GF38 : Troussier se fera t-il Hara-Kiri ?

Les entraîneurs disent souvent qu’il faut attendre la dixième journée avant de tirer un premier bilan et de dessiner les tendances de la saison. Donc on a attendu. Maintenant, on peut le dire : Grenoble est mal barré. Dix défaites en dix matches, le zéro de la honte, le zéro de la défaite. Pas besoin d’analyser le parcours de la lanterne rouge dans tous les sens pour savoir que les Isérois joueront en L2 la saison prochaine. Ce n’est pas la peine non plus de chercher d’innombrables raisons à ce cauchemar : Grenoble n’a pas le niveau, point. Mehmed Bazdarevic est menacé, c’est une évidence. Pas sûr d’ailleurs qu’il ait envie de continuer tant sa mine semble se décrépir à chaque conférence de presse d’après-match. Mais c’est déjà un exploit pour lui d’avoir tenu aussi longtemps avec de tels résultats quand on sait que des mecs comme Der Zakarian se sont déjà fait gicler au bout de trois matches. Et puis entraîner Grenoble en Ligue 1 est de toute façon un job à hauts risques, puisque le club n’est pas encore taillé pour l’élite. Entre un président qui n’est jamais là et des actionnaires qui ne parlent pas français, on a un peu de mal à discerner le projet sportif du club, même si celui-ci dispose d’une enceinte moderne et digne du haut niveau.

Remplacer Bazdarevic alors que le sort de l’équipe est déjà joué, qui pourrait accepter un tel défi ? Un entraîneur kamikaze, ou un sorcier, à la rigueur. Ça tombe bien, Philippe Troussier est un concentré des deux. D’après le journal L’Equipe, les proprios nippons du GF 38 auraient fait jouer le réseau et contacté l’ancien sélectionneur du Japon et de l’Afrique du Sud. Le tout dans le dos du directeur général délégué du club Pierre Wantiez- le mec avec un cheveux sur la langue, qui traite ses joueurs de « petits merdeux » . Il faut dire qu’il n’y a qu’au pays du soleil levant que Troussier jouit encore d’une certaine notoriété. Son passage à Marseille en 2004-2005 n’est pas vraiment resté dans les mémoires, mais les Japonais le considèrent comme une référence depuis qu’il a réussi à hisser l’équipe nationale en huitièmes de son mondial en 2002.

Actuellement sous contrat avec le FC Ryukyu, obscur club de troisième division nippone, Troussier pourrait bien faire son come-back dans le plus japonais des clubs français. « Je connais bien M. Watanabee (président du GF 38) et je suis sensible à ce qu’il se passe à Grenoble. Pour un coup sur six mois, pour dépoussiérer les meubles, comme à Grenoble, pourquoi pas. Je peux le faire et j’aime ces défis. L’adrénaline, la pression des matches et le vestiaire me manquent » , a-t-il avoué au quotidien du sport et de l’automobile dans ce qui ressemble fort à une lettre de motivation, même s’il a admis par la suite « n’avoir aucun contact direct avec les dirigeants » . Si l’on en croît ses propos, Troussier serait donc plutôt partant pour un CDD que pour du long terme. Préparer la saison prochaine ne l’intéresse visiblement pas. C’est donc qu’il s’estime apte à sauver le club de la descente, soit glaner grosso modo 42 points en 28 journées. Cela confirme ce que l’on pensait de lui : ce type est fou. A première vue, le défi n’est pas immense, il est insurmontable. Ne pas finir dernier serait déjà un exploit. Après, pour redonner confiance à un groupe qui ne croît plus en lui, Troussier n’est pas non plus le plus mauvais. Son discours et ses méthodes militaristes sont davantage taillés pour des joueurs prêts à se sacrifier pour ne plus perdre que pour des Lizarazu qui ont tout gagné et qui viennent à Marseille en touriste, histoire de finir une carrière au soleil. Mais surtout, il n’a rien à perdre dans l’affaire. Peut-être son meilleur atout.