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Le Giggs, c’est chic
Elu footballeur de l'année par ses pairs en Angleterre puis sportif de l'année par la BBC, le Gallois vient de prolonger une saison de plus à Manchester United. Increvable et magique. Obertan, watch and learn !
Wayne Rooney a beau être une tête brûlée, il connaît ses classiques. Aussi quand à Portsmouth, il y a quelques semaines, il peut tenter sa chance sur coup-franc et s’offrir un quadruplé inédit pour lui, le jeune attaquant s’efface devant Ryan Giggs. Car Rooney sait : si le mythique Gallois lui demande le cuir, c’est qu’il va faire quelque chose de spécial. Soit une frappe brossée à l’ancienne dans le contrepied de Begovic. Au fond, cet épisode traduit bien une constante dans la carrière de Giggs. Ce type n’a jamais fait le voyage pour rien, toujours sobre, toujours efficace, toujours classe quoi. Alors malgré les 36 balais du Ryan, sir Alex Ferguson n’a pas hésité une seule seconde à le faire prolonger une saison de plus, jusqu’en juin 2011. Giggs aura alors fêté ses vingt ans de carrière à Manchester, son club de toujours, et peut-être ajouter encore quelques lignes à son palmarès déjà fort de onze titres de champion ( !), deux Ligue des Champions et des coupes nationales en-veux-tu-en-voilà. Vertigineux.
La synthèse parfaite
Evidemment, aujourd’hui, l’ailier mancunien ne possède plus ses jambes de la grande époque. Des jambes qui ont fait souffrir tous les défenseurs de la planète. Tous. En vérité, on avait vu venir la bête dès ses premières sorties à la fin de l’automne 1990, juste avant d’être élu meilleur jeune du championnat d’Angleterre deux ans de suite. Plus que Lee Sharpe, plus qu’Andrei Kanchelskis, les deux ailiers alors en vogue à Old Trafford, Giggs annonce ce qui va faire le succès du système Ferguson (le seul rescapé du premier titre de l’ère Fegie en 1993, c’est lui), ce jeu offensif façonné sur les ailes. Pourquoi le Gallois plus qu’un autre ? Simple. Giggs possède tout le bagage nécessaire pour permettre à MU d’aller cogner à la porte du plus haut niveau. Car le natif de Cardiff porte en lui une forme de synthèse, lui le fils de métis (son père, Danny Wilson avait une ascendance de Sierra-Leonne), lui le fils de treiziste, lui qui est si bien implanté dans l’agglomération de Manchester (il a grandi à Pendleburyen) mais Gallois jusqu’au bout des ongles. Résultat : une combinaison parfaite de vitesse, de puissance, de technique (ah sa conduite de balle, à montrer dans toutes les écoles de foot), de combativité, d’ancrage local et… de calme.
Car si Giggs est un enfant de Manchester, il n’est pas un sujet de Sa Très Gracieuse Majesté et a ainsi pu évoluer en toute quiétude malgré son incommensurable talent quand David Beckham, l’autre home maid hero, a toujours dû supporter la pression d’un pays qui n’a plus rien eu à se mettre sous la dent depuis 1966, quitte à se faire lyncher plus d’une fois. Oui, en optant pour la patrie de sa maman, Giggs s’est sans doute privé de joutes internationales plus réjouissantes et plus prometteuses qu’avec le Pays de Galles, mais s’est aussi sans doute davantage préservé pour pouvoir distiller son talent au plus haut niveau dix-neuf ans après ses débuts pros à l’heure quand Beckham a disparu de la carte depuis belle lurette tout en étant de deux ans le cadet de Giggs, bien plus talentueux aussi que l’Anglais, il faut le dire.
Zidane : « Le même choc qu’en voyant Ronaldo »
Car à écouter Laurent Blanc, qui avait pigé à Manchester de 2001 à 2003, Giggs est un véritable magicien. « C’est fou tout ce qu’il est capable de faire avec un ballon, il trouve toujours une solution. A l’entraînement, je ne vous raconte pas, c’est impossible de lui prendre la balle » se souvient le Président. Et tant qu’à parler de d’artistes hors norme, autant laisser la parole à Zidane, qui n’a pas l’habitude de témoigner beaucoup d’admiration pour les autres joueurs: « Giggs est un immense joueur. Je me rappelle clairement les matches que j’ai joués contre lui. Quand je l’ai vu pour la première fois, j’ai eu le même choc que quand j’ai vu Ronaldo » . Le vrai, hein. Et Zizou de conclure soulagé : « S’il avait été français, Pirès et moi aurions été sur le banc » Quant à Del Piero, il reconnaît carrément n’avoir pleuré que deux fois en regardant du foot : la première devant Baggio, la seconde en matant Giggs.
D’autant que le Red Devil a su se réinventer avec le temps. Fini les chevauchées fantastiques sur son flanc gauche, même si à l’occasion, cet éternel garnement sait encore casser quelques reins (Micah Richards, si tu nous lis). Non, désormais Giggs œuvre davantage dans l’axe dans un rôle de distributeur classieux. Forcément, le Gallois touche parfois les limites de son âge. Comme le 28 mai dernier au Stadio Olimpico de Rome face à Barcelone (0-2), où il s’est fait totalement bouffer par le milieu de terrain catalan. Il n’empêche, Ferguson a beau regarder son effectif sous toutes les coutures, il n’a pas encore trouvé mieux. Et, à dire vrai, on n’est pas tout à fait sûr que ce sera le cas en juin 2011.
Fulham-Manchester United, ce samedi
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