Les nouveaux rois du Queens
Avec le rachat acquis des Queens Park Rangers par le binôme Briatore/Ecclestone, la F1 bling bling débarque dans l'ouest londonien. Près de 44 millions d'euros le club de seconde zone, c'est le prix pour se payer une escouade anglaise, cet accessoire qui se marie si bien avec le yacht trois étages et le jet privé. Au milieu des oligarques russes en exil et des milliardaires ricains qui ne pigent rien au soccer, le playboy sans âge des paddocks et le Montgomery Burns des circuits devraient se sentir comme chez eux...
Des Queens Park Rangers, Flavio Briatore connaît déjà le stade, le Loftus Road, qu’il déclare survoler régulièrement en hélico pour se rendre de sa demeure, située en plein Chelsea, à ses bureaux près d’Oxford. Un concentré de distinction Flavio. La cinquantaine grisonnante mais toujours la chemise ouverte avec vue sur la moquette, bronzage d’ancien moniteur de ski qu’il est, sans oublier la conquête de saison. Toujours du premier arrivage ou presque : Naomi Campbell, Elle Macpherson, Eva Herzigova, Nicole Kidman, Mariah Carey et Heidi Klum se sont relayées dans le motor-home Benneton puis Renault du Flavio.
Ecclestone, c’est un autre style. Petit et bigleux, cet Anglais de 76 ans n’a pas volé son titre de grand argentier de la Formule 1, puisqu’il émergerait à la tête de la sixième fortune de Grande-Bretagne. Pas mal pour un ancien pilote raté. Toujours prêt à sacrifier un circuit historique pour un tourniquet sans âme mais défiscalisé à Bahreïn ou en Malaisie, Bernie ne cherche même pas à cacher que son moteur à lui, c’est la thune ! Avec la retraite de Jean Alesi, le système Ecclestone reste la meilleure raison de préférer la sieste aux Grand Prix.
Autant dire que nos deux compères risquent vite de trouver leurs marques dans un football anglais en pleine jet-setisation. Avec les Queens Parks Rangers, ils héritent d’un club endetté à hauteur de 25 millions d’euros, 18ème de la Championship (Ligue 2 anglaise), donc pas près de revenir dans une Premiership quittée depuis 1996. Les seuls faits d’arme des Rangers remontent à une finale de Cup en 1982 et à une Coupe de la Ligue en 1967, si on compte large. Au niveau des gloires locales des près ressortent en vrac Gascoigne, Stan Bowles, David Seaman d’avant l’emphase capillaire ou un Peter Crouch encore risible.
Heureusement, pour se démarquer de ses nombreux congénères londoniens, QPR peut compter sur ses deux rock stars de supporters que sont Robert Smith et Pete Doherty. La légende veut d’ailleurs que Smith planifie le programme de Cure en fonction des matchs de ses Rangers. Plus atteint encore, l’ancien leader des Libertines, alors adolescent, distribuait son propre fanzine dédié à QPR. Mélange de poésies, citations littéraires et d’épopées à la gloire du club, son All Quiet On The Western Avenue ne sera jamais vraiment compris par les habitués de Loftus Road. Ce qui n’empêchera pas Doherty de composer une chanson dédiée à son club de toujours, chanson qu’il entonnera seulement le jour où QPR s’imposera en finale de la Cup. Un amour aveugle et désintéressé qui doit passer au dessus de la tête de coucou d’Ecclestone, qui de son côté aurait préféré se payer un bout d’Arsenal. D’ailleurs aux dernières nouvelles, le rapace ne lâcherait pas tout à fait sa première proie.
Les Queens Park Rangers se préparent donc un avenir de nouveaux riches à la Portsmouth ou Manchester City. Sur les trois prochaines saisons, les nouveaux propriétaires promettent ainsi d’injecter la petite bagatelle de 148 millions d’euros. A l’horizon 2011, Briatore espère voir sa nouvelle danseuse en haut de grille de la Premiership. Sur sa lancée, il promet aussi un nouveau grand stade dans l’ouest londonien, que les Rangers partageraient avec le Fulham de Mohamed Al-Fayed, autre grand philanthrope du coin. En même temps, Briatore avait promis que Minardi rivaliserait un jour avec Ferrari au moment de son rachat.
Mais pour se mettre les supporters dans sa poche, l’Italien sait pour le moins sortir les arguments qui comptent, à savoir une enveloppe de 15 millions d’euros afin de recruter d’ici janvier. Les préliminaires selon Flavio. Coco, Vieiri, Simone Inzhagi ou Cassano en phase terminale, les paris sont ouverts pour savoir qui viendra inaugurer le nouveau loft londonien.
Par tradition, QPR a toujours donné dans le panier percé. En 1989 déjà, Robert Smith confiait mi-dépité mi-amusé à ce sujet qu’il était « très frustrant de supporter QPR. Tu connais enfin les noms des joueurs et la semaine suivante, ils sont tous différents. Très spécial » . Robert, c’est tout le football anglais qui devient très spécial !!! Toujours plus de milliardaires sur les rangs et plus tellement de clubs intéressants en rayon, vous verrez qu’un jour même Coventry sera hors de prix…
Alexandre Pedro
1) Citation de Robert Smith tirée du Melody Maker et reprise sur www.kicknrush.com
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