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De l’importance du « Clásico Chileno »

Par Fausto Munz
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Un grand match s’annonce en finale de la Copa Chile. Ce mercredi soir (minuit heure française), Colo-Colo retrouvera son éternel rival, la Universidad De Chile, pour le 125e Clásico de son histoire. Si les derbys entre les deux meilleurs ennemis du football chilien sont toujours animés d’une émotion unique, cette finale de Coupe, de par les enjeux sportifs et la pression qui l’entourent, promet d’être belle.

« Le Clásico est le produit d’une longue tradition. Le rapport de force entre le Colo-Colo et la Universidad de Chile et la rivalité entre ces deux équipes ont fait que ce match est presque toujours considéré comme une finale. C’est le match qui alimente les passions, celui qui fait vibrer les supporters. À chaque Clásico, c’est une nouvelle attente, un nouveau défi, ce sont ces matchs qui font l’histoire du football. » Les mots de Jaime Pizarro, joueur légendaire du Colo-Colo avec qui il a gagné tous les titres possibles à la fin des années 80, parlent d’eux-mêmes : l’affrontement face à « la U » est le match que tout le monde attend. Il détermine souvent le vainqueur du championnat, mais ce mercredi, c’est en finale de Coupe que les deux équipes les plus titrées du football chilien s’affrontent, chose qui n’est arrivée qu’une fois par le passé. C’était en 1979.

U. de Chile : la gloire ou la honte

Avant cette finale de Coupe, on ne fait pas les fiers du côté de la Universidad de Chile. Que de déceptions depuis le début du championnat d’ouverture ! Niveau de jeu décevant, problèmes défensifs récurrents, résultats alarmants et classement indécent… La « U » réalise tout simplement son pire championnat depuis 1941. À une journée de la fin, le club croupit dans les bas-fonds du tableau avec une 14e place déshonorante et indigne de son statut. Elle a même reçu quelques fessées depuis le mois d’octobre, essuyant un 4-1 sur la pelouse de Concepción et en en prenant 5 le mois dernier contre la faible formation du Deportes Iquique.

C’est donc une occasion en or pour sauver sa saison que tient la Universidad de Chile qui, en dépit de cette saison médiocre, a dégainé un parcours de haut vol en coupe. Sortie première de son groupe de qualifications, elle s’est fait peur en 8e de finale aller après une défaite 3-1 sur le terrain de San Luis, puis a enchaîné 5 victoires sans encaisser le moindre but. La voilà en finale, à un match d’un titre prestigieux qui lui permettrait de valider son ticket pour la prochaine Copa Libertadores. Et évidemment il n’existe pas de meilleur opportunité pour sauver sa saison que d’affronter l’ennemi juré Colo-Colo en finale de Coupe. « Il ne faut pas oublier qu’en plus d’être une finale, c’est un Clásico et donc que c’est une partie spéciale pour les deux équipes, explique Patricio Mardones, grand milieu de la Universidad De Chile dans les années 90. Mais en plus de la rivalité qui entoure ce match, la Coupe donne la possibilité à la U de faire ce qu’elle n’a pas réussi à faire en championnat, à savoir se qualifier pour une coupe internationale comme la Copa Libertadores. » Son ex-coéquipier Victor Hugo Castañeda, qui a également été entraîneur de la Chile, partage le même constat, mais il n’ose envisager les conséquences en cas de défaite. « Ce titre en coupe pourrait changer la saison du club. Mais si la U ne gagne pas, ça sera un désastre, une saison vraiment sinistre. » Oui, parfois, la frontière entre la gloire et la honte ne tient qu’à un match.

Colo-Colo : un doublé sinon rien

Le contexte n’est pas le même du côté du Colo-Colo, mais la pression est aussi énorme. Premier du championnat à une journée de la fin avec un petit point d’avance sur la Catolica, el Popular a l’occasion de remporter un doublé Coupe-championnat qu’elle n’a pas réussi à conquérir depuis 1996, année de la dernière victoire du club en Coupe. Mais si l’équipe peut faire carton plein, elle peut aussi très bien tout perdre. Il y a une finale à gagner en terre ennemie ce mercredi et un match décisif pour le titre de champion qui l’attend trois jours plus tard sur la pelouse des Santiago Wanderers. Oui, jouer une saison sur une semaine, au Chili, c’est possible. De fait, la « U » a pu préserver ses meilleurs éléments pour la finale quand son adversaire ne pouvait pas se le permettre et on peut s’inquiéter de la condition physique de certains joueurs pour une équipe de Colo-Colo qui aura joué 4 matchs en l’espace de dix jours. Pour autant, selon Patricio Madrones, le Colo ne veut pas faire dans la demi-mesure et il n’existe pas de priorité du championnat sur la Coupe. « Pour Colo-Colo, les deux tournois sont importants. Les Clásicos sont faits pour être gagnés, et leur objectif est clairement de faire le doublé. Ils seront déterminés et motivés contre la U comme contre les Wanderers. » Aux joueurs du Colo de gérer la pression qui va peser sur eux lors des prochains matchs. Et en matière de pression, Rodolfo Moyá, qui a porté le maillot des deux équipes et joué pas moins de 10 Clásicos, sait de quoi il parle. « C’est un match à part. Quant tu arrives sur le terrain, il y a tellement de choses qui se passent dans ta tête. Tu penses à l’action que tu vas faire, à comment tu vas te déplacer, au côté où tu vas orienter le jeu, à comment déstabiliser la défense… C’est le genre de matchs où tout peut se passer et qui se jouent sur des détails. Si tu veux faire basculer un Clásico, il faut être bien physiquement, mais surtout jouer avec toute l’envie que nécessite ce genre de rencontres. » Jaime Pizarro connaît la situation qui attend les joueurs du Colo-Colo, lui qui a remporté le doublé en 1989 et 1990, et s’il admet que le calendrier peut avantager la U, selon lui, c’est au mental que ça se jouera. « Il y a de la fatigue et il y a de la pression, comme toujours. Mais pour un sportif, c’est un grand privilège que d’avoir la possibilité de jouer deux finales dans la même semaine, et de devenir champion. Ce genre de moments arrive peu souvent dans une carrière et les joueurs feront tout pour faire un grand match. C’est la récompense après plusieurs mois de travail, parfois de toute une vie. Cette simulation mentale et l’enthousiasme de jouer une finale est supérieur à n’importe quelle forme de fatigue. » Pas la peine de se plaindre d’un coup de barre à minuit pour le match, donc.

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