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Pascal Cygan : « Coup de bol pour nous les Lillois, le PSG pense déjà au Bayern »
Avant de faire partie des Invincibles d'Arsenal, Pascal Cygan a fait le bonheur du LOSC. Et il peut se targuer avec ses coéquipiers de 1996 d'être l'un des derniers Lillois à être revenus du Parc des Princes avec une victoire face au PSG. Vingt-cinq ans plus tard, le défenseur au crâne glabre revient sur cette rencontre et sur la saison actuelle du LOSC. À l'époque, déjà, le PSG était focalisé sur un match de Coupe d'Europe.
Est-ce que vous savez que Lille n’a plus jamais gagné au Parc des Princes depuis le 27 avril 1996 et cette victoire 1 à 0 à laquelle vous avez participé ? Oui, je le sais, car tous les ans, on nous rappelle cet évènement avant un Paris-Lille. Mais c’est vrai que j’aurais bien aimé que ce soit oublié, car ça aurait voulu dire que Lille avait de nouveau gagné au Parc des Princes. Et ce qui est paradoxal, c’est qu’on avait sur le papier la moins bonne équipe du LOSC des vingt dernières années.
À l’époque, le LOSC luttait pour le maintien, le PSG pour le titre et c’est finalement ce match qui vous a permis de vous sauver.Clairement. Il nous a déjà permis de prendre 3 points, ce qui était assez rare cette saison-là. Et puis psychologiquement, ça nous a débloqués. Car en plus d’avoir beaucoup de mal dans le jeu, les têtes commençaient vraiment à être atteintes. Pour revenir au match, c’est toujours difficile d’aller chez la meilleure équipe française du moment dans la peau d’un relégable. On a joué avec 5 défenseurs et on aurait tous signé avant le match pour un match nul.
Pour un jeune joueur comme vous qui découvrait la D1 cette saison-là, c’était comment d’être au marquage de joueurs comme Djorkaeff ou Rai ? C’était compliqué, car toutes les lumières étaient au rouge : vous débutez, en face il n’y a que des gros noms du football mondial qui sont des stars dans leur pays, vous jouez au Parc des Princes et vous êtes mal classé. Avant le match, je n’étais pas au mieux. Mais bon, ça reste du football et on connaît l’importance de la motivation et de l’envie.
En parlant de motivation, le fait que le PSG jouait quelques jours plus tard sa finale de Coupe d’Europe des vainqueurs de coupe vous a aidés ? Est-ce que sur le terrain, vous avez senti que les Parisiens n’étaient pas à fond ? Nous, ça ne nous a pas aidés, car physiquement, on n’a pas senti les Parisiens hors du contexte. Mais eux, ça leur a probablement desservi. Psychologiquement, ils avaient forcément la tête plus tournée à ce match de Coupe d’Europe. Ils jouaient tranquillement et comptaient gérer pour gagner le match 1 à 0 sans forcer, sans se blesser et sans se fatiguer. Ils nous ont pris un peu par-dessus la jambe, et nous, on a eu la chance de marquer un but sur une frappe qui n’en était pas une puisque Pat’ (Patrick Collot, NDLR) a voulu centrer. On sent bien quand l’attaquant ne met pas le pied sur un contact… Mais même à 50%, ces mecs-là sont dangereux.
Vingt-cinq ans plus tard, Lille ne joue plus le maintien, mais le titre. Tout comme Paris qui, là encore, va jouer un match européen quelques jours plus tard. Est-ce que c’est un avantage pour le LOSC ? Je pense que oui. Et coup de bol pour nous les Lillois, on va probablement jouer contre une équipe du PSG qui pense déjà à ce match contre le Bayern.
Quel regard portez-vous sur la saison du LOSC ? J’en suis super ravi, bien évidemment. Le seul souci, c’est de ne pas pouvoir la vivre au stade avec le public. Le travail qui a été fait par Christophe Galtier depuis trois ans est remarquable. Les bases ont été sauvées in extremis il y a trois ans, puis consolidées lors des deux dernières saisons, et on voit le résultat cette année. C’est tout ce travail qui a permis à Lille d’en être là où il en est aujourd’hui. C’est comme ça que l’on construit une équipe et un palmarès.
