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L’instant foot, Episode 1.

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Manœuvre estivale d’évitement d’un Ecossais blond mais néanmoins viril.

Paul Gascoigne n’a pas passé sa carrière uniquement à sa goinfrer de kebabs et à ingurgiter des litrons de houblon. Sus à Colin Hendry

Jeudi 15 Juin 1996, à Londres. Le stade de Wembley, dans toute sa splendeur, accueille à peine moins de 80 000 britanniques bouillants, vibrants et hurlant. L’Angleterre affronte l’Ecosse, le big match du groupe A.

76e minute du match. Quelques minutes avant l’action. Les mecs de Venables mènent 1 but à rien grâce à Alan Shearer depuis plus de 20 minutes. L’arbitre italien M Pairetto accorde à Gordon Durie un penalty que tout bon Anglais trouvera généreux suite à un tacle non moins généreux de Tony Adams. Durie ne se sentant pas en veine, c’est McAllister qui le frappe et se déchire, le grand Seaman, lui, se la donne sur cette frappe molle.

Notre instant foot est imminent. Les acteurs sont, dans l’ordre d’apparition à l’écran, Seaman, Sheringham, Anderton, Gascoigne, Hendry, les restes de la colonne vertébrale d’Hendry, et enfin Goram, le gardien. Car on l’oublie trop souvent, même si chaque but est différent, il y a toujours un gardien qui se fait blouser dans l’histoire.

Seaman, gardien le plus potable d’Angleterre, qui vient juste de sauver la maison, botte son coup de pied de réparation avec la vigueur qu’on lui connaît. Le ballon – que l’on pourrait nommer Jean-Paul mais que l’on nommera finalement « le ballon » pour plus de commodité – le ballon donc file dans les airs, dépassant le milieu de terrain et chutant désormais en direction du numéro 10 de l’équipe d’Angleterre, qui n’est ni Platini ni Maradona mais bien ce bon vieux Teddy Sheringham. L’habile Anglais, dans une position bien reculée pour un joueur tel que lui, réalise un joli contrôle et se déporte sur l’aile, protégeant le ballon de son corps. D’un coup d’oeil rapide, il remarque que l’un de ses coéquipiers semble tout disposé à prendre le contrôle de l’engin. Teddy fait la passe. Ce coéquipier judicieusement positionné, c’est Darren Anderton, jeune joueur de Tottenham qui ne sait pas encore qu’il va bientôt se faire piquer sa place en sélection par un petit trou du cul mancunien qui fout des boucles d’oreilles. S’apprêtant à accepter avec bonheur l’offrande de Sheringham, Anderton est troublé par la vision improbable qui s’offre alors à lui : ayant flairé un bon coup, le petit gros avec les cheveux bizarres qui se traîne dans les lignes d’attaque d’habitude est en train de taper un joli sprint plein axe, s’engouffrant dans l’un des nombreux espaces de la défense écossaise ! Passé la surprise, Anderton décide, pour récompenser un tel effort, d’enchaîner sans contrôle une passe en cloche à mi hauteur en direction de son impétueux partenaire. Bien lui en prit !

Visiblement satisfait de voir la balle lui arriver aussi vite, Paul Gascoigne, le grand Paulo, The Big Gazza, laisse alors libre cours à sa folie créatrice. Ralentissant son effrénée course, le ventripotent blondinet laisse subtilement le ballon rebondir une fois, une seule fois. Après, c’est sûr, il touchera ce ballon et en fera ce qu’il voudra.
Ayant jaugé la situation, il est au courant de la présence face à lui du défenseur écossais des Blackburn Rovers, le sémillant Colin Hendry. Blond comme les blés mais dur comme un cailloux. Alors que le ballon suspend son vol, atteignant le sommet de sa trajectoire parabolique, Gascoigne entreprend du pied gauche un astucieux lob visant à éliminer son vis-à-vis. Eliminer, le mot est dramatiquement juste, le pauvre Hendry, mordant à pleine dents dans la feinte, s’écroule lourdement en essayant sans succès de corriger une trajectoire définitivement irréversible. Le coup du sombrero est parfaitement réussi.

A cet instant, Gazza s’est ouvert en grand le chemin du but, ça crève les yeux. Il ne lui reste qu’à enchaîner rapidement afin d’éviter le retour improbable d’un défenseur écossais. Ne quittant pas la balle des yeux, il étudie sa trajectoire avec application. Comme le dit la gravité, « Elle vas retomber, ça c’est sûr » . S’imposant aux lois de la physique, Gazza ajoute un nouvel axiome : « elle vas retomber sur mon pied droit, ça c’est sûr » .
Gascoigne, les yeux toujours rivés sur le ballon comme sur les seins d’une page three girl, lance son pied (le plus) droit à la rencontre du projectile, débarrassé de toute envie de contrôle préalable. La frappe est un modèle d’équilibre et de précision, sans être une grosse mine pour autant. Goram, le gardien écossais, a beau s’employer, il est battu dès le départ.

Putain, c’est but là !

Alors que le ballon finit de danser en faisant gamelle, Gascoigne exulte, et avec lui tout ses petits copains. Belle image que ce Paulo au top de sa forme cet été-là, célébrant avec Neville, Redknapp ou McManaman ce qui fut sans doute le plus beau but du tournoi avec le lob de Karel Poborsky face au Portugal. Les Ecossais sont crucifiées, humiliés, chambrés par Gazza le faux frère, qui joue aux Rangers dans le civil et qui leur met la misère sur ce but. Cette Angleterre-là est imbattable, les Hollandais le confirmeront trois jours plus tard, prenant quatre buts dans la musette malgré leur équipe composée à 90% des vainqueurs de la C1 en 95… Honteusement éliminés en demi finale par l’armada germanique de Mehmet Scholl, les Anglais passent de peu à coté d’une belle victoire. Gascoigne ne brillera plus jamais de cet éclat sous le maillot blanc et rouge. Il baroude à droite à gauche, de clubs glauques (Middlesbrough, Everton) en contrées exotiques (La Chine, la Division One anglaise), laissant aux autres les regrets de voir un tel talent si mal récompensé.

Ce but a été justement élu par votre serviteur « plus beau but des années 90 » , avec en seconde position un autre but marqué à Wembley : celui de Mika Debève, en ligue des champions avec Lens face à Arsenal en 1998.

G.F.

La vidéo du but (Format Divx 5)Le codec Divx 5

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