Montagnes russes et rocher monégasque
Menée au score (0/2) par une équipe de deuxième division (le FC Nantes), l'AS Monaco s'est poussivement qualifiée pour les huitièmes de finale de la coupe de la Ligue en milieu de semaine à Angers. Comme si cette victoire, finalement, pouvait figurer un résumé consistant de l'énigmatique début de saison du club de la principauté...
Les experts se perdent en conjectures. Ils voudraient bien sonder l’encéphale de Ricardo Gomes. Là où l’année dernière, en Gironde, l’ex joueur du PSG alignait une formation ultra défensive, avec un seul attaquant de pointe avec un Micoud en perdition, le collectif azuréen propose cette année un jeu beaucoup plus chatoyant même s’il laisse la porte ouverte aux flèches adverses. Là où les Bordelais alignaient des séries de matchs nuls et des victoires de raccroc, les Rouge et Blanc procèdent par cycles de victoires puis de défaites. Le grand huit et les montagnes russes pour le Rocher monégasque en quelque sorte. Comprenne qui pourra…
La qualification en coupe de la Ligue mercredi dernier, contre Nantes (3/2), ne dit pas autre chose. En manque total de confiance après leurs déboires en championnat, ils se montraient tout d’abord, en 4-3-3, fébriles en défense et approximatifs en attaque au point d’être menés à la mi-temps (0/2).
Après la pause, Ricardo revenait à son 4-4-2 préféré pour un bénéfice immédiat (penalty de Néné puis égalisation de Gapke), avant que le premier nommé ne clôt la marque d’une maître coup-franc. Depuis le début de l’exercice 07/08, l’ancien entraîneur ne cesse d’osciller entre les deux formules. Comme s’il voulait se souvenir absolument de sa nationalité brésilienne et des sept Sud Américains, dont trois de ses compatriotes, qui peuplent son effectif et oublier les reproches des supporters bordelais.
Ses nombreux essais en début de saison laissaient augurer du pire mais après un nul et une défaite à Lorient dès l’entame, le club de Michel Pastor enquillait successivement quatre victoires (dont deux à l’extérieur à Lille et Sochaux) pour se retrouver à la deuxième place.
Dans un effectif pléthorique, Ricardo semblait avoir ses choix, ses coupes et des trouvailles. Diego Perez, le volante uruguayen semblait avoir trouvé ses marques et la confiance du coach pour la première fois depuis qu’il est au club ; en défense, Ricardo s’appuie sur Cufré, Modesto et Bolivar (un Brésilien arrivé au club l’an dernier) ainsi que sur Vincent Muratori, un jeune de vingt ans déjà suivi par les échoppes du Calcio reléguant sur le banc Berthod, arrivé cet été ; au milieu, fidèle à ses principes de turn-over (Bernardi, Bakar, Lo Sambou), outre Perez, ses grandes idées s’appellent Jerko Leko, un Croate déjà entraperçu l’an dernier et Néné, un Brésilien de 26 ans qui vient de passer quatre ans en Espagne (Vigo, Alavès, Majorque) ; et last but not least, c’est en attaque que sa grande phobie du remplacement peut s’épanouir puisqu’ils sont cinq pour deux ou trois places en fonction du dispositif et en sachant que Piquionne (4 buts et à la hauteur de sa légende naissante) et Jérémy Menez, le dribbleur fou, qui passe, qui est vite et qui marque (trois pions cette saison) et qui semble enfin vouloir devenir – avec deux ans de retard – ce que Guy Lacombe lui promettait en octobre 2005 dans So Foot, soit d’être « le meilleur joueur de la Ligue » , sont indéracinables ; Koller, Gapke et le jeune Colombien (20 ans) Pino se partageant les miettes.
Las, après ce bond au classement, l’escouade azuréenne allait retomber dans ses travers et traverser le miroir dans l’autre sens avec trois défaites de rang (à Bordeaux, contre Paris et à Valenciennes) pour retomber à son niveau préféré depuis le début de l’année, le huitième étage. Autant dire nulle part. Les leçons de ricardisme ont été vite et mal apprises.
Vendredi prochain, l’ASM reçoit le leader nancéien et peut espérer inverser la tendance. Et ainsi entamer un nouveau cycle. Escalader d’autres grands huit. Depuis qu’il est entraîneur, au Brésil et en France, Ricardo Gomes a pris la bonne habitude de glaner, ça et là, quelques trophées, voire un viatique pour la Ligue des champions.
On ne serait pas surpris de le voir assembler, après quelques atermoiements, son drôle d’effectif avec une justesse qui n’appartient qu’à lui et rajouter une statuette supplémentaire à son palmarès. On miserait bien quelques pièces sur la rédemption d’un Camel Meriem par la grâce d’un pasteur brésilien par exemple. Et alors là, le Rocher monégasque pourrait bien en finir avec les montagnes russes…
Rico Rizzitelli
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