrive, Voronin, qui n’est que prêté, reviendra sur les bords de la Mersey. Enchaînement fatal, les Berlinois se vautrent lamentablement lors des dernières journées pour échouer à la place du con, la quatrième. Adieu amour, gloire et beauté.

2 – Une intersaison foireuse

Se rater, c’est bien, se saborder, c’est mieux. Telle semble avoir été la devise du Hertha pour préparer l’exercice 09-10. Ça commence par l’annonce de soucis financiers –Berlin n’a pas l’appui de riches industriels comme à Hoffenheim ou Wolfsburg. Ça continue avec le départ précipité du manager général depuis 13 ans, Dieter Hoeness (frère d’Uli), en conflit avec président et entraîneur sur la question des transferts. Les transferts d’ailleurs, parlons-en, c’est un modèle du genre. Première étape, je me débarrasse de mes meilleurs joueurs car ils sont trop chers : retour de prêt de Voronin, Pantelic en fin de contrat non conservé pour économiser un salaire, Simunic leader de défense transféré pour 7 millions d’euros à Hoffenheim, putain de nouveau riche. Deuxième étape, je compense les pertes par un recrutement tout naze : Pejcinovic –inconnu serbe de 21 ans en provenance de l’Etoile Rouge– pour remplacer Simunic en défense, Wichniarek –buteur polonais de 32 ans venu de Bielefeld et déjà passé par le Hertha (4 buts en deux saisons et demie, un bourreau)– pour remplacer à lui tout seul le duo Voronin–Pantelic. Troisième étape, je prends conscience en toute fin de mercato que ça sent le roussi et je me précipite pour compléter quantitativement plus que qualitativement mon effectif en recrutant une palanquée d’improbables soutiers. Quatrième étape, je déguste.

3 – Un sort qui s’acharne

Berlin ne fait illusion que lors de la première journée et une victoire à domicile contre Hanovre. Depuis ? Un bilan à consoler les losers grenoblois : 11 défaites, 2 nuls, une différence de buts de -21. Même en Coupe d’Allemagne, Hertha s’est fait sortir. Seule l’Europa Ligue offre plus ou moins satisfaction (une récente victoire à Heerenven en match de poule), mais franchement à quoi ça sert ? Et puis en plus d’être ridicule sur le pré, le club se fait allumer dans la presse, via son ex-star dépressive, Sebastian Deisler, qui confie en septembre à propos de son passage dans la capitale allemande : « Quand je suis arrivé à Berlin, le club était dans un aussi mauvais état que moi, ils étaient contents de pouvoir me présenter en vitrine mais je suis devenu malheureux en essayant de rendre les autres heureux, je me sentais comme un clown triste » . Puis concernant son transfert vers le Bayern en 2002 et les menaces de mort des supporters berlinois qui ont suivi : « C’est ce qui a tué mon amour pour le football » . Pour une fois que le Hertha fait parler dans les journaux, c’est donc pour apprendre qu’il est directement la cause de la mort footballistique du plus grand espoir allemand de sa génération. Classe.

4 – Un avenir bien sombre

Friedhel Funkel, qui a remplacé Lucien Favre sur le banc, va-t-il tenir jusqu’à Noël ? Pas sûr, tant le calendrier à venir est démentiel : déplacement à Gelsenkirchen contre Schalke 04 (actuel 3e), réception du leader Leverkusen et déplacement à Munich contre le Bayern (actuel 4e). Pour sauver ce qui peut encore l’être, la cellule de recrutement planche déjà sur des renforts expérimentés, mais avec des caisses vides, il va falloir racler les fonds de tiroirs, bien profondément : en attaque, on parle de Roy Makaay (34 ans) et en défense Sol Campbell (35 ans)… Histoire de bien se faire humilier jusqu’au bout l’année anniversaire de la Chute du Mur, le petit mais populaire club de Berlin Est, l’Union, promu en 2. Bundesliga cette saison, figure dans les premières places de son championnat. La descente de l’un et la montée de l’autre sont donc envisageables. Große katastrophe en perspective.