Que manque-t-il à Lille pour aller chercher le titre ? Lille semble être l’équipe la plus équilibrée. Défensivement, c’est très solide, offensivement les titulaires et les remplaçants sont interchangeables et au milieu c’est très costaud. Peut-être que l’attaque est moins efficace que la défense, mais ça reste solide. Franchement, je pense que s’ils sont épargnés par les blessures, la fatigue et la Covid, les Lillois ont autant de chances que le PSG d’être champions. Et que Lyon et Monaco aussi. (Rires.)
Quand on a été défenseur de haut niveau comme vous, est-ce qu’on n’a pas envie de se retrouver sur le terrain face à ce PSG pour affronter les stars du PSG ? Ou finalement, on est bien content d’être à la retraite ? Moi, personnellement, vu la vitesse que j’avais, me taper des Mbappé et Neymar, non merci, je suis bien content d’être sur mon canapé. (Rires.) Après, c’est vrai que le football reste avant tout une passion, et ça manque forcément. Aucun retraité du football ou d’un autre sport de haut niveau ne vous dira le contraire. On préfère être sur le terrain.
Vous avez affronté beaucoup de bons attaquants. Comment fait-on pour arrêter un Mbappé ou un Neymar ?Il faut utiliser le nombre et boucher les espaces. Le plus dangereux pour un défenseur face à ce genre d’attaquants qui vont super vite, c’est l’espace dans votre dos. Il faut donc avoir une couverture, un coéquipier qui anticipe ça et qui ne vous laisse pas tout seul. Il n’y a que comme ça que ça peut fonctionner. Que ce soit Neymar ou Mbappé, quand ils se retrouvent en décrochage, dos au but ou à l’arrêt, c’est à ce moment-là qu’il est vulnérable et qu’il faut intervenir. Il ne faut pas attendre qu’il contrôle le ballon, qu’il se retourne vers vous et qu’il vienne fixer en vitesse car là, c’est déjà trop tard.
Qui est l’attaquant qui vous a posé le plus de problèmes ?Celui qui m’a mis le plus en danger, c’est Lionel Messi au Camp Nou en Liga avec Villarreal. Au bout de 30 minutes de jeu, je prends un deuxième jaune sur une deuxième faute sur son genou en pensant prendre le ballon dans ses pieds. Sinon, tous les jours à l’entraînement, quand vous avez Thierry Henry et Dennis Bergkamp, ce n’est pas la joie. C’était souvent plus dur à l’entraînement qu’en match.
Vous avez aussi eu affaire à Cristiano Ronaldo lorsqu’il était du côté de Manchester United.Je me souviens d’une fois où Ashley Cole se blesse en début de semaine à l’entraînement, et le samedi, c’était un Arsenal-Manchester United. Quand Arsène m’a dit que c’était moi qui allais jouer latéral gauche, je me suis évanoui. Quand les tabloïds anglais ont appris que j’allais remplacer Ashley Cole au poste de latéral gauche, ils disaient tous que ça allait être une boucherie. Et finalement, il y a eu 0-0 et on n’a pas vu Cristiano. C’est une fierté, car si vous lisiez tout ce que j’avais pris dans la gueule. Et même si l’on ne peut pas dire que j’ai fait un grand match, mon rôle était de couvrir ce côté gauche, et Cristiano n’a pas marqué et Manchester n’a pas gagné.
Depuis l’arrêt de votre carrière, vous avez notamment entraîné les jeunes du LOSC, puis ceux de Mouscron. Vous en êtes où actuellement ? J’étais effectivement à Mouscron avec les U19, mais ça ne me satisfaisait plus. J’ai arrêté avant que le club ne devienne satellite du LOSC. Depuis six ans que je suis rentré, j’ai essayé de contacter plusieurs présidents de club du coin comme Wasquehal ou Tourcoing, mais je n’ai même pas eu le minimum syndical, à savoir une réponse. J’ai beau quémander pour qu’on me dise oui ou non, rien. Donc ça m’a un peu refroidi, et j’ai mis ça de côté.
Le LOSC champion européen du businessPropos recueillis par Steven Oliveira