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Llorente de retour à la messe

Parti dans la cacophonie de son Athletic en 2013, Fernando Llorente retrouve pour la première fois le club qui l’a couronné Rey Leon. Un come-back empreint de nostalgie qui ne devrait cacher quelques sifflets. Car plus que cette idylle de 17 ans, l’aficion basque se rappelle avant tout de son départ agité vers Turin.
L’histoire prend fin un certain 11 mai 2013. D’abord pour San Mamés, cathédrale des Leones qui fait une croix sur son siècle d’histoire pour réapparaître, quelques mois plus tard, dans un apparat flambant neuf. L’atmosphère mêle déjà saudade et excitation, puis gagne en singularité lorsque Fernando Llorente trouve le chemin des filets pour ce qui reste le dernier but inscrit dans le San Mamés 1.0. Un pion qui, par là même, signifie la dernière banderille rojiblanca du longiligne attaquant originaire de Pampelune. Car après 17 ans d’un amour sincère et réciproque, il quitte sa compagne de toujours : l’Athletic de Bilbao.
Entré dès sa onzième bougie dans la cantera basque, il n’en part ainsi que dix-sept ans plus tard.
Et par une grande porte qui se retrouve finalement si petite, la faute à un imbroglio de plusieurs mois avec sa direction et des bisbilles avec une frange des supporters. En ce jeudi de Ligue Europa, c’est avec le maillot du FC Séville qu’il retrouve l’antre qui l’a couronné comme le Rey Leon et mené vers la gloire de la Roja. « Ce sera une nouvelle expérience dans ma carrière et, je l’espère, une nuit merveilleuse » , a-t-il prévenu. Une nuit faite de sifflets, aussi.
Fernandito, Valverde et embrouilles à répétition
Quand il enfile la tunique blanc et rouge de l’équipe-fanion pour la première fois en janvier 2005, Fernando Llorente n’est encore qu’un minot.
Un gamin au presque double mètre, certes, dont le père footballistique répond au nom d’Ernesto Valverde. Ce même entraîneur basque qui, lors de son retour sous la guérite de San Mamés à l’été 2013, entraperçoit la grande carcasse de la pointe qu’il a lancée dans le bain professionnel se faire la malle. « J’ai un très bon souvenir d’Ernesto, évoque-t-il au micro de la Cadena Ser lors de sa dernière interview à Bilbao. J’aurais vraiment aimé continuer avec lui, mais les circonstances ont fait que ce ne sera pas possible. J’ai un futur qui s’écrit loin de l’Athletic et j’espère que tout va bien se passer à Turin. » Ce départ acté pour l’Italie lui fait délaisser dix-sept ans de sa vie, autrement dit un bilan de 333 matchs et 115 buts. Des statistiques d’un autre temps pour l’Athletic, qui renvoient ses fans vers les époques glorieuses de Telmo Zarra et Dani Ruiz Bazan. Pourtant, son départ se fait dans la confusion la plus totale.
Une triste fin à des années-lumière de ses débuts idylliques en 2005, quand Fernando Llorente se construit un statut d’inamovible à la pointe de l’attaque des Leones. D’abord lancé par Ernesto Valverde, il poursuit sa progression sous la houlette de Javier Clemente, puis de Joaquín Caparros.
L’ancien sélectionneur de la Roja, d’ailleurs, se veut l’un des points d’inflexion de la carrière de l’attaquant. Alors à la barre du navire de Bilbao, il connaît deux saisons apocalyptiques durant lesquelles le club frôle la descente. Idem, il choisit cette période pour faire de Llorente l’une de ses pointes, à coup d’humiliation publique et de jeu avec son moral : « Avec moi, il n’a pas toujours réussi à être titulaire. Mais je crois que ce qui le gênait le plus, c’était que je l’appelle Fernandito. » Un surnom qui passe mal chez l’intéressé, et qui le pousse à la révolte, déjà. À l’image de son entente paradoxale avec Clemente, son parcours à l’Athletic est ainsi jalonné de hauts et de bas, en attestent ses deux exercices passés sous les ordres de Marcelo Bielsa. Une période en clair-obscur.
D’étendard des Leones au statut de mercenaire
Homme fort de la métamorphose de l’Athletic, El Loco offre dès son arrivée un football joyeux et entraînant à San Mamés. Un changement radical qui déchaîne une nouvelle fois les passions chez ses aficionados, et un nouvel élan dans un effectif en plein renouvellement de générations. Fernando Llorente, lui, profite à fond des nouvelles aspirations offensives et plante comme un goret. Avec 28 pions toutes compétitions confondues, il s’offre sa meilleure saison et s’installe durablement avec la Selección. Un nouveau statut qui lui donne également des envies d’ailleurs : le début de la fin.
Car dans un club aussi marginal que l’Athletic, la direction s’attèle à faire du cash grâce à des clauses libératoires mirobolantes. Llorente refuse de prolonger dans ces conditions, et reçoit de la part du président Urrutia des qualificatifs tels que celui de « mercenaire » . Dans le même temps, sa relation avec Bielsa s’effrite jusqu’à atteindre un point de non-retour à l’automne 2012, confirmé par son départ libre en mai de l’année suivante. « Je suppose qu’on entendra des sifflets » , prophétise l’actuelle pointe remplaçante de Séville avant de tenter de se rassurer : « Cela ne veut pas dire que tout le monde me déteste. »
Où est le suspense en Europe ?Par Robin Delorme