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Le douzième salopard
Tandis qu'une flopée d'Argentins dispatchés aux quatre coins de l'Europe prient en espérant que Maradona leur garde une place dans ses valises pour l'Afrique du Sud, les ultras de la Doce, le douzième homme de Boca Juniors, ont mis la touche finale à une petite entreprise qui les envoie au Mondial.
Le Superclasico a beau être « l’évènement sportif numéro un à voir avant de mourir » selon le Guardian, pour les supporters de Boca, parmi les plus exaltés de la planète, il n’en a pas moins un prix. La “Doce” (La Douze, pour douzième homme), l’un des groupes de barras bravas (ultras) les plus puissants du club xeneize, a fait de la rencontre de cet après-midi face à son ennemi juré, River Plate (suspendue au bout de neuf minutes ce week-end à cause du déluge qui s’est abattu sur Buenos Aires), le point d’orgue d’un négoce pas très clean, qui va permettre à ses membres d’aller supporter la bande à Diego pendant le Mondial. Certes, ce business a démarré il y a plusieurs mois, mais le buzz autour du match contre River devrait clôturer le financement de leur aventure sud-africaine.
Un business bien rôdé
La revente d’entrées, les “visites guidées” proposées aux touristes et l’argent issu de la gestion des parkings environnants de la Bombonera (mieux vaut lâcher quelques pesos aux aimables placiers, si on ne veut pas retrouver ses pneus crevés ou son pare-brise en miettes) constituent la pierre angulaire des opérations frauduleuses menées autour du Superclasico par la Doce. Durant la semaine qui a précédé la rencontre, entre les stands de maillots, de fanions et autres souvenirs du club de la Boca, une poignée d’hinchas du virage nord ont arpenté les rues du mythique quartier portuaire à la recherche de leurs proies : des touristes en quête de l’adrénaline du Superclasico. A deux pas des tribunes jaunes de la Bombonera, les barras bravas ont ainsi animé un marché plutôt fructueux. Le prix du paradis : de 600 à 1300 pesos (entre 120 et 260 euros) en tribunes latérales, autour de 400 pesos en populaire (80 euros) selon la rumeur, quand l’affaire ne se règle pas à coups de billets verts.
Petite visite de courtoisie
Et pour ceux qui n’ont eu ni l’envie ni le courage d’aller négocier sur place, les supporters de la Doce ont tout prévu : sur Mercado Libre, sorte d’eBay argentin, on pouvait trouver des tickets à un tarif similaire. Avec toujours, le même risque : celui de se retrouver avec une entrée bidon. C’est ce qui est arrivé dimanche à quelques touristes, lorsqu’ils se sont présentés aux tourniquets de contrôle du stade. Et dans ce cas-là, aucun recours envisageable… Vraisemblablement peu satisfaits des bénéfices engrangés cette année, des leaders de la Doce auraient rendu une petite visite de courtoisie au groupe professionnel la semaine dernière, histoire de leur demander de hausser un peu leur niveau (Boca est actuellement avant-dernier ex aequo du Tournoi de Clôture), pour que leur biz’ continue de tourner. Et sinon ? « Sinon, la tune (que l’on perd), vous allez devoir la sortir votre poche ! » , aurait lancé la Doce à Riquelme & cie. Parfois, mieux vaut jouer à onze…
Alejandro Carbone, à Buenos Aires
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