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Barça-Estudiantes, un fauteuil pour deux
L'ogre barcelonais, qui a remporté toutes les compétitions auxquelles il a participé cette saison, affronte Estudiantes de La Plata, le club de cœur de Juan Sebastian Veron. L'occasion pour la Brujita de se frotter à son pote Lionel Messi et de rappeler à ceux qui l'auraient un peu vite enterré qu'il n'est pas fini.
Deux fantastiques techniciens, deux emblèmes du football argentin se croiseront demain sur la pelouse du Zayed Sports City, la plus grande enceinte sportive du Moyen-Orient (49 500 places), à l’heure où le soleil viendra s’échouer dans le Golfe Persique. D’un côté Juan Sebastian Veron, tireur d’élite à la frappe lourde et millimétrée, l’âme d’Estudiantes de La Plata, le champion d’Amérique. De l’autre, Lionel Messi, sa vélocité et sa conduite de balle démente, l’arme fatale du Barça, roi d’Espagne et d’Europe. Deux générations, deux écoles, mais deux formes d’expression à priori compatibles.
La tour de contrôle et l’étoile filante
Dès son arrivée en Europe, Veron a incarné le modèle du milieu relayeur, ce numéro 10 en retrait, chargé d’orienter le jeu par de longues transversales à la précision chirurgicale. Ses coups francs surpuissants ont flanqué la trouille aux meilleurs gardiens du monde. Son passage en Angleterre (Manchester, Chelsea), après une carrière éclatante en Italie (Sampdoria, Parme, Lazio, sans oublier un dernier crochet à l’Inter), reste mitigé. Son retour à Estudiantes, le club de ses débuts, est couronné de succès. Après un titre de champion d’Argentine en 2006, Veron et ses coéquipiers enchaînent par une finale de Copa Sudamericana (équivalent sud-américain de la Ligue Europa) en 2008 et une victoire en Copa Libertadores en juin dernier. Loin de se conformer à une retraite anticipée, la Brujita (le petit sorcier), surnom hérité de son père, avant-centre de la grande équipe d’Estudiantes (trois Libertadores et une Coupe intercontinentale entre 1968 et 1970), a convaincu Maradona de le rappeler en sélection après deux ans d’absence. Il y croise la route de Léo Messi, orphelin d’Iniesta et de Xavi sous le maillot de l’Albiceleste.
Association de malfaiteurs
El Diez est persuadé d’avoir trouvé en lui le complément idéal de la Pulga, qu’il veut décharger de ses tâches défensives. En affublant à son étoile filante cette tour de contrôle clairvoyante et généreuse, Maradona pense que l’Albiceleste va retrouver son équilibre, un boulet qu’il traîne depuis la mise à l’écart de Riquelme. Mais l’association des deux joueurs, infaillibles en club, symbolise à la perfection le paradoxe dont est victime (ou coupable ?) l’Argentine depuis le titre mondial de 1986 : on peut posséder quelques-uns des meilleurs joueurs du monde (Batistuta, Redondo, Ortega, Zanetti, Mascherano…) et ne rien gagner pendant deux décennies.
Bourrés de talent, auréolés de succès avec leurs clubs respectifs, les chouchous de Diego s’apprécient mutuellement. Veron vole régulièrement au secours de son numéro 10 dans la presse argentine et Messi prête toujours une oreille attentive aux conseils du sorcier. Demain, les deux hommes seront opposés pour la première fois. Tout deux rêvent de s’installer sur le toit du monde, aujourd’hui en club et demain en sélection, ensemble. Pour Veron, qui tirera vraisemblablement sa révérence à l’issue de la prochaine Coupe du monde, une victoire dans cette finale, « celle dont Estudiantes rêvait » , aurait des allures d’apothéose. Pour Messi, jamais rassasié et qui espère « échanger [son] maillot avec Veron » , c’est l’occasion d’asseoir un peu plus sa domination et celle du Barça sur la planète football.
Par Alejandro Carbone, à Buenos Aires
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