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Lazio, partie pour durer ?
Après trois saisons passées dans le ventre mou du classement, la Lazio a retrouvé cette saison les hauteurs, même si elle a échoué aux portes de la Ligue des Champions. L'arrivée de Klose dès les premiers jours du mercato est un message fort : cette Lazio-là ne veut plus vivre dans l'ombre de sa cousine.
Claudio Lotito est coutumier du fait. Depuis son arrivée à la tête de la Lazio, en 2004, le président romain a souvent laissé les tifosi sur leur faim. Avant le Brésilien Hernanes, arrivé l’été dernier à Rome au terme de tractations qui ont duré des semaines, bien peu de noms ronflants avaient fait rêver les foules. Les joueurs devenus leaders de l’équipe (Rocchi, Zarate, Pandev, Ledesma ou Mauri) ont plutôt été des paris gagnants que des recrutements vrombissants. Il est effectivement loin le temps où une myriade de stars aux salaires mirifiques débarquaient de ce côté-là du Tibre. Paradoxalement, ce sont justement ces gros salaires qui ont entraîné la chute du club, lors de l’été 2004. Une dette colossale et une faillite imminente : Claudio Lotito est arrivé in-extremis pour sauver les meubles.
Mais par conséquent, depuis sept ans, celui qui « parle de football, mais pas de ballon » s’efforce de ramener les comptes dans le positif en menant une politique financière presque drastique. N’en déplaise aux supporters, qui préféraient assurément voir Nesta-Nedved-Salas battre Manchester United que Cribari-Baronio-Makinwa perdre contre Cagliari. Alors, cette année, Claudio Lotito a décidé de prendre tout le monde à contre-pied. Alors que le mercato n’est officiellement ouvert que depuis le 7 juin, il officialise dès le lendemain l’arrivée de Miroslav Klose. Le voilà, le fameux buteur réclamé par le coach, Edy Reja, depuis plus d’un an. Certes, l’Allemand n’est peut-être plus aussi affuté qu’il y a quelques années (il a fêté la semaine dernière ses 33 ans), mais il demeure habité par l’envie de se relancer. Et parfois, l’air d’ailleurs fait du bien. N’est-ce pas Raùl ?
Lotito III, Redemption
Or, c’est déjà une certitude, d’autres vont suivre. Lotito ne veut pas perdre de temps, et souhaite construire sa future équipe au plus vite, avant le stage de pré-saison à Auronzo di Cadore. Lorik Cana, l’ancien Marseillais, serait bien parti pour signer. Tout comme le Bosniaque Lulic, petit ailier prometteur des Young Boys de Berne. Dans les cages, Marchetti, gardien de la Nazionale pendant le Mondial 2010, devrait remplacer Muslera, destiné à partir après la rupture entre son agent et Lotito. D’autres noms fusent. Konko, Djibril Cissé, Biondini, Contento. Tous n’arriveront pas, évidemment. Mais la volonté est là. La volonté de prolonger une saison positive, mais surtout, de ne pas reproduire les erreurs passées. Lotito est du genre têtu, voire borné, mais depuis quelques mois, il affiche un esprit de rédemption envers les supporters. Car ces derniers ont du mal à lui pardonner certaines choses. Lors de la saison 2006-07, la Lazio se qualifie pour le tour préliminaire de la Ligue des Champions. On annonce des renforts.
Au final, personne n’arrive hormis des joueurs foireux comme Del Nero, Meghni ou Scaloni. Résultat, avec une profondeur de banc proche du néant, l’équipe se fait sortir au premier tour de la C1 et lutte pour le maintien en championnat. Deux années plus tard, rebelote. La Lazio remporte la Coupe d’Italie et se qualifie donc pour l’Europa League. Même histoire. Voilà que débarquent Eliseu et papy Julio Cruz, de la grosse star. Mêmes conséquences : la Lazio se fait sortir au premier tour, encore, et lutte pour le maintien, encore. Deux fois les mêmes conneries, ça suffit. Lotito a compris. Et puis, maintenant, il est épaulé par un aigle.
Les points sur les « i » d’Igli
Pour mieux comprendre, d’ailleurs, le patron biancoceleste a engrangé les conseils du vieux briscard Edy Reja. Arrivé à Rome au mois de février 2010 pour tenter de sauver un navire qui allait tout droit vers l’iceberg Serie B, Reja a radicalement transformé l’équipe. Même si certains supporters lui reprochent son manque de fantaisie et quatre derbys perdus, force est de constater qu’en un an, la Lazio n’est plus la même. 12ème avec 46 points l’an dernier, elle termine l’exercice 2011 à la 5ème position avec 66 unités. Le fruit d’une équipe construite avec plus de cohérence et renforcée habilement lors des dernières fenêtres de mercato. L’ossature de l’équipe s’est dessinée, autour de joueurs clefs comme Andre Dias, Ledesma ou Hernanes, meilleur buteur du club cette saison. Sans nul doute, avec davantage de conviction (et un ou deux joueurs en plus), les Laziali auraient pu accrocher le tour préliminaire de la C1. Malgré la déception pour l’objectif Ligue des Champions envolé à deux journées de la fin, la saison a été positive, et Reja ne souhaite pas s’arrêter en si bon chemin. Un peu déçu, mais loin d’être résigné, il n’attend que deux jours après la conclusion du championnat pour convoquer Lotito et Igli Tare, le directeur sportif. Objectif de ce colloque : mettre les points sur les « i » et donner sa petite liste pour la saison prochaine. Une liste tenue secrète, mais qui, sait-on, comporte un avant-centre, un milieu de terrain, un défenseur et un gardien de but. Lotito ne met que quelques jours pour se muer en Père Noël et ramener dans sa hotte le premier des quatre.
Querelle de famille
Ce changement radical de façon d’agir a une explication. Lotito veut inscrire sa Lazio dans la durée. Pour ce, le message est clair : « Que ceux qui veulent rester restent, que ceux qui veulent partir partent » . Personne n’est invendable. La preuve : Lichtsteiner est convoité par la Juve. « J’attends leur coup de fil » ironise Lotito. Mauri entend les sirènes milanaises. « Mauri ? Il reste. Personne ne me l’a demandé » affirme encore le boss aux quatre téléphones portables. Néanmoins, derrière ce discours un tantinet provocateur, Lotito sait qu’il n’est absolument pas question de tout chambouler. La 5ème place obtenue cette saison doit être le début d’un nouveau cycle. De plus, pour la première fois depuis huit ans, la Lazio s’est payé le luxe de terminer devant l’AS Roma au classement, après sept championnats au cours desquels la rivale avait engrangé 101 points de plus (près de 17 points de moyenne par saison). Or, la primauté dans la Ville Éternelle peut servir de nouveau point de départ. La Roma aura du répondant, avec la nouvelle aventure construite autour de Luis Enrique. Mais la Lazio ne veut pas rester là, à regarder impuissante les exploits de son ennemie jurée, en espérant que l’Inter et le Milan AC l’empêchent d’aller titiller le titre. Elle aussi, veut en être. Elle aussi, veut son rôle de protagoniste. Elle aussi, veut rêver.
Eric Maggiori
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