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« Les footballeurs me disent que je suis un grand malade » : ces anciens pros accros à Strava

Par Titouan Aniesa et Ulysse Llamas
5 minutes

Comme deux millions de Françaises et de Français, des anciens footballeurs professionnels partagent leurs sorties quotidiennes et des kudos sur Strava, l’application préférée des coureurs. Même après une carrière exigeante, Anthony Mounier et d’autres gardent la compétition et le sport en moteur. Une façon de rester compétitifs avec eux-mêmes.

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Sur le papier, ils ont raccroché. Rideau. Fin de carrière. Discours ému, tour d’honneur sous les applaudissements et retraite paisible bien méritée. Une vie de sportif de haut niveau, ça use, c’est fatigant, ça requiert une sacrée discipline. La preuve : Diego Maradona, Ronaldinho, Wesley Sneijder, nombreuses sont les après-carrières dépensées à l’apéro plutôt qu’aux abdos. « Ce sont souvent les artistes, ceux qui n’étaient pas passionnés par la compétition, recense Anthony Mounier. Aujourd’hui, 90% des footballeurs m’envoient des messages et me disent que je suis un grand malade de continuer à faire autant de sport ! »

À 37 ans et une carrière professionnelle arrêtée à l’automne 2024, le CV de l’ancien Niçois, Montpelliérain et Lyonnais continue de s’étoffer : un marathon couru en moins de 3 heures, un semi en 1h21, et d’autres sont en prévision. Le père de famille partage toutes ces performances de haut niveau sur Strava, le réseau social des passionnés de course à pied. Comme lui, Morgan Schneiderlin, Wesley Lautoa, Stéphane Tanguy et d’autres anciens footballeurs professionnels continuent à faire beaucoup, beaucoup de sport. Et le font savoir aux autres.

La voie du kudo

Créée en 2009, la traduction suédoise de « poursuivre, viser un but » est devenue en quelques années l’indispensable des fans de running et des sorties vélo. Avec son carnet de bord, un détail de ses activités physiques, et la possibilité d’envoyer des kudos, des likes à ses amis, l’application séduit plus de deux millions d’utilisateurs en France. « Je comprends la hype, parce que la course à pied, c’est un objectif fait pour tout le monde, décrit Anthony Mounier, lui-même charmé. Tu progresses vite dès que tu t’y mets deux ou trois fois dans la semaine, donc tu y prends goût et tu as envie de t’améliorer. Après, il ne faut pas que ça devienne maladif non plus. »

De fil en dossard, la course est devenue un mode de vie pour le natif d’Aubenas, qui partage quotidiennement ses sorties sur l’appli orange. « La course à pied, ce n’est pourtant pas un truc qui me faisait kiffer en carrière, ajoute le néo-retraité. J’ai arrêté en pleine saison, mais j’ai continué à courir pour garder cette discipline, cette rigueur. C’était une échappatoire, une thérapie mentale. J’avais besoin de me faire mal, d’aller loin dans l’effort. » Une autre façon de repousser des limites entamées avec les foutus tours de stade pendant sa vie de footballeur. « Dans mes clubs, j’ai toujours fait les efforts, j’étais bon en cardio, mais je ne courais jamais plus de 30-40 minutes en présaison », raconte celui qui se réveille avant ses enfants pour aller courir.

Pendant ma carrière de footballeur, il m’arrivait encore de faire des compètes d’athlétisme. Je ne crois pas que les coachs le savaient, mais ça me faisait du bien.

Stéphane Tanguy, ancien joueur de Ligue 2

Retraité depuis 2011, Stéphane Tanguy passe également un paquet de temps sur Strava. Avant de fouler les pelouses de Ligue 2, l’ancien milieu caennais s’était déjà laissé happer par l’athlétisme et les cross du dimanche matin. Un fil cisaillé par le ballon rond, mais jamais totalement rompu. « Pendant ma carrière de footballeur, il m’arrivait encore de faire des compètes d’athlétisme. Je ne crois pas que les coachs le savaient, mais ça me faisait du bien, plaisante-t-il aujourd’hui le coureur licencié de Tourlaville, dans la Manche, et qui s’est reconverti ambulancier. J’ai toujours aimé ça. Le cross, l’effort dans la boue, l’hiver, ce sont des trucs qui me parlent. »

Sète &#8211; Cherbourg, 2007, avec Thierry Laurey sur le banc de Sète.
Sète – Cherbourg, 2007, avec Thierry Laurey sur le banc de Sète.

Marathon Men

Le père de famille a découvert le défi de la course quotidienne, le « run streak ». « Pendant le confinement, je cherchais un truc à faire, une routine, un fil conducteur. Je suis tombé sur ce concept venu des États-Unis : courir au moins un mile par jour, tous les jours, sans interruption. Je l’ai converti en kilomètres. » Et sur Strava, bien sûr. À l’été 2024, l’ancien de Wasquehal a dépassé les 1 000 jours consécutifs de running, tous partagés sur l’appli, avec une moyenne de 10 kilomètres par jour. Un chiffre impressionnant qui cache une auguste rigueur : « J’ai toujours mes affaires prêtes la veille au soir. Le matin, pas de débat avec moi-même. Il pleut ? Je mets un k-way. Il fait froid ? Un collant. Il n’y a pas de condition suffisante pour ne pas courir. »

Le plaisir de la course n’est pas supérieur aux émotions d’un match de Ligue des champions. Tu ne peux pas le retrouver ça, ça manque. Mais il faut savoir tourner la page…

Anthony Mounier

Le secret, selon lui, c’est de ne pas laisser le choix. L’acte devient un réflexe, presque mécanique, mais jamais vide de sens : « Même deux bornes, ça compte. Ce n’est pas pour faire un chiffre. C’est pour l’élan, pour rester dans la dynamique. » Anthony Mounier est dans le même couloir : « J’ai toujours été un compétiteur, un gros travailleur, toujours à la recherche de la perfection et exigeant avec moi-même. Aujourd’hui, la course à pied me permet d’aller chercher cette discipline et cette rigueur au quotidien. Même si le plaisir de la course n’est pas supérieur aux émotions d’un match de Ligue des champions. Tu ne peux pas le retrouver ça, ça manque. Mais il faut savoir tourner la page… »

Entre rigueur et défi personnel, ces footballeurs continuent donc de pousser leurs limites, à leur façon. Et dans le monde hyperconnecté de la course à pied, une nouvelle tendance s’est invitée : les Strava jockeys. Derrière ce nom barbare, des mecs qui courent sur les comptes d’utilisateurs d’autres personnes, prêts à tout pour avoir un joli profil et des kudos, et bien sûr pour épater la galerie plus que de cramer la semelle sur la route. Le progrès court toujours, et ce n’est clairement pas Anthony Mounier qui va le freiner. « Ces gars-là, ce sont des malades. Si certains ont de l’argent à claquer, qu’ils pensent à moi ! J’irai courir pour eux, pas de problème ! »

Dans la valise de Didier, il y a...

Par Titouan Aniesa et Ulysse Llamas

Tous propos recueillis par TA et UL

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