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Marchetti sort de taule
Pendant un an, il n'a pas joué le moindre match, condamné par son propre président pour une petite déclaration de rien du tout. Mais Federico Marchetti a enfin purgé sa peine. Il est aujourd'hui un homme libre, et va pouvoir se reconstruire avec la Lazio Rome. Retour sur une année en cellule.
« La fin d’un cauchemar » . Federico Marchetti n’a même pas eu besoin de regarder les titres de la presse transalpine pour définir lui-même l’état d’esprit dans lequel il se trouve actuellement. Il peut à nouveau goûter à la liberté. Enfin. Après une année de néant, l’ancien portier de la Squadra Azzurra est de retour. Depuis hier, il est le nouveau gardien de la Lazio Rome. Un projet qui va lui permettre de se remettre en selle sans tarder, avec un poste de titulaire à la clef, et une possibilité de jouer, pour la première fois de sa carrière, l’Europe. « J’ai prié pour que cette situation se débloque le plus vite possible. Lotito m’a offert cette immense chance et j’espère l’exploiter au maximum » déclare-t-il lors de sa présentation officielle. Une double revanche, pour un gardien bourré de talent, et qui a bien failli foutre en l’air sa carrière à cause d’une malheureuse déclaration.
Retour en arrière, il y a un an. Marchetti sort d’une superbe saison avec Cagliari, où il s’est révélé aux yeux de tous. Marcello Lippi n’a aucun doute et le convoque pour le Mondial sudafricain, en tant que doublure de Gigi Buffon. A 27 ans, c’est une véritable consécration pour ce joueur qui, quatre années auparavant, jouait encore à la Biellese, en quatrième division. Mais le plus beau, croit-il, est à venir. Lors du premier match de la Coupe du Monde, face au Paraguay, Buffon se blesse. Marchetti entre à la mi-temps et n’encaisse pas de but. Au match suivant, il en prend un, face à la Nouvelle Zélande. Mais lors de la dernière rencontre de poule, face à la Slovaquie, c’est la débâcle. Federico encaisse trois buts, sur lesquels il est loin d’être irréprochable, et sort tête basse de la compétition, sans avoir convaincu personne. Passer après Buffon n’est pas une mince affaire.
Rocky Marchetti et Federico Balboa
Durant les semaines suivantes, le gardien des Sardes tente de prendre du recul sur la situation. De nombreux clubs le suivent avec attention, et lui n’a qu’une envie : aller voir ailleurs. Le milieu de tableau de la Serie A, c’est bien. Mais aller jouer des grandes compétitions et viser le titre, c’est beaucoup mieux. La Sampdoria, qualifiée pour le tour préliminaire de la Ligue des Champions, est notamment sur les rangs. La transaction est en bonne voie, mais capote au dernier moment. Dans une interview à la Gazzetta dello Sport, Marchetti fait part de sa déception de ne pas avoir été transféré dans le club génois. Le président de Cagliari, Massimo Cellino, prend ça comme une véritable attaque envers son club, et pète un plomb : « Marchetti est désormais sur le marché » martèle-t-il. En réalité, c’est bien pire. Cellino se démerde pour qu’aucune transaction n’aboutisse, et met le gardien hors du groupe. « Fuori rosa » , comme on dit en Italie. Le championnat débute, et Marchetti n’est plus dans le groupe. C’est désormais Michael Agazzi qui garde les cages de Cagliari. L’ancien titulaire se retrouve seul, totalement seul, et s’entraîne à part. La solitudine.
Pendant des mois, c’est le même calvaire. Le gardien aux cheveux longs voit le terrain de loin, de très loin même, et espère toujours obtenir la grâce de son président. Mais celle-ci demeure un mirage. « Les jours les plus difficiles sont le samedi et le dimanche. Je ne suis jamais convoqué, donc je vais à la mer ou au cinéma. Parfois, je vais courir et des gamins m’encouragent. Je me sens comme Rocky avant un combat » raconte-t-il dans la seule interview qu’il livre au cours de cette année maudite, toujours à la Gazzetta dello Sport. Marchetti va jusqu’à porter plainte auprès du Collège Arbitral. Au mercato, il attend, encore, un geste de son président. Il veut partir, n’importe où. On l’annonce au Genoa. Et puis non. Même pas une liberté conditionnelle. Marchetti reste dans son cachot. Encore cinq mois.
Une caution à 5,2 millions d’euros
A la fin de la saison, après une année entière d’inactivité, l’horizon s’éclaire enfin. Muslera, le portier de la Lazio Rome, annonce via son agent qu’il ne va pas prolonger son contrat. Une place de titulaire dans un club qualifié pour l’Europa League se libère donc. Claudio Lotito, le président romain, ne perd pas de temps. Il a déjà son poulain en tête. Depuis longtemps. Ce sera Marchetti, et personne d’autre. Cela tombe bien, son agent n’est autre que Beppe Bozzo, le même que celui de Zarate. En quelques jours, l’affaire se décante. Le Milan AC tente un assaut, mais le gardien a déjà donné sa parole. Le 5 juillet, l’officialisation tombe. Pour 5,2 millions d’euros (de caution ?), payables en trois fois, Federico Marchetti est le nouveau gardien de la Lazio Rome. « Je n’ai eu aucun doute, le projet m’a convaincu. A partir du premier jour où j’ai été en contact, j’ai toujours espéré que la transaction se concrétise. Je voulais le maillot biancoceleste. J’ai un immense enthousiasme » assure-t-il après avoir passé les visites médicales. Des visites satisfaisantes, malgré le fait qu’il n’ait pas joué le moindre match officiel depuis le 24 juin 2010. « Physiquement, je me sens vraiment bien car je me suis toujours entraîné, comme si j’allais joué le dimanche » dévoile-t-il. Cela ferait presque un peu de peine.
Nouvelle page, nouvelle aventure. Marchetti s’apprête à retrouver ses sensations. A Rome, il va donc embrasser une équipe qui aura à cœur de lutter pour la Ligue des Champions, et qui va, parallèlement, disputer l’Europa League. L’occasion de se mettre doublement en valeur. A un an de l’Euro, ce n’est pas négligeable. « La Squadra Azzurra reste évidemment l’un de mes objectifs et j’espère reconquérir le maillot de la Nazionale le plus vite possible » affirme-t-il. Plus qu’une promesse. C’est le serment d’un ancien détenu.
Eric Maggiori
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