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Socios Verts : un léger frémissement du football populaire

Par Nicolas Kssis-Martov
4 minutes

Les socios de Saint-Étienne vont peut-être parvenir à entrer dans le capital de leur club (moins de 0,2%). Pas vraiment la prise du palais d’Hiver, mais juste un léger frémissement dans un football français en plein doute.

Socios Verts : un léger frémissement du football populaire

« Le football français est en crise, notamment économique, avec la chute des droits télé. Les clubs doivent se tourner vers leurs supporters. Chaque euro qu’ils dépensent pèse aujourd’hui beaucoup plus lourd. La Ligue 1, qui peine à s’exporter, doit aussi se consacrer davantage à ses fans, les écouter, comprendre leurs codes… » Jeremy Chatonnier, président de l’asso Socios Verts et de la Fédération des socios de France, estime que le contexte paraît désormais un peu plus favorable à la reconnaissance de la démarche d’actionnariat populaire. Il bouscule le statu quo, en tout cas. La situation stéphanoise en est la preuve, institution historique s’il en est. Les supporters ont jusqu’au 12 septembre pour réunir 150 000 euros, soit moins de 0,2% du capital. Le conseil d’administration du club a donné son feu vert pour qu’un actionnaire minoritaire cède quelques parts. Sans que l’on saisisse vraiment où se situe le risque, tout le monde semble marcher sur des œufs.

Les garants des clubs

La logique des socios s’inscrit dans le vaste paradigme social du supportérisme, mais dans l’esprit d’une utopie de capitalisme participatif qui espère démocratiser encore davantage la propriété des biens de production (plutôt que les collectiviser ou les nationaliser). Elle se distingue par exemple des groupes ultras, qui se pensent et se vivent davantage comme une forme de syndicalisme des tribunes, avec des relations souvent houleuses vis-à-vis des directions ou des pouvoirs publics. Pourtant, confie Jeremy Chatonnier, « certains de nos socios sont sûrement ultras », ce qui n’aurait rien d’étonnant au vu de l’importance des deux virages et kops de Geoffroy-Guichard.

Ces deux mouvements partagent la conviction que les supporters constituent l’âme d’un club et ont légitimement le droit de veiller à sa pérennité, face notamment aux investisseurs étrangers ou à la logique de multipropriété. David Lehingue, socio de Sochaux, l’expliquait ainsi dans Libération : « Je m’étais beaucoup éloigné du club depuis la vente par Peugeot en 2014. Pendant les années de propriété chinoise, je n’étais plus abonné, je n’allais plus au stade, j’avais fini par me désintéresser du FCSM à cause des errements de gestion. Le sauvetage in extremis du club à l’été 2023 a été un déclic. C’est à ce moment que je me suis engagé. J’ai eu envie de participer au sauvetage d’un club. » 

Un phénomène récent en France

En Espagne, ce type de présence dans le capital est entré depuis longtemps dans les mœurs. Le Barça compte 150 000 socios, dont 110 635 élisent le président. En Allemagne, qui se veut la patrie du dialogue social, la règle du 50+1 instaurée en 1998 garantit la majorité à l’association historique du club. Le Bayern Munich rassemble ainsi près de 350 000 socios. Ces chiffres constituent autant un socle économique qu’un maillage social autour de l’institution, base de son influence au-delà des résultats et des budgets.

Quand les clubs sont au bord du gouffre, ce sont les supporters qui se mobilisent. Regardez ce qui se passe à Ajaccio… De toute façon, il y aura de plus en plus de socios.

Jérémy Chatonnier

En France, seul problème : cette solution suscite beaucoup de scepticisme, voire de l’inquiétude. Pour l’instant, huit associations existent (Sochaux, Guingamp, Rouen, Bastia, Nancy, Metz, Nîmes et Bordeaux). Et il faut souvent en arriver à une situation extrême, comme à Sochaux ou Bastia, pour qu’elles finissent par se faire entendre. « Quand les clubs sont au bord du gouffre, ce sont les supporters qui se mobilisent. Regardez ce qui se passe à Ajaccio… De toute façon, il y aura de plus en plus de socios », prophétise Jérémy Chatonnier.

Le phénomène reste donc récent dans l’Hexagone bien qu’il se développe peu à peu. Guingamp a ouvert la voie en 2017. Le SC Bastia a franchi le Rubicon en 2019, alors en National 3, transformé en société coopérative d’intérêt collectif (SCIC), avec notamment 14 000 actionnaires, dont les Socios Étoile Club bastiais et leurs 5 470 membres. Une fois encore, il a fallu la menace de disparition ou une déconvenue sportive, telle la relégation, pour en appeler à l’esprit de famille autour du club.

Les socios tentent alors de se rendre incontournables en convainquant les directions de la valeur – à tous les sens du terme – de leur capital supporter. L’ancien député socialiste de la Loire, Régis Juanico, spécialiste des questions sportives à l’Assemblée nationale et lui-même membre des Socios Verts, l’a parfaitement résumé sur Facebook, en vantant « ce modèle de gouvernance où la passion des supporters se mue en levier d’action et d’influence pour le développement du club, ancré sur son territoire, suscitant la passion dans toute la France et restant une marque connue dans le monde entier ». Reste à convaincre les patrons du foot français… et surtout à leur prouver qu’ils n’y perdront rien. En France, le capitalisme est souvent plus conservateur que libéral.

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