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Middlesbrough : avec Michael, c’est Carrick
Comme Kompany, une autre légende de Premier League a choisi de devenir entraîneur et de se frotter à l'épineux Championship. Investi le 24 octobre, Michael Carrick a transformé Middlesbrough d’un potentiel relégable en un séduisant candidat à la montée.
La chance du débutant. Voilà ce que certains ont pu penser lorsque Middlesbrough a glané ses premiers succès sous le mandat de Michael Carrick. Il est vrai que ce dernier connaît à 41 ans dans le nord-est de l’Angleterre sa première véritable expérience de coach principal. Hormis un intérim de trois matchs à Manchester United fin 2021, après le licenciement de Solskjær, dont il était l’adjoint depuis 2018, le CV du natif de Wallsend était vide. Quatorze victoires en dix-neuf sorties plus tard, (43 points sur 57, seul le Burnley de Vincent Kompany fait mieux sur cette période), le hasard ne suffit plus à expliquer le formidable come-back des pensionnaires du Riverside Stadium.
Lancé dans le grand bourbier du Championship
En effet, la saison du MFC avait bien mal commencé. Au sortir d’un exercice 2021-2022 conclu aux portes des play-off, Chris Wilder n’a pas réussi à relancer la machine. L’ancien technicien de Sheffield est débarqué au soir de la 11e journée. Middlesbrough est à cet instant 21e avec 10 points. Le board s’entretient alors avec Michael Carrick. Le directeur sportif, Kieran Scott, raconte sa première impression : « Il s’est montré humble, honnête, intelligent. Nous avons eu le sentiment que c’était la bonne personne, qu’on pouvait construire quelque chose. » Cependant, dans un Championship exigeant, le manque de bouteille n’est-il pas un risque ? Adjoint à Leicester depuis 2019, Kolo Touré a par exemple pris en main Wigan, lanterne rouge, le 29 novembre dernier. L’Ivoirien a été remercié en janvier sans avoir décroché le moindre succès. « Il y a toujours une petite inquiétude, concède Kieran Scott. Mais il est minutieux, et c’est une véritable éponge. Il absorbe les infos pour les réutiliser. Il a connu des managers incroyables et bénéficié d’un bon apprentissage. Plus on parlait, plus il entrait dans les détails de son projet, et plus on s’apercevait que son manque d’expérience n’était pas un problème. »
Comme l’indique la troisième place actuelle de Boro, l’ancien milieu aux 464 matchs avec les Red Devils a plus que pris la mesure du job. Avant l’aspect tactique, son directeur sportif insiste sur le travail invisible accompli : « Les joueurs manquaient de confiance. Ils avaient besoin d’un bras autour de l’épaule. Il a détendu le club, en a fait un endroit où tout le monde se sent bien. Avec les résultats, il a pu cimenter tout ça. » Un constat confirmé par le latéral Ryan Giles sur la chaîne YouTube du MFC : « Quand nous marquons des buts, vous voyez comment nous célébrons. Il y a une bonne cohésion au sein du groupe. » Cette unité s’observe également à travers la capacité de l’équipe à se (re)mobiliser après une défaite. Depuis l’intronisation de Carrick, en atteste la claque 5-0 collée à Reading le week-end dernier, une semaine après une défaite à West Brom, chaque revers a été suivi par de larges victoires.
Dans la même veine que De Zerbi et Arteta
Sur le pré aussi des choix forts ont été faits : exit le 3-5-2 de Chris Wilder, au profit d’un 4-2-3-1 hybride. Lorsque Boro attaque, le schéma se déforme souvent en 3-2-5 (procédé utilisé par De Zerbi ou Arteta). L’arrière droit glisse dans l’axe, et le latéral gauche se projette. L’occupation des cinq couloirs offensifs permet de créer des espaces. Ces derniers bénéficient aux joueurs excentrés qui alimentent la surface adverse en centres (presque 22 en moyenne par match) vers des partenaires lancés. Ces ajustements ont ajouté le spectacle aux résultats. Depuis fin octobre, les Rouge et Blanc ont marqué 42 fois, plus que tout autre équipe de Championship.
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Certaines individualités se sont également transformées. L’attaquant Chuba Akpom n’avait jamais dépassé les 11 buts sur une saison. Aujourd’hui, il s’agit du meilleur artificier du championnat avec 21 réalisations (17 inscrites sous Carrick). Cantonné jusque-là au rôle d’avant-centre, le joueur anglais de 27 ans a été replacé en 10 par son nouveau coach. Même son de cloche pour Ryan Giles. Milieu gauche de formation, l’Anglais prêté par Wolverhampton a reculé d’un cran. Résultat, le néolatéral domine le classement des passeurs avec neuf assists.
La première étape du reste de sa vie d’entraîneur
Outre-Manche, cette métamorphose étonne. « On ne s’attendait pas à ce qu’il retourne ainsi la situation si rapidement », avoue Kieran Scott. Ce dernier, passé auparavant par Norwich, est impressionné par la faculté du quintuple champion d’Angleterre et champion d’Europe 2008 à accompagner les joueurs dans leur progression : « Pour quelqu’un qui a joué au plus haut niveau, qui a tant gagné, il se met vite au niveau de gars qui n’ont pas eu le même succès et il peut obtenir d’eux des choses que d’autres n’ont pas pu obtenir ». Au-delà des travées du Riverside Stadium, cette dynamique suscite l’admiration jusqu’à ses anciens adversaires. Sur Twitter, John Terry a encensé le travail de son ancien rival de MU. Ray Parlour, légende d’Arsenal, s’est montré tout aussi conquis : « Michael a changé les choses. (…) Il a été une bouffée d’air frais pour le club. » Relégué dans l’antichambre de la Premier League en 2017, Middlesbrough peut espérer remonter cette année. L’équipe du North Yorkshire est bien partie pour, au moins, filer en play-off. Mais Kieran Scott sait que le club revient de nulle part : « C’est un objectif, car ils nous ont donné cette chance. Ce n’était pas le cas il y a 25 matchs. Quoi qu’il arrive, nous avons les bonnes personnes et nous travaillerons pour la saison prochaine, quelle que soit la division. » En poste depuis six mois à peine, Michael Carrick a déjà un exploit à portée de main.
Par Mathis Rouanet
Propos de Kieran Scott recueillis par MR